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5468-chapitre-1650

Chapitre 1650 – Ville Gelée

 

Traducteur/Checker : Gray

Team : World Novel

 

Sunny ne savait pas ce qu’il s’attendait à voir à Falcon Scott. Il ne savait même pas pourquoi il se sentait obligé d’y entrer… et pourtant, il y entra, marchant dans les rues silencieuses avec une expression distante sur son visage pâle. Il était venu ici précisément parce qu’il ne le voulait pas, réticent à voir le monument de son échec. Il se devait à lui-même, et aux personnes qu’il n’avait pas su protéger, d’assister à leur dernière demeure dans toute son horrible gloire.

Peut-être était-ce simplement parce que, maintenant que personne ne se souvenait de lui, Sunny voulait au moins se souvenir de lui-même. Même les choses qu’il aurait voulu oublier.

La ville ressemblait à peu près à ce qu’il avait imaginé.

C’était un cimetière gelé. Le froid mortel du blizzard de la Bête Hivernale avait tué tout le monde en quelques instants. Les cadavres étaient cachés à l’intérieur des bâtiments ou ensevelis sous la neige, si bien que la ville semblait totalement vide.

Ils n’avaient pas souffert, au moins…

Certains bâtiments s’étaient effondrés au cours des derniers mois sous le poids de la glace. D’autres se dressaient comme des pierres tombales colossales… ou des mausolées glacés, peut-être, pour ceux qui avaient péri à l’intérieur. Étrangement, aucune Créature du Cauchemar ne semblait être entrée dans la ville pour se repaître des cadavres. C’était comme si la Bête Hivernale avait fait de cet endroit son territoire.

Sunny passa devant quelques structures familières… les casernes où les Irréguliers avaient été stationnés, le complexe gouvernemental, la tour-dortoir où Beth et le Professeur Obel avaient vécu. Son esprit était inondé de souvenirs, ce qui ne faisait que détériorer davantage son état mental.

C’était une chose étrange que d’être seul.

Maintenant que Sunny était seul, effacé de l’existence, il ne se sentait pas obligé de contrôler ses émotions ou de maintenir l’illusion de la normalité. Il n’y avait personne pour le voir s’effondrer, de toute façon, et personne pour se faire une fausse idée de lui. Il n’y avait plus de liens qui le reliaient au monde, certes… mais il s’avérait que ces mêmes liens avaient été comme des supports qui maintenaient son esprit en place.

Il devait avoir l’air assez inquiétant vu de côté.

Ce n’est que maintenant que Sunny était vraiment et totalement seul qu’il réalisait à quel point ses habitudes et son comportement avaient été dictés par le besoin de se fondre dans son environnement… dans la société humaine. Désormais, il n’avait plus à se préoccuper de maintenir des expressions acceptables, de dissimuler des sentiments inappropriés dans son regard et de prononcer des mots justes.

Ou de dire quoi que ce soit, en fait.

Peut-être que je devrais faire toutes ces choses, de toute façon.

Il se doutait bien qu’en cédant à cette liberté totale, il finirait par sombrer dans une sorte de dérèglement, mais il ne pouvait pas s’en préoccuper.

Finalement, il atteignit les vestiges du mur de la ville et passa quelques instants à contempler le champ enneigé qui s’étendait au-delà.

Grimpant sur les décombres, Sunny sauta, rendit son corps suffisamment léger pour marcher sur la neige, et laissa le fantôme de Falcon Scott derrière lui.

C’était probablement la dernière fois qu’il le voyait. Mais cela… n’était pas grave.

C’était mieux ainsi, en fait.

Quelque temps plus tard, il atteignit l’endroit où les derniers soldats de la Première Armée d’Évacuation étaient morts, tués par le froid mortel de la tempête de neige artificielle. Leurs silhouettes gelées étaient encore là, les plus proches gisant sur le sol, ceux qui avaient enduré plus longtemps figés comme des sculptures de glace.

Son visage immobile semblait figé lui aussi.

Il resta un moment parmi eux, regardant l’horizon. La Bête Hivernale s’était retirée au cœur de la masse continentale, mais les signes de son passage demeuraient. Aujourd’hui, l’Antarctique ressemblait beaucoup plus à ce qu’il avait été, glacial et enfermé dans la glace. C’était tout à fait approprié.

Sunny était encore plongé dans ses pensées lorsque quelque chose bougea sous la neige et qu’une créature hideuse s’élança vers lui depuis le sol. Il ne bougea pas, mais les ombres autour de lui s’agitèrent et s’élancèrent à une vitesse incroyable, attrapant l’abomination dans les airs.

