Chapitre 1053 – La Chute de Falcon Scott (71)

Traducteur/Checker : Gray

Team : World Novel

Atteindre le port se révéla être une tâche compliquée. Il y avait trop de monde et trop de véhicules qui allaient dans la même direction — à un moment donné, il devint impossible d’avancer. La route était complètement bloquée, ce qui constituait une scène vraiment étrange. À CSQN, les VTP étaient plutôt rares, mais à Falcon Scott, il y avait beaucoup de transports militaires de toutes sortes.

Comprenant que leur véhicule était vraiment bloqué, Sunny grimaça et demanda à tout le monde de sortir. Ce faisant, une litanie de sons assaillit leurs oreilles — le grondement des moteurs, le hurlement des klaxons électriques, les cris anxieux d’innombrables personnes… tout cela se fondit en un nuage de bruit cacophonique.

Autour d’eux, une foule immense s’écoulait sur la route encombrée, les véhicules attendant désespérément une chance d’avancer. Il y avait des hommes, des femmes et des enfants, certains portant des bagages et des sacs à dos contenant leurs affaires, d’autres ayant les mains vides.

Le conducteur d’un énorme transport se tenait sur le côté de la cabine, criant furieusement à tout le monde de s’écarter de son chemin et qu’il avait l’ordre d’atteindre le port. Ses cris ne servaient à rien, bien sûr. Même si la foule s’écartait, il y avait un autre véhicule juste devant le transport, et un autre après lui, et un autre encore — tous bloqués de la même manière.

Les personnes qui se dirigeaient à pied vers le port agissaient également de manière insensée. Ce n’était pas comme s’ils avaient une chance d’embarquer sur un navire simplement en atteignant la forteresse — la plupart d’entre eux avaient simplement paniqué et perdu toute raison. Certains ne voulaient même pas partir, mais se laissaient entraîner par la foule.

Quoi qu’il en soit, la foule représentait un sérieux obstacle pour Sunny. Heureusement, son uniforme s’était avéré suffisamment dissuasif — là où il marchait, un petit espace vide apparaissait comme par magie, permettant à son groupe d’avancer à une vitesse suffisante. Même dans cet état, les gens étaient capables de reconnaître un Maître.

Certains s’écartèrent par respect et révérence, d’autres par peur.

C’est… putain…

Sunny se considérait comme une personne expérimentée, et ce n’était pas sans raison. Du vide sans étoile du Rivage Oublié au paysage glacé de l’Antarctique, il avait vu et vécu beaucoup de choses, à la fois incroyables et terrifiantes. Cependant, il n’avait jamais rien vécu à l’échelle de ce qui se passait actuellement à Falcon Scott.

Même la destruction de la Cité d’Ivoire ne l’avait pas effleuré.

Lorsque la cohorte atteignit la section nord de la muraille, elle était d’humeur sombre et sobre. Il y avait là une autre porte massive, dont les battants étaient actuellement rétractés dans le cadre de la barrière. Au-delà, une vaste travée de béton menait directement au bord des hautes falaises.

D’habitude, il y avait plusieurs files organisées de réfugiés attendant leur tour pour utiliser les ascenseurs, et de nombreux robots transporteurs acheminant des marchandises vers et depuis la forteresse. Aujourd’hui, cependant, tout l’espace était recouvert d’une mer de gens, tous frénétiques pour s’approcher du bord et avoir une chance de descendre vers la côte.

Quelqu’un faisait encore fonctionner les ascenseurs, mais le personnel de la station de transfert avait manifestement renoncé à contrôler la foule. Les gens se pressaient contre les barrières en alliage censées les empêcher de tomber, et certains essayaient même de les escalader. Rien d’autre qu’une chute mortelle ne les attendait de l’autre côté, mais les grimpeurs semblaient complètement fous.

Sunny regarda cette scène étonnante pendant quelques instants, puis détourna le regard. Il sentit un frisson qui n’avait rien à voir avec le froid insupportable de l’hiver polaire lui parcourir l’échine.

Une foule humaine… était une chose effrayante. C’était d’autant plus effrayant que tout allait bien il y a à peine une demi-journée. En si peu de temps, la ville entière semblait être devenue folle…

Qu’est-ce que ces imbéciles espèrent accomplir ?

Sunny tressaillit.

Qu’espérait-il accomplir ?

