Chapitre 1474 – Fin des Temps

Traducteur/Checker : Gray

Team : World Novel

“Qu’est-ce que c’est que ce bordel ?”

Instantanément tendu, Sunny détourna le regard de la Danseuse Calme et tendit la main, prêt à invoquer le Péché de Réconfort.

Sa première pensée fut de faire un Pas de l’Ombre dans la chambre cachée sous le sol de la tour. La tour tremblait, et Cassie était là, au cœur de la sorcellerie d’Aletheia. Cassie s’était d’ailleurs montrée plutôt mystérieuse ces derniers temps… imprévisible…

Cependant, un instant plus tard, il secoua la tête, se sentant légèrement honteux. Pourquoi soupçonnait-il la jeune aveugle ? C’était même sa première réaction.

Au lieu de cela, Sunny se concentra sur ses ombres et jeta un coup d’œil plus attentif à l’extérieur. Ce qu’il vit assombrit son expression.

“Qu’est-ce qui se passe ?”

Jet s’était réveillée de sa sieste et le regardait maintenant, un air profondément renfrogné sur le visage. Effie avait failli perdre l’équilibre lorsque la tour avait tremblé, et se tenait maintenant le ventre, alerte. Nephis avait sauté de l’endroit où elle était en train de découper de la viande sur le cadavre du Tyran Supérieur, des étincelles blanches s’allumant dans ses yeux d’un gris saisissant.

Sunny hésita un instant.

À l’extérieur de la tour… les vieux pins se balançaient. Ce qui signifiait que ce n’était pas seulement la Tour d’Aletheia qui avait tremblé. C’était l’île entière.

Damnation.

Sunny remarqua que Cassie apparaissait dans les escaliers menant à la chambre cachée et répondit :

“Je n’en suis pas sûre. Mais… Je crois qu’il s’est passé quelque chose dans le port.”

En dehors du cercle mortel des obélisques noirs, il n’y avait qu’un seul endroit construit par Aletheia qu’ils n’avaient jamais visité sur l’île — le port, qui avait été enveloppé de lianes vertes et transformé en nid par une Créature du Cauchemar particulièrement redoutable.

L’ancien bâtiment n’était pas inclus dans le plan que Sunny et Cassie avaient élaboré, car il n’y avait rien à y faire. En vérité, le port n’avait rien à voir avec la boucle temporelle, les enchantements protecteurs de la tour ou leur chemin vers la liberté.

Il jouait cependant un rôle important. C’est là que se trouvait le mécanisme qui maintenait l’Île d’Aletheia dans les airs.

Ainsi, à moins que Sunny ne veuille faire tomber l’île entière dans le vortex, il n’était pas nécessaire de combattre l’actuel maître du port et d’y entrer.

Mais il n’avait jamais pensé que le mécanisme serait endommagé lors de la guerre d’extinction entre les prisonniers de l’île. Il était resté intact pendant d’innombrables siècles et n’avait jamais été endommagé lors des révolutions. Quelle sorte d’horreur une abomination devait-elle posséder pour briser les défenses imprenables de l’ancien enchantement ?

…Une horreur particulière lui vint à l’esprit.

La Bête Dévorante… c’est forcément elle.

Pendant quelques instants, Sunny fut plongé dans une terreur froide.

Cependant, en remarquant que l’île ne plongeait pas dans l’abîme, il se calma un peu.

“Je… Je ne pense pas que les dommages causés au mécanisme de lévitation soient sérieux. Il a probablement été un peu secoué.”

C’est alors que la tour trembla à nouveau. Cette fois-ci, la secousse n’était pas aussi puissante, mais ils la sentirent tout de même.

L’expression de Neph devint sombre.

“Mais… ce n’est pas une bonne nouvelle pour nous.”

L’île ne tombait pas encore, mais qui pouvait dire qu’elle ne tomberait pas à l’avenir ?

Sunny soupira.

“Ouais. Nous devrions probablement accélérer nos plans.”

Les membres de la cohorte se regardèrent.

Le sens de ses paroles était simple. Sunny leur disait que l’inévitable bataille contre les Plaies, qu’ils avaient tous redoutée et à laquelle ils s’étaient préparés pendant cette courte période de paix, était maintenant sur le point d’arriver.

Cassie soupira.

“J’ai l’impression que nous avons encore quelques jours devant nous. Rester sur l’île plus longtemps… pourrait être dangereux.”

Sunny acquiesça.

“Alors nous agirons dans deux jours. Pour le meilleur et pour le pire.”