Un instant plus tard, elle était horriblement déchirée, une pluie de sang chaud tombant sur Sunny comme une rosée cramoisie.

Son expression ne changea pas, mais ses yeux brillèrent d’une lueur sombre.

Étrange.

C’était tout de même étrange, de tuer une Créature du Cauchemar et de ne pas entendre la voix familière du Sortilège annoncer son Rang, sa Classe et son nom.

La neige autour de lui bougeait et explosait, des dizaines de corps grotesques se précipitant pour le réduire en lambeaux. Il y avait là toute une nuée d’abominations… Sunny bougea enfin, un sourire sinistre se dessinant sur son visage.

Il était si rapide qu’on aurait presque dit qu’il disparaissait à un endroit et apparaissait à l’autre. Il n’avait pas d’arme en main, et n’en avait pas besoin non plus. Les gantelets du Manteau d’Onyx suffisaient amplement.

Adoptant le style de combat sauvage des Spectres du Brouillard, Sunny écrasa le crâne de l’une des abominations à mains nues. Une fraction de seconde plus tard, il était près d’une autre, lui transperçant la poitrine et lui écrasant le cœur. En un clin d’œil, il était déjà ailleurs, démembrant brutalement la mâchoire d’un monstre.

Sunny se battait sans pitié et méthodiquement, détruisant les Créatures du Cauchemar de la manière la plus rapide et brutale qui soit… non, on ne pouvait même pas appeler ça un combat. Il n’était pas un combattant en ce moment — il était un boucher, ou au mieux un bourreau impitoyable.

Il ne lui fallut pas plus de douze secondes pour anéantir l’ensemble de l’essaim. Le sang qui recouvrait son armure d’onyx s’était déjà transformé en glace.

Les Créatures du Cauchemar étaient mortes… mais pas toutes.

Il en avait laissé une en vie.

À présent, l’énorme bête se tordait sur la neige, s’efforçant de s’y enfoncer tandis que les ombres la maintenaient en place. Il était impossible d’échapper à Sunny, mais l’abomination essayait toujours désespérément de s’enfuir.

Tournant la tête, Sunny étudia l’horrible créature, puis fit un pas vers elle.

“Où vas-tu ? Qui t’a permis de partir ?”

S’approchant de l’abomination, il s’accroupit à côté d’elle et fixa ses yeux frénétiques avec un sourire.

La gueule terrifiante de la créature était à moins d’un mètre de son visage, mais Sunny s’en fichait.

“Tu as choisi un mauvais jour pour exister, misérable. Ah, mais c’est pour le mieux. C’est exactement ce dont j’ai besoin !”

Il tendit une main et sentit le Serpent Noir en sortir. Aussitôt, un torrent de ténèbres s’écoula de ses doigts sur la neige, formant une Ombre massive.

Cette Ombre n’était cependant pas un grand serpent. Elle prenait plutôt la forme d’une créature imposante, dotée de deux jambes trapues, d’un torse émacié et voûté, et de mains démesurément longues et articulées — deux d’entre elles se terminant chacune par d’horribles griffes en os, et deux autres, plus courtes, se terminant par des doigts d’apparence presque humaine.

Son corps était recouvert d’une fourrure rêche d’un noir d’encre, et sa tête était ornée de cinq yeux noirs luisants. Sous ces yeux, une terrible gueule garnie de dents aiguisées comme des lames de rasoir était entrouverte, comme en attente. Une bave visqueuse coulait le long du menton de la créature et gouttait dans la neige.

Mais le plus troublant, c’étaient les formes étranges qui se déplaçaient sans cesse, comme des vers, sous la peau de la créature.

C’était le Roi des Montagnes. Ou plutôt, une version du Roi des Montagnes qui semblait avoir été plongée dans une piscine de ténèbres liquides.

Le sourire froid de Sunny s’élargit un peu, ses yeux sombres luisant d’une volonté sinistre.

“Vas-y. Celle-ci sera la première.”

Serpent fit un grand pas en avant et saisit l’abomination qui se débattait entre ses mains puissantes. Puis, l’une des larves vermiformes qui se déplaçaient sous sa peau sortit de ses griffes et s’enfonça dans la chair du monstre.

La Créature du Cauchemar se figea un instant, et émit alors un gémissement glaçant.

Un instant plus tard, son corps se contorsionna dans une terrible convulsion.

Sunny eut un sourire noir.

“…Mais pas la dernière. Non, pas du tout.”

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