Crest of Souls - Chapitre 41
Chapitre 41 – Emplois de Niveau Inférieur, Supérieur et Spécial
Traducteur : _Snow_
Team : World Novel
“M. Elmer, je le répète, s’agit-il d’un travail qui relève de vos compétences ou préférez-vous en faire un autre ?”
La résurgence de ces mots arracha Elmer à son esprit et ramena ses yeux, qui s’étaient posés, mais non focalisés, sur le papier de l’accord devant lui, à l’expression simple qui composait le visage de Mlle Edna.
Il n’avait aucune compétence, et elle le savait sans doute puisqu’elle avait dû lire le formulaire qu’il avait rempli pour l’obtention de la licence de chasseur de primes. Alors qu’attendait-elle comme réponse à cette question ?
‘Non ?’
Ou bien espérait-elle qu’il revienne sur sa décision d’accepter un travail dans son intégralité ?
Il n’en était pas question. Accepter un travail était un point crucial qu’il devait franchir en tant qu’Ascendeur à la recherche d’un moyen de récupérer l’âme de sa sœur.
Elmer y avait réfléchi pendant un moment lorsqu’il était en route pour ici. Il n’avait aucune idée de l’endroit où commencer la recherche de La Torche du Démoniste ou de ce à quoi elle ressemble, et il ne pouvait même pas se rappeler qui lui en avait parlé – essayer de le faire lui apportait toujours des maux de tête crissants. Poser une question sur un tel artefact à Mlle Edna ne lui apporterait pas grand-chose en faisant ressortir sa nature suspicieuse.
Il a donc imaginé un plan : accepter un travail de chasseur de primes et, une fois celui-ci terminé, interroger Mlle Edna sur La Torche du Démoniste en faisant comme s’il était tombé sur une information quelconque à ce sujet au cours de son travail.
Tomber sur la connaissance d’un artefact mystique au cours d’un travail destiné à ceux qui ont puisé dans le surnaturel devrait s’avérer être la couverture parfaite. Et puis, il avait besoin d’argent. L’expérience qui découlerait d’une telle aventure ne serait là que comme la cerise sur le gâteau, comme lui disait toujours Miss Sally.
De plus, Mlle Edna l’avait classé parmi les emplois de bas niveau. Si cette classification correspondait à ce que le cerveau d’Elmer avait interprété, alors il ne devrait pas être capable de s’occuper d’un travail de cette classe ?
Il avait pris une Voie par lui-même, chance ou pas, et comme ces choses étaient des créatures dont les seuls buts étaient d’attaquer les Ascendants dont les voies étaient en contraste avec la ville particulière qu’ils habitaient, alors ils n’étaient sûrement pas faibles.
En tout cas, celui avec lequel il s’était battu ne l’était pas. Il était rapide et si fort qu’il avait coupé un arbre en deux, et il avait…
Les pensées d’Elmer se sont figées pendant un moment.
Maintenant qu’il essayait de se raisonner, comment avait-il pu survivre face à une telle créature ?
Cette nuit-là, et même jusqu’à présent, il n’avait ressenti aucun changement dans son corps, dans sa vitesse ou sa force, alors l’Égaré aurait dû être capable de le tuer dès le départ, vu la vitesse à laquelle il s’était déplacé.
Mais d’une manière ou d’une autre, il avait réussi à éviter toutes ses attaques. Comment cela se fait-il ?
“M. Elmer !” Mlle Edna cria un appel, et les yeux d’Elmer s’écarquillèrent pendant une seconde avant de trouver le visage de l’employé. Mais cette fois-ci, il n’était pas aussi clair qu’auparavant. Ses lèvres étaient pincées doucement l’une contre l’autre, et un air légèrement inquiet composait son expression. “Je vous prie d’être bref,” dit-elle. “Mon temps ici est écoulé depuis longtemps. Donnez-moi votre réponse pour que je puisse partir.”
Elmer inspira brusquement et baissa rapidement la tête tout en utilisant un doigt pour maintenir ses lunettes en place par le pont. “Mes excuses, Mlle Edna. Je suis vraiment désolé.”
Il n’avait jamais été comme ça auparavant, en se mettant à penser excessivement aux choses. S’il voulait savoir quelque chose, il n’hésitait pas à le demander. S’il voulait faire quelque chose, il n’hésitait pas à le faire.
Mais il avait remarqué que depuis qu’il était arrivé dans cette ville, il devenait de plus en plus inhabituel.
Sa vie, ses décisions morales, toutes deux s’écartaient continuellement de ce qu’elles étaient auparavant, et il se demandait maintenant si c’était cette ville qui était à l’origine d’un changement aussi radical en lui.
“Ne vous inquiétez pas à ce sujet”, dit Mlle Edna à Elmer alors que son bras se rétractait, et elle tapota sur le papier d’accord qu’elle avait apporté en sa présence. “Prenez votre décision”.
Il n’y en avait pas à prendre. Sa réponse était évidente.
“Oui”, dit Elmer. “J’accepte le contrat.”
Mlle Edna ferma les yeux et expira avant de les rouvrir. “Très bien”, marmonna-t-elle. “Signez ici.” Elle désigna un espace vide en face d’un espace signé à la fin du document d’accord.
“Avant de faire ça”, dit Elmer en s’emparant du stylo que Mlle Edna lui avait tendu, “j’ai une question”.
Mlle Edna le fusille du regard. “Quelle est votre question, M. Elmer ?”
