Chapitre 1568 – Connaissance du Vide

Traducteur/Checker : Gray

Team : World Novel

Sunny n’avait fait qu’entrevoir les runes, mais c’était suffisant pour le plonger dans un état de terreur totale.

Avant même d’avoir le temps de réfléchir, il ferma les yeux et activa l’enchantement du Miroir de Vérité, empruntant la Capacité [Désir] de Neph.

Son âme devint ainsi incorruptible… temporairement.

Et c’était juste à temps, car le simple fait d’être près des runes menaçait de faire fleurir la Corruption dans son âme.

Argh…

Il gémit mentalement tout en se taisant.

La douleur était presque insupportable.

C’était une sorte de terreur, de dégoût et de douleur familière.

Car Sunny avait reconnu la forme de ces runes.

Il y avait deux types de runes que le Sortilège refusait de traduire.

L’une concernait le type d’êtres qu’il appelait simplement les -inconnus- — les êtres primordiaux du Vide éternel et en perpétuel changement. L’autre avait trait à l’être singulier qu’il appelait de la même manière l’ -inconnu- — le mystérieux géniteur des sept daemons, qui pouvait être l’une des Créatures du Vide, comme il aurait pu ne pas l’être.

Ces dernières runes étaient difficiles à regarder, elles faisaient mal à la tête et donnaient des vertiges à l’esprit.

En revanche, les premières runes étaient vraiment sinistres, provoquant chez le malheureux qui en était témoin un sentiment de terreur et de dégoût.

De telles runes étaient inscrites sur les parois du tunnel… en grand nombre. Les parois du tunnel, qui semblait s’étendre à l’infini dans toutes les directions, en étaient jonchées, avec à peine quelques espaces entre les symboles angoissants.

Sunny reprit son souffle.

C’est… c’est la source de la Souillure.

Maintenant qu’il y pensait, c’était logique.

Les terribles runes décrivaient les Êtres du Vide. Et il avait appris que la Corruption était l’influence du Vide, s’infiltrant à travers les murs de l’existence qui l’enfermaient. Par conséquent, la connaissance du Vide… était également la source de la Corruption.

Et c’est ce qu’Ariel, ce fou, avait inscrit sur les murs de l’Estuaire. Les histoires du Vide, les connaissances à son sujet… et les Vrais Noms des êtres terribles qui habitaient dans ses profondeurs en perpétuel changement, emprisonnés par les dieux.

Il en était sûr.

C’était ce qu’Aletheia avait trouvé, très probablement, et ce qui avait fait d’elle la source de la Souillure… qui n’était qu’un savoir qui pouvait être partagé et transféré, transformant ainsi cette forme de Corruption en une infection inarrêtable.

La connaissance du Vide, et des Vrais Noms de ces êtres dont les noms ne pouvaient être connus, et encore moins prononcés à voix haute.

C’est la raison pour laquelle le Sortilège refusait de traduire les runes, non pas parce qu’il voulait garder ses secrets pour lui, mais tout simplement parce que la lecture de ces runes entraînerait la mort de quiconque les lirait.

Et pas seulement en les lisant… le simple fait d’être en présence de ces runes était néfaste. Il était déjà douloureux et dangereux d’en apercevoir quelques-unes, comme Sunny l’avait fait plusieurs fois dans sa vie — par exemple, en lisant les descriptions de la goutte de sang du Dieu de l’Ombre et de la goutte de sang de Weaver.

Si le Sortilège avait traduit ces runes pour lui, ces descriptions auraient probablement donné quelque chose comme ça :

[Avant, il n’y avait qu’un vide illimité et éternel. De ce sombre abîme naquirent les Créatures du Vide. Tout comme le chaos lui-même, elles étaient sans fin et éternelles, vastes et changeantes…]

Ou bien :

[Le détestable Oiseau Voleur était haï à la fois par les dieux et par les créatures du chaos. Cependant, il ne s’intéressait qu’aux choses brillantes. Enamouré par les beaux yeux de Weaver, il en vola un par une nuit sombre et sans étoiles. Impatiente, la vile créature regarda son butin alors qu’elle était encore en vol. Cependant, lorsqu’elle vit le reflet du Vide figé à jamais dans les profondeurs de la pupille de Weaver, elle devint folle et hurla, laissant tomber l’œil sur le royaume des mortels. Tout ce qui resta dans son bec avide fut une goutte d’ichor pur et doré.]

Ces quelques runes, qui ne faisaient que nommer le Vide et le type d’êtres qui en étaient issus, l’avaient presque fait s’évanouir.

Mais ici, dans l’Estuaire…

Il y avait de nombreuses runes effroyables gravées dans la pierre, qui non seulement mentionnaient le Vide et les Êtres du Chaos, mais les décrivaient également en détail et les appelaient par leurs Vrais Noms.

Par conséquent… même si Sunny n’avait fait qu’entrevoir les runes, sans pouvoir les lire, il risquait à lui seul d’être Corrompu.

Rester près d’elles, dans ce tunnel sans fin, allait faire fleurir les graines de la Corruption dans son âme. Ainsi, s’il restait ici au moment où le Miroir de Vérité tomberait en poussière… il deviendrait un Souillé.

Il redeviendrait le Prince Fou.

Passant ses doigts sur la surface du miroir enchanté, il pouvait déjà sentir quelques fines fissures.

Un instant, Sunny envisagea de se retourner.

Mais une voix moqueuse sortit des ténèbres :

“Pourquoi n’ouvres-tu pas les yeux ?”

Entendre le Péché de Réconfort lui fit se souvenir de la raison pour laquelle il était venu dans l’Estuaire, et de ce qui était en jeu.

Sa liberté.

Serrant les dents, Sunny réprima la terreur et l’agonie qu’il ressentait à proximité des runes et fit un pas en avant.

Puis, il en fit un autre.

Et encore un autre.

Même si chacun d’entre eux était si difficile qu’il avait envie de tomber et de hurler de douleur, il resta silencieux et persista.

Trois pas se transformèrent en trois douzaines, puis en trois cents.

Sunny continua à marcher dans le tunnel sombre, les yeux fermés. Ses ombres étaient étroitement enroulées autour de son corps, incapable de voir quoi que ce soit. Sainte, Fiélon et Cauchemar étaient gardés en sécurité dans son âme, incapables d’être témoins des terribles secrets du Vide.

Endurant la peur nauséabonde et la douleur torturante, il continua à avancer.

En espérant…

Qu’il atteindrait le bout du tunnel avant que le Miroir de Vérité n’atteigne sa limite.