Serrant les dents, il avança dans la foule. Son uniforme et son aura autoritaire lui ouvraient la voie, et quand cela ne suffisait pas, il les repoussait simplement — avec la force de Sunny, ce n’était pas du tout difficile. Rester assez doux pour ne pas écraser les gens était beaucoup plus difficile.

Ses soldats suivaient. Après avoir subi les horreurs du Sortilège du Cauchemar et l’agitation d’innombrables batailles, ils parvinrent tous à rester calmes. Beth et le Professeur Obel, cependant, avaient l’air profondément secoués. Pourtant, ils suivirent eux aussi.

Au bout d’un certain temps, Sunny arriva enfin à l’entrée d’un des ascenseurs. Pour l’instant, il était fermé, car la plate-forme n’était pas encore arrivée. Les réfugiés s’écartèrent légèrement pour laisser un peu d’espace à l’Éveillé. Toutefois, il pouvait encore entendre leurs voix.

“Regardez ! Un Maître !”

“Vous êtes là, officier ! Qu’est-ce qui se passe ?!”

“S’il vous plaît, emmenez-moi avec vous !”

“Soyez maudits !”

Il continua à regarder devant lui, ignorant les cris. Certains essayaient de s’incruster auprès de Sunny, d’autres le maudissaient et exigeaient des explications. D’autres se réjouissaient stupidement, comme si l’apparition d’un Ascendant allait tout résoudre.

Au moins, il fait moins froid.

Avec autant de corps, le froid oppressant s’était un peu atténué.

Finalement, une plateforme massive arriva du bas des falaises, et la barrière se rétracta dans le sol. Sunny mena son groupe et prit place de l’autre côté de la plateforme.

De là, il pouvait voir l’océan et la forteresse portuaire en contrebas. Il n’y avait qu’un seul navire gargantuesque ancré à proximité, et plusieurs grands ferries circulaient entre le navire et la jetée pour amener les gens à bord. Le port lui-même était aussi bondé que la station de transfert, tout comme la jetée. La situation à l’intérieur semblait encore plus chaotique qu’ici.

Après qu’environ deux mille personnes et plusieurs gros véhicules de transport eurent pénétré sur la plate-forme, la barrière se leva à nouveau et l’ascenseur descendit en piqué. Il semblait se déplacer à une vitesse plus élevée que d’habitude, ce qui fit glapir de peur plusieurs passagers. Pour autant, la plate-forme atteignit le bas de la falaise en moins d’une minute.

Une route fortifiée menait des ascenseurs au port. La moitié était réservée aux piétons, l’autre moitié aux véhicules — cette route était également encombrée, mais plus loin. Sunny remarqua des soldats qui montaient la garde au-dessus, accomplissant leur devoir avec des expressions perdues sur leurs visages. Heureusement, aucune Créature du Cauchemar n’avait choisi aujourd’hui d’attaquer la ville depuis la côte.

“Allons-y.”

Jetant un coup d’œil à Kim, qui portait toujours Luster, il continua à se diriger vers le port.

Il fallut du temps pour l’atteindre.

Plus ils approchaient de la jetée, plus l’atmosphère devenait frénétique. Certaines personnes étaient arrivées après que la terrible nouvelle de la défaite de Marée Céleste se soit répandue, mais d’autres étaient là depuis plus longtemps, attendant joyeusement d’être emmenées dans l’Antarctique de l’Est comme le voulait la file d’attente du gouvernement. Aujourd’hui, leurs chances d’obtenir une place sur le navire étaient incertaines.

“M-mais… nous devions être transférés aujourd’hui ! Regardez ! Nous avons nos billets !”

“Dégagez de mon chemin !”

“Monsieur ! S’il vous plaît, laissez-moi passer !”

“Quand le prochain navire arrive-t-il ?! Quand est-ce que…”

Les officiers du port tentaient désespérément de rétablir un semblant d’ordre, mais c’était inutile. Des soldats montaient la garde à l’entrée de l’embarcadère, et une barrière en maille d’alliage coulissait de haut en bas, permettant aux groupes de réfugiés d’avancer de temps en temps.

Chaque fois que la barrière se rétractait, la foule s’agitait et tentait d’avancer, mais elle était repoussée par les regards pesants des gardes.

Sunny hésita.

Qu’est-ce qu’on fait maintenant ?