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Chapitre 2076 – Fragments de la Guerre (13)
Traducteur/Checker : Gray
Team : World Novel
Comme Seishan l’avait prédit, le second assaut sur la Grande Forteresse du Croisement ne se produisit qu’après l’arrivée de l’Île d’Ivoire sur le champ de bataille.
C’était un spectacle à la fois intimidant et impressionnant. L’île volante se déplaçait lentement à travers le gouffre, endurant sans effort un barrage d’attaques destructrices. Un nuage de fumée l’obscurcit brièvement, comme un manteau flottant, puis la silhouette gracieuse de la Tour d’Ivoire se révéla à nouveau dans la fumée.
Immaculée et intacte.
Au même moment, les élites de l’Armée de l’Épée stationnées sur l’île décochèrent leurs propres flèches, faisant pleuvoir la mort et la destruction sur les défenseurs de la forteresse.
L’île se déplaçait progressivement à travers le gouffre, haut dans le ciel, supprimant les soldats du Chant. Profitant de l’occasion, trois séries de câbles furent tirés à travers les ténèbres, s’enfonçant dans l’os ancien de l’autre côté.
Des milliers de soldats se précipitèrent vers l’avant, pressés de construire les ponts. D’énormes boucliers étaient brandis devant eux, protégeant les ingénieurs des attaques à distance. Lentement mais sûrement, les trois ponts commencèrent à prendre forme.
Rapidement, les défenseurs du Grand Croisement durent se battre sur quatre fronts. L’aile gauche et l’aile droite de la forteresse imprenable, ainsi que son donjon principal, étaient assaillis par les soldats du Domaine de l’Épée, tandis que l’Île d’Ivoire se dressait au-dessus d’eux.
Cette fois, les vétérans les plus expérimentés de l’Armée de l’Épée, dont les Chevaliers de Valor, menaient l’assaut.
Alors que l’Île d’Ivoire s’approchait du milieu du gouffre sombre, menaçant de percer les défenses du Chant, un vaste essaim d’effroyables Créatures du Cauchemar surgit de derrière la forteresse, visant à délivrer une force de soumission et à conquérir la Citadelle volante — en réponse, les Chevaliers montés sur des Échos ailés se précipitèrent pour les intercepter.
Les serviteurs de Maîtresse des Bêtes se heurtèrent aux guerriers chevauchant les Échos, entraînant une bataille sans merci au-dessus de l’effroyable carnage qui se déroulait en contrebas.
L’enfer se déchaîna, menaçant d’entrer dans les annales de l’histoire comme l’une des batailles les plus terribles et les plus périlleuses de l’ère sombre du Sortilège du Cauchemar.
…Loin de là, à l’ouest, les choses n’allaient guère mieux au Petit Croisement.
La Première Côte, bien que vaste et modeste, avait un point de connexion beaucoup plus étroit avec le sternum du squelette titanesque. La forteresse était donc plus petite et les soldats qui la gardaient étaient moins nombreux. Néanmoins, l’effusion de sang y était tout aussi terrible.
Aucune île volante ne menait l’assaut, aussi les soldats de l’Armée de l’Épée ne pouvaient-ils compter que sur les ponts artificiels. Personne ne réprimait non plus les défenseurs de la forteresse en leur infligeant une pluie meurtrière depuis le ciel, si bien que les pertes du côté des attaquants étaient bien plus importantes.
Sunny observait la bataille avec une expression sinistre, sentant une fureur suffocante s’emparer de son esprit à la vue de tant de gens mourant sans raison. Mais il ne pouvait rien faire pour arrêter l’atrocité honteuse qui se déroulait sous ses yeux… non, ce n’était pas vrai.
Sunny pouvait faire beaucoup de choses.
Il pouvait manifester un pont d’ombres assez large pour faire passer des milliers de soldats supplémentaires. Il pouvait envoyer ses Ombres briser les murs de la forteresse. Il pouvait ordonner à l’armée de battre en retraite et refuser d’accepter les ordres du Roi.
Mais alors, que faire ?
L’utilisation de ses pouvoirs donnerait aux Saints du Chant l’occasion de se déchaîner à leur tour. Bien sûr, Sunny pourrait probablement leur livrer un bon combat… mais combien de soldats deviendraient des dommages collatéraux dans l’affrontement des puissances Transcendantes ?
Se rebeller prématurément contre le Roi des Épées coûterait la vie à Sunny et rendrait la destitution des Souverains encore plus difficile, voire impossible.
Il ne lui restait donc plus qu’à serrer les dents, à attendre son heure et à endurer le sentiment empoisonné de la colère.
Combien de temps encore ?
Il savait que le Roi des Épées observait attentivement le Petit Croisement. Cassie n’était pas la seule, et de loin, à lui fournir des informations. Par conséquent, Sunny ne pouvait pas mettre fin à la bataille tant que les forces du Domaine de l’Épée ne semblaient pas avoir la moindre chance de l’emporter.
Et les soldats… aussi découragés et désillusionnés qu’ils fussent, les soldats continuaient à se battre vaillamment. Ils s’efforçaient de remporter la victoire de tout leur cœur, notamment parce que la victoire leur semblait être le seul salut.
Damnation.
Caché derrière le Masque de Weaver, Sunny observait silencieusement la bataille.
Finalement, l’effusion de sang était devenue trop épouvantable, et l’élan de l’assaut s’était brisé.
Il avait son excuse.
« Retraite ! »
Quelque part au loin, l’assaut sur la Grande Forteresse se terminait également dans une impasse mortelle. Les portes de la forteresse avaient résisté aux coups d’un bélier de siège spécialement enchanté, et aucune des trois forces attaquantes ne parvenait à créer une tête de pont stable sur les remparts.
L’Île d’Ivoire fut également contrainte de battre en retraite, envahie par les serviteurs de Maîtresse des Bêtes et menacée d’être prise par les guerriers du Chant.
C’était une nouvelle défaite.
Merde, merde, merde !
Empreint de ressentiment, Sunny détourna le regard de la scène macabre de la bataille et s’éloigna.
Assez rapidement, la bataille se termina, il se réfugia par la suite dans sa tente.
Il savait qu’Anvil ne se contenterait pas de deux assauts ratés… d’autant plus que le second avait été bien plus meurtrier pour l’Armée du Chant que le premier.
Il y aurait un troisième assaut, puis un quatrième, puis un cinquième…
Jusqu’à ce que l’un des deux camps cède.
…C’est alors que Sunny repassait la bataille dans sa tête et trouvait des idées pour minimiser les pertes la prochaine fois que quelqu’un s’approcha de sa tente.
Après avoir frappé poliment, un homme portant une cape vermillon du clan royal entra lentement dans la tente.
Sunny le fixa froidement derrière son masque.
« Quoi ? »
L’homme s’inclina et parla d’un ton révérencieux :
« Seigneur Shadow, monsieur. Le Roi vous a envoyé un ordre spécial… »