Chapitre 570 – La Soif

Traducteur/Checker : Gray

Team : World Novel

Sunny regarda le flot de sang qui se rapprochait de plus en plus de la cage, puis jeta un regard en arrière vers la porte et attendit, se demandant si quelqu’un… ou quelque chose… allait faire irruption à travers elle et entrer dans la cellule.

Mais rien n’y fit. Après la première détonation, tout resta étrangement silencieux. Les secondes passèrent, puis les minutes. Finalement, il se détourna lentement de la porte et regarda Cassie.

« Tu sens cette odeur ? »

Elle s’attarda un moment, puis hocha la tête.

« …Du sang. »

Sunny resta un peu immobile, puis retourna à sa place habituelle et s’assit. Son visage était sinistre. Après un moment, il dit d’un ton sombre :

« Nous allons devoir commencer à rationner l’eau. »

Les humains pouvaient survivre longtemps sans nourriture, mais l’eau… l’eau était bien plus précieuse. Sans elle, un humain en bonne santé pouvait mourir en quelques jours.

Et il y avait très peu de façons plus angoissantes de mourir.

Cassie tourna la tête, puis demanda sombrement :

« Pourquoi ? Tu crois qu’ils vont juste nous laisser ici ? »

Sunny ouvrit la bouche pour rétorquer que c’était elle qui pouvait voir l’avenir. Mais finalement, il se tut.

« …Juste au cas où. »

Il leur restait une gourde pleine. En tant qu’Éveillés, ils seraient également capables de tenir plus longtemps sans eau que les humains ordinaires — surtout Sunny, dont le corps était renforcé par ses trois noyaux, le Tissage du Sang et ses ombres.

Mais est-ce que ce serait suffisant ?

Il n’y avait aucun moyen de le savoir.

Il ferma les yeux et expira lentement, puis essaya de méditer.

Le temps s’écoulait lentement. Leur faim grandissait, mais personne ne venait leur apporter de la nourriture. Leur dernier lien avec le monde extérieur ayant disparu, il était impossible de savoir quel jour on était. Sunny et Cassie restaient isolés dans l’obscurité à peine éclairée, attendant que quelque chose se passe, ou dormant en grelottant de froid.

Il ne fallut pas longtemps avant que leur eau soit épuisée. La gourde n’était pas très grande, pour commencer.

…Puis, vint la soif.

Sunny pensait savoir ce qu’était la folie, mais après avoir passé plusieurs jours — du moins, il pensait que quelques jours s’étaient écoulés — sans rien boire, il apprit qu’il existait un domaine complètement différent de la folie délirante.

La sensation de soif était absolument exaspérante, torturante et suffocante. Sa gorge lui faisait mal comme si on la coupait, ses lèvres étaient sèches et craquelées, tout comme sa langue. Sa tête était pleine de douleurs pulsatives, et ses muscles éprouvaient des crampes atroces. Il ne pensait qu’à l’eau, l’eau, l’eau…

Mais le pire dans tout ça, c’était la peur. La peur de mourir dans cette maudite cage comme un chien, oublié et mis au rebut. Peut-être qu’un jour quelqu’un ouvrirait la lourde porte, et trouverait son corps desséché tendant désespérément et pathétiquement la main vers elle à travers les barreaux de fer…

Sunny avait essayé tout ce qu’il pouvait imaginer pour sortir de la cage, mais rien n’y faisait. Le seul résultat était que son état s’aggravait encore plus.

À ce moment-là, sa gorge et sa bouche étaient comme en feu, et son corps entier souffrait terriblement. Il se sentait faible et léthargique, et sa vision commençait à se brouiller. Sunny passait la plupart de son temps à fixer la flamme orange de la lampe à huile, car c’était plus ou moins la seule chose qu’il pouvait voir clairement.

Puis, elle disparut, elle aussi.

La cellule de pierre devint encore plus sombre, avec seulement la faible lueur fantomatique des runes illuminant les barres de la cage.

…Il n’y a plus d’huile.

Sunny ferma les yeux.

C’était vraiment sans espoir ?

Non, il ne pouvait pas abandonner… il refusait…

Dans toute cette souffrance et ce désespoir, la seule chose qui le gardait un peu sain d’esprit était le fait que Cassie était juste là avec lui, traversant le même enfer. Au moins… au moins il n’était pas seul.

Malgré toutes les émotions compliquées et le lourd fardeau des péchés passés, partager sa douleur avec quelqu’un l’avait rendu sinon supportable, du moins un peu plus facile. Aucun des deux n’aurait pu supporter seul l’agonie et la terreur de ne pas savoir s’ils allaient vivre ou mourir, la peur de l’inconnu. Mais ensemble, ils réussirent à persévérer, tant bien que mal. Sans doute pour ne pas laisser l’autre le voir s’effondrer le premier…

Sunny ne savait pas combien de jours s’étaient écoulés depuis que la flamme de la lanterne s’était éteinte. Le temps avait perdu son sens depuis un moment. Tout ce qu’il savait, c’était la soif, la douleur, et la volonté têtue et malveillante de tenir juste un peu plus longtemps.

…À un moment donné, il ouvrit les yeux dans l’obscurité et fixa la lueur bleue et floue des runes sorcières. Puis, il tourna la tête et regardé Cassie, qui dormait dans ses bras.

Il y avait un bruit… un bruit venant de derrière la porte.

Sunny voulait dire à Cassie de se réveiller, mais sa gorge était si sèche qu’aucun son n’en sortait. Tout ce qu’il fit, c’est lui apporter plus de douleur. Il serra les dents, puis la secoua doucement, attendit qu’elle ouvre les yeux, et posa délicatement un doigt sur ses lèvres.

Il voulait qu’elle se taise.

La jeune aveugle hésita quelques instants, puis hocha la tête.

Ils se lâchèrent et se levèrent en tremblant. À ce moment-là, le faible son devint plus clair… c’était comme si quelque chose de pointu grattait les pierres en étant traîné lentement dessus.

Scrrrrish… scrrrrish… scrrrrrish… scrrrriiiiish…

Le son obsédant et grinçant se rapprochait de plus en plus.

Finalement, il atteignit le seuil de la cellule et s’arrêta brusquement. Puis, ils entendirent un autre grincement, plus petit celui-là, et le clic de la serrure de la porte.

Celle-ci s’ouvrit, et Sunny vit une silhouette floue se tenir sur le seuil de la cellule. À moitié aveuglé par la soif, il pouvait dire qui, ou quoi, c’était.

…Mais l’odeur du sang était de retour.

Seulement maintenant, elle était beaucoup, beaucoup plus forte…