Chapitre 812 – Convoi Naval

Traducteur/Checker : Gray

Team : World Novel

Comme Sunny le savait déjà, l’eau était le meilleur moyen de transporter des marchandises — et des personnes — sur de grandes distances. La civilisation humaine avait toujours tiré parti de cette propriété.

Les premières voies de commerce et d’échange culturel, et donc de progrès, se situaient le long des grands fleuves, puis se déplacèrent vers les mers et les océans. C’est ainsi que de nombreux centres de civilisation importants virent le jour le long des côtes.

Cependant, l’humanité le regretta cruellement lorsque l’eau s’avança lentement et dévora toutes ces belles et importantes villes. Pire encore, une fois le Sortilège du Cauchemar apparu, les mers et les océans furent infestés par de terrifiantes Créatures du Cauchemar.

C’est pourquoi très peu de colonies se trouvaient à proximité de l’eau. Plus elles se trouvaient à l’intérieur des terres, mieux c’était. Les humains avaient néanmoins besoin de profiter des avantages que seul l’océan pouvait leur offrir. C’est pourquoi il y avait de nombreux ports fortifiés dans chaque Quadrant.

Sunny se trouvait devant l’un de ces ports.

Même après avoir connu l’effroi et la grandeur du Rivage Oublié et des Îles Enchaînées, il ne pouvait s’empêcher de ressentir un peu d’admiration. Le port lui-même ressemblait à une forteresse inattaquable, avec ses hauts murs émergeant de l’eau et ses diverses fortifications s’avançant loin dans les vagues mornes.

Des canons colossaux étaient pointés vers l’horizon, prêts à faire tomber l’enfer sur tout ce qui oserait s’approcher du port bondé. Diverses mesures défensives de type spelltech débordaient d’énergie. Il ne doutait pas que d’autres étaient cachés sous l’eau.

…Toutefois, les navires étaient bien plus impressionnants que le port lui-même.

Sunny se figea en les voyant.

Une quarantaine de léviathans métalliques étaient ancrés le long du littoral, chacun mesurant plus d’un kilomètre de long et aussi haut qu’un château. Leurs coques portaient un blindage si épais et si lourd qu’il semblait étrange que ces montagnes d’acier restent à flot. Certains semblaient brillants et neufs, mais la plupart portaient des cicatrices profondes, géantes et laides. De nombreuses plaques d’armure étaient tordues et corrodées, tandis que d’autres avaient été déformées par des coups titanesques inconnus.

Chaque navire possédait une pléthore d’armements, allant des canons d’artillerie lourde aux canons antiaériens à tir rapide et aux mortiers à nez retroussé. Des rangées de roquettes, de missiles et de torpilles étaient visibles dans les nids cachés. Les canons principaux semblaient particulièrement redoutables, la plupart d’entre eux ressemblant à des railguns surdimensionnés qui s’étendaient sur toute la longueur des navires.

Chacun de ces canons était capable de propulser un obus cinétique lourd à une vitesse si féroce qu’aucune structure humaine n’aurait pu survivre à l’impact. Peut-être même qu’aucun quartier n’y aurait survécu.

Les navires reposaient sur l’eau comme des géants endormis. En les regardant, Sunny ne pouvait s’empêcher de frissonner.

L’humanité avait l’habitude de considérer les Éveillés comme son arme la plus mortelle, il était donc facile d’oublier à quel point les personnes ordinaires pouvaient être puissants et destructeurs avec l’aide de la bonne technologie.

…Malheureusement, la technologie devint de moins en moins fiable contre les Créatures du Cauchemar de Rang supérieur.

Les abominations Déchues pouvaient plus ou moins résister aux bombardements les plus dévastateurs, tandis que les Corrompus étaient capables de survivre à des explosions nucléaires. La science ne pouvait pas expliquer les principes à l’œuvre dans ces cas, mais de nombreuses preuves empiriques avaient été recueillies, avec des résultats désastreux, au cours des premiers jours du Sortilège du Cauchemar.

Ainsi, malgré l’aspect impressionnant des quarante léviathans d’acier, Sunny savait que les navires ne suffisaient pas à braver l’océan. À moins d’être complétés par des chasseurs Éveillés et guidés par un navigateur Noctambule, même ces mastodontes flottants n’étaient pas capables de survivre au voyage vers un autre Quadrant.

Pourtant, Sunny ne pouvait s’empêcher d’admirer leur calme et leur splendeur.

Une chose est sûre… ce train n’est rien, en fin de compte.

Alors qu’il fixait la flotte, une voix familière l’interpella soudain :

“Hé, Sunny ! Bienvenue dans notre petit port.”

Il tourna lentement la tête.

Maître Jet n’avait pas beaucoup changé. Elle était toujours la même — confiante, belle, avec des cheveux noir corbeau et des yeux bleus froids et glacés. Son uniforme habituel avait disparu, remplacé par un trench-coat militaire d’un bleu profond.

Un sourire satisfait se lisait sur ses lèvres.

La foule s’écarta lorsqu’elle s’approcha et jeta un coup d’œil sur les navires ancrés.

“Impressionnant, n’est-ce pas ?”

Sunny s’attarda un instant, puis hocha la tête.

“Ouais… maintenant que je les vois, je commence à comprendre comment nous allons évacuer huit cent millions de personnes de l’Antarctique.”

La Faucheuse d’Âmes secoua la tête.

“N’en sois pas si sûr. Ce n’est qu’un des nombreux convois qui vont se rendre dans le Quadrant Sud. Ils vont livrer la Première Armée d’Évacuation à l’Antarctique, charger quelques millions de réfugiés, et repartir. Si tout se passe bien, la mobilisation aura déjà commencé au moment où les navires reviendront. Les flottes nous apporteront des renforts, embarqueront d’autres civils… et répéteront le processus autant de fois qu’il le faudra.”

Elle soupira.

“Bien sûr, il y a plus ou moins zéro chance que tout se passe bien. Même si c’est le cas, il nous faudra au moins un an pour rassembler tout le monde… si nous sommes encore en vie d’ici là. Qui sait, peut-être serons-nous tous submergés et dévorés par les abominations dès les premiers mois.”

Sunny lui jeta un coup d’œil latéral, l’air sombre.

“…Tu sais vraiment comment remonter le moral des troupes, tu sais ?”

Maître Jet sourit :

“Ah, ne sois pas si sérieux. Quoi qu’il en soit, je suis ravie que tu aies décidé de te joindre à nous, Sunny. J’ai vraiment besoin de quelqu’un en qui je peux avoir confiance à mes côtés. Ne te méprends pas, mes autres subordonnés sont tous des guerriers honorables et accomplis… mais ils ne sont pas comme toi.”

Il cligna des yeux plusieurs fois.

“Je ne savais pas que j’étais si spécial.”

Elle le regarda, puis haussa les épaules et commença à s’éloigner, incitant Sunny à la suivre.

“Il faut un certain type de personne pour affronter les profondeurs du désespoir et continuer à se battre. Tu es l’une de ces personnes, Sunny.”

La Faucheuse d’Âmes lui jeta un coup d’œil, puis ajouta d’une voix dépourvue de tout humour :

“…Et nous allons tous vivre beaucoup de désespoir dans les mois à venir. J’en ai le pressentiment.”