“Pour être honnête, j’en ai deux.” Il en avait plus de deux, s’il voulait être vraiment honnête. Mais il retenait déjà la femme ici depuis bien plus longtemps qu’il ne l’avait prévu. Deux questions devraient suffire pour l’instant.
Mlle Edna grogna tout en s’adossant à sa chaise et en croisant les bras sur sa poitrine. “Vous semblez vouloir me garder ici pour toujours.”
“Vous avez dit un jour que vous répondriez à toutes mes questions.”
“J’ai aussi dit que je ne pourrais le faire que lorsque je serais en service.”
“Vous êtes toujours en service maintenant”, argumente Elmer.
“C’est toi qui me retiens ici, si tu ne l’as pas remarqué.”
Elmer se pince les yeux un instant. Son corps n’a pas oublié sa fatigue. “Ce sont des questions brèves.”
Mlle Edna prit une profonde inspiration qu’elle laissa échapper, puis retira ses lunettes et les posa sur le bureau. “Demandez, M. Elmer. Je répondrai ce que je peux.”
C’est une femme fantastique, se dit Elmer pendant un instant. Alors qu’elle aurait pu l’ignorer et s’en aller, elle a choisi de rester et de supporter ses pitreries. Et elle n’avait même pas l’air d’être en colère, elle semblait juste un peu frustrée.
Mlle Edna Smyth était vraiment aussi courtoise qu’une femme peut l’être.
Le pouce droit d’Elmer caressa le stylo qu’il tenait, tandis que l’index de sa main gauche pointait le formulaire d’accord statique sur le bureau devant lui. “Vous avez dit que l’emploi proposé par Lev était un emploi de bas niveau. Qu’est-ce que cela signifie ?”
Le menton de Mlle Edna s’est légèrement abaissé et elle a couronné le tout en haussant un sourcil comme si elle disait : ” c’est votre question ? “.
Avec un soupir, elle dit d’un ton passif : “C’est exactement ce à quoi ça fait penser, M. Elmer”.
Mais il le savait. Un travail de bas niveau était ce qu’il était : un travail de bas niveau. Il n’y a pas deux façons de voir les choses. Alors peut-être aurait-il dû poser sa question à l’employée d’une manière différente qui l’aurait éclairée sur le type de réponse qu’il recherchait.
Il avait encore la possibilité de le faire.
“Pardonnez-moi, Mlle Edna. Permettez-moi de reformuler. Pourquoi cet emploi est-il classé comme un emploi de bas niveau ? Ce que je veux savoir, ce sont les raisons qui déterminent la classification d’un emploi.”
Les muscles des jambes d’Elmer se contractent, et il se traîna indistinctement sur le côté, sur ses pieds, pour relâcher la tension qui avait été exercée sur eux. Il n’y avait pas de place pour s’asseoir, ce n’était pas sa faute.
Mlle Edna se racla la gorge. “Vous êtes très curieux, n’est-ce pas, M. Elmer ?”
Il n’avait pas vraiment le choix. Tout ce qu’il y avait à apprendre, il devait l’apprendre. Tout ce qu’il y avait à chercher, il devait le chercher. Quelque part dans toutes ces connaissances, il espérait – et espérait encore – trouver quelque chose qui l’aiderait à ramener sa sœur à lui. Chaque connaissance jouait un rôle, la classification d’un travail n’était pas différente.
“Je le suis”. Il ne le nia pas.
Les lèvres de Mlle Edna se déplacèrent doucement sur le côté, comme si elle était heureuse qu’il le soit, mais sa bouche ne prit ce sourire qu’une seconde avant qu’elle ne lève trois doigts, les lui montrant.
“Les emplois de chasseurs de primes sont classés en trois catégories.” Elmer acquiesça, puis elle laissa tomber un doigt à la fois en disant : “Il y a les emplois de bas niveau, les emplois de haut niveau et les emplois de niveau spécial.” Tous les doigts qu’elle avait précédemment mis en valeur se sont recourbés en une jointure avant qu’elle n’abaisse sa main sur le bureau.
Les emplois de bas niveau, les emplois de haut niveau, les emplois spéciaux… ? Elmer se plongea brièvement dans ses pensées. Je me demande quel genre d’horreurs un travail doit comporter pour être considéré comme une catégorie spéciale…
“Tous les emplois qui ne requièrent que peu ou pas d’expérience sont classés dans la catégorie des emplois de bas niveau. Imaginez qu’il s’agit de quelque chose qu’un policier pourrait faire si ce n’était pas lié au surnaturel. Cela va de la chasse aux voleurs d’ingrédients d’essence aux rituels d’exorcisme pour les fantômes, les malédictions et même les spectres les plus faibles.”
Rituels d’exorcisme… C’est le dernier mot qui frappa le plus Elmer. Il savait qu’il devrait faire ce genre de choses en tant qu’Ascendeur, mais l’idée de devoir faire la même chose que ce qui avait été fait à sa sœur à d’autres – peu importe qu’il s’agisse de malédictions ou non – lui durcissait l’estomac.
Il détestait le mot “rituel”. Il ne voulait rien avoir à faire avec ça. Mais pour l’instant, ce qu’il voulait n’avait que peu d’importance.
S’il devait ramener l’âme de Mabel à ceux qui l’en avaient débarrassée, il devait être prêt à faire les mêmes choses qu’eux. Il devait agir comme eux, penser comme eux, devenir entièrement comme eux. C’était la seule façon de récupérer Mabel.
“Permettez-moi d’utiliser l’offre d’emploi de