Shadow Slave - Chapitre 2270

Chapitre 2270 – De la Nourriture pour le Peuple

Traducteur/Checker : Gray

Team : World Novel

Loin de là, à Ravenheart, une femme aux magnifiques yeux émeraude se tenait sur une plate-forme de pierre, se cachant des chutes de cendres sous une élégante ombrelle. Le bas de son visage était protégé du vent par une écharpe duveteuse, et elle portait une robe délicatement brodée sous un manteau à la mode.

La femme regardait ses chaussures élégantes avec regret. Le cuir souple était déjà couvert de suie et les boucles en argent avaient perdu leur éclat.

Elle soupira.

« Ah, je déteste vraiment cet endroit. »

Autour d’elle, la cité bouillonnait de vie. Ravenheart s’était beaucoup développée l’année dernière, débordant sur les pentes du volcan comme une forêt de pierre. En fait, la longueur du pont ne suffisait plus à abriter tous les Éveillés, si bien que d’énormes plates-formes y étaient suspendues comme des terrasses, avec leurs propres rues, bâtiments, jardins et parcs.

Ces derniers étaient bien sûr recouverts de verre, afin de protéger les plantes fragiles du froid glacial.

Une autre plate-forme descendait en ce moment même le long du pont. Son poids inimaginable était soutenu par d’énormes câbles, eux-mêmes retenus par d’imposantes Créatures du Cauchemar.

Les hideuses abominations grinçaient des crocs et grognaient, leurs muscles imposants tendus sous leur peau — en bas, une nuée de bâtisseurs Éveillés s’apprêtaient à recevoir la plate-forme et à la fixer sur le support rigide.

Les Créatures du Cauchemar étaient partout à Ravenheart, effectuant toutes sortes de tâches — tout cela grâce à Maîtresse des Bêtes et à son étrange Aspect. C’était en grande partie pour cette raison que la cité avait pu changer et s’étendre si rapidement.

Seul le magnifique palais noir situé de l’autre côté du pont était resté inchangé. Enfin… le palais lui-même était le même, mais son maître était différent.

La femme regarda le palais lointain avec un sourire rêveur, puis se reprit et se retourna vers la cité en soupirant.

« Quel endroit lugubre. »

Comme la ressource la plus facilement disponible ici était la pierre sombre, la plupart des bâtiments étaient de la même couleur. En fait, Ravenheart avait l’habitude d’avoir très peu de couleurs — seulement de la pierre noire, de la neige et de la cendre.

Aujourd’hui, cependant, il y avait beaucoup d’îles vibrantes dans la mer austère de noir et de blanc. Ici et là, des couronnes d’arbres cramoisis s’élevaient au-dessus des bâtiments, et des fleurs pourpres s’épanouissaient le long des rues. Dans l’ensemble, la sensibilité esthétique de la cité s’était considérablement améliorée.

La femme regarda les étendues de cramoisi vibrant avec satisfaction.

Après tout, c’était elle qui était responsable de l’introduction de la couleur et de l’éclat à Ravenheart…

Même si ce n’était que pour passer le temps.

Très vite, elle vit une caravane gravir la pente du volcan et entrer dans la cité. Des Créatures du Cauchemar tiraient les lourdes charrettes remplies de marchandises précieuses, tandis que des gardes humains marchaient à leurs côtés d’un pas assuré.

« Enfin ! »

Peu après l’arrivée de la caravane, une grande fit irruption sur la plateforme et regarda les chaussures élégantes de la femme et son ombrelle raffinée d’un air dubitatif.

« Salut, Bliss. »

La femme regarda froidement l’étrangère.

« Bienvenue à Ravenheart, Sainte Helie. »

Après quoi, elle sourit avec éclat derrière son écharpe, fit un pas en avant et étreignit la femme plus grande qu’elle.

« Tu es enfin arrivée ! »

Helie sourit à son tour, puis se mit à rire.

« Tu vas m’arracher les yeux avec cette ombrelle… »

Bliss recula d’un pas et tint l’ombrelle plus haut pour les protéger toutes les deux de la cendre qui tombait.

« Allons, allons. Je viens d’acheter ce manteau ! Sais-tu à quel point il est difficile de laver la suie ? »

Les deux Saintes quittèrent la plateforme et s’enfoncèrent dans la cité à vive allure. Tout en marchant, Helie regarda autour d’elle, puis dit avec hésitation :

« Cet endroit ne semble pas te convenir, Bliss. »

L’autre femme soupira.

« Oh, je déteste cet endroit. Mais que puis-je faire ? Tout le monde n’a pas une Citadelle ancestrale où retourner, comme vous, les nobles Héritiers. Nous, les nouveaux Saints, sommes des gens de passage… cela dit, Chevalier de l’Été m’a offert un terrain de choix pendant la guerre. »

Elle sourit vivement.