Il avait déjà dit à ses compagnons tout ce qu’il savait sur les deux Saintes Souillées. Ils avaient déjà discuté de toutes les stratégies possibles. Il ne leur restait plus qu’à se préparer mentalement et à s’aventurer une dernière fois dans la brume.

Jet soupira et se dirigea vers le Coffre de la Convoitise.

“Je ferais mieux d’arrêter de conserver ces fruits, alors.”

Elle avait raison. Auparavant, ils pensaient rester dans la tour aussi longtemps que possible. Maintenant, cependant, il y avait une limite claire au temps dont ils disposaient. Il lui restait encore quelques fruits dorés, alors absorber le plus d’essence possible pour se préparer au combat était plus important que de gagner du temps.

Tous se mirent bientôt à faire les derniers préparatifs. Sunny, quant à lui, continuait de surveiller l’extérieur.

L’île trembla encore plusieurs fois au cours des deux jours suivants. La brume, elle aussi, devint très fine, ce qui lui permit de voir très loin.

Et ce que Sunny vit…

Était vraiment stupéfiant.

Maintenant que l’Île d’Aletheia avait presque perdu le voile obscurcissant de la brume, elle ressemblait à un champ de bataille ravagé.

La forêt de pins anciens avait presque entièrement disparu. La plupart des arbres avaient été brisés ou renversés, recouvrant le sol comme des ronces. Ici et là, des cadavres gargantuesques gisaient, entourés de vastes mares de sang. Certains étaient terriblement déchiquetés et partiellement dévorés, d’autres étaient étrangement intacts.

Les quelques repères dont il se souvenait étaient soit effacés, soit difformes et reconnaissables. Non loin de là, une aile brisée du Papillon Creux gisait sur le sol, mais les restes du Monstre Supérieur était introuvable.

Il semblait avoir sous-estimé la fureur primitive des Créatures du Cauchemar emprisonnées sur l’île. Il ne restait plus qu’une poignée d’entre elles, les plus terribles et les plus puissantes.

Sunny assista également à plusieurs scènes glaçantes. La plus terrible d’entre elles se produisit à l’aube du deuxième jour, lorsque la forme imposante de la Bête Dévorante apparut au loin.

La géante bestiale se déplaçait lentement. Mais elle se figea soudainement et leva les yeux.

D’innombrables vrilles descendaient du ciel nuageux, l’assaillant comme une marée. Chacune d’entre elles mesurait des centaines de mètres de long et était extrêmement puissante — suffisamment pour faire frissonner Sunny.

La Bête Dévorante repoussa plusieurs des vrilles, mais plusieurs autres s’enroulèrent autour de ses bras, de sa taille et de son cou, étranglant la Sainte Souillée et essayant de la soulever du sol. Sunny eut même une lueur d’espoir qu’elle soit tuée par l’épouvantable horreur céleste, le Moissonneur.

Un hurlement frénétique secoua le monde.

Souriant follement, la géante bestiale planta ses dents dans l’une des vrilles, puis tendit ses muscles et attrapa celles qui lui enserraient les bras. Se pliant à la taille, elle grogna… et tira la créature cachée dans les nuages vers le bas. Le sol sous ses pieds explosa, se transformant en un profond cratère.

Sunny regarda, choqué, une créature répugnante descendre du ciel, projetée avec force. Elle ne ressemblait à rien de ce qu’il avait jamais vu… une masse de chair frétillante qui, de loin, ressemblait à une voile en lambeaux, ou une étoile sombre qui émanait des tentacules charnus au lieu de rayons de lumière.

Des dizaines d’autres tentacules se dirigèrent vers la Bête Dévorante, mais avant qu’ils ne puissent l’attraper, la géante s’accroupit soudainement, et sauta.

S’élevant à des centaines de mètres dans les airs, elle déchira le Moissonneur avec ses doigts, puis retomba en le saisissant dans ses mains.

Peu de temps après, l’horreur céleste fut complètement dévastée, ses vrilles déchirées et dévorées, son corps grotesque mutilé au point d’être méconnaissable.

La Sainte Souillée reçut de nombreuses et terribles blessures… mais son ennemi fut entièrement détruit.

Moins d’une douzaine de minutes plus tard, le Moissonneur n’était plus.

…Caché dans la tour, Sunny tremblait. Son cœur était lourd.

Poussant un soupir, il ferma les yeux et murmura :

“Cette chose… n’a pas l’air d’avoir faim.”