« Mais j’ai refusé. Alors, quand Song Seishan m’a invitée à venir ici en personne, je n’avais aucune raison de dire non. Mais ne t’inquiète pas — j’aurai terminé dans quelques années et je reviendrai dans l’est. En fait… »

Ses yeux émeraude brillèrent.

« Tu l’as apporté, n’est-ce pas ? »

Helie regarda la Sainte pleine de vie avec une pointe de ressentiment et hocha la tête.

« Effectivement. Tu sais, je reviens tout juste du Quadrant Est. Mais au lieu de m’accueillir à bras ouverts à mon retour du champ de bataille, tu m’as envoyé faire une course mortelle à Godgrave. Tu n’as pas honte ? »

Bliss sourit.

« Ce que je n’ai pas, ce sont des sabots. Mais toi, tu en as. Tu peux donc aller à Godgrave et en revenir bien plus vite. »

Helie la regarda avec incrédulité.

« Wow. Juste… wow. Quelle insensibilité ! »

Assez rapidement, elles entrèrent dans un grand bâtiment à la périphérie de la cité. Il était gardé par des dizaines de guerriers Éveillés et une poignée de Maîtres, tous arborant des expressions tendues sur leurs visages. Helie leur jeta un bref coup d’œil, puis fronça les sourcils.

D’une certaine manière, les soldats n’avaient pas l’air de protéger le bâtiment des menaces potentielles venant de l’extérieur. Au contraire, on aurait dit qu’ils protégeaient la cité contre le bâtiment.

« Bliss… qu’est-ce que Seishan t’a demandé de faire ? »

L’autre femme plia son ombrelle, enleva son écharpe et sourit.

« Tu verras ! »

Une femme plus jeune apparut de nulle part, les regarda, puis demanda nerveusement :

« Sainte Bliss, c’est ici ? »

Bliss hocha la tête.

« En effet. Je pense que vous vous connaissez toutes les deux… Helie, voici l’Ascendante Shakti. Shakti, voici Sainte Helie. Elle a apporté les nouveaux échantillons. »

Helie étudia la jeune femme. Elle se souvenait vaguement de l’avoir vue parmi les Gardiens du Feu.

« Allons-y ! »

Quelques minutes plus tard, Helie se tenait devant un dôme de verre lourdement renforcé, regardant à l’intérieur avec une expression troublée.

À l’intérieur de ce dernier… une mer de mousse écarlate poussait sur le sol cendré. Ici et là, des os de Créatures du Cauchemar dépassaient du tapis de mousse, devenant de plus en plus petits à une vitesse alarmante.

Devant le dôme, plusieurs tables étaient garnies de différentes plantes tout à fait banales.

Bliss et Shakti s’apprêtaient à ouvrir le dôme pour permettre à Helie de déposer les plantes de la jungle écarlate qu’elle avait récupérées et stockées dans une Mémoire spatiale en vue de leur transport.

Elle hésita quelques instants, avant de demander :

« Peux-tu me le dire maintenant ? »

Bliss la regarda, puis désigna l’une des tables.

« Tu vois ça ? C’est… une pomme de terre ordinaire. »

Après quoi, elle se retourna et pointa du doigt le dôme de verre.

« Et ça, c’est de la mousse de la jungle de Godgrave. »

Helie acquiesça.

« Et pourquoi la mousse de Godgrave est-elle ici ? »

Bliss sourit.

« As-tu la moindre idée du miracle que représente cette jungle ? De la rapidité avec laquelle sa flore pousse et de sa résistance ? Bien sûr que oui. Nous avons toutes deux souffert de cette maudite jungle pendant la guerre, après tout. »

Elle ramassa ensuite une pomme de terre et la montra à Helie.

« D’un autre côté, il y a trois milliards de personnes qui ont besoin d’être nourries une fois qu’elles seront toutes réinstallées dans le Royaume des Rêves. Si nous pouvions transplanter quelques qualités de la mousse écarlate dans une pomme de terre ordinaire… imagine les possibilités ! »

Helie la fixa en silence pendant un moment.

« Bliss… ne me dis pas… que tu as l’intention de croiser les horreurs de la jungle écarlate avec les plantes du monde réel ? »

L’élégante Sainte cligna des yeux plusieurs fois.

« Bien sûr que non. Je n’ai pas l’intention de… »

Comme Helie soupirait de soulagement, elle ajouta :

« Je l’ai déjà fait. D’où penses-tu que viennent tous ces arbres et ces fleurs dans les rues de Ravenheart ? »

Ce disant, elle posa la pomme de terre comme un bijou précieux et se dirigea à nouveau vers le dôme.

« Viens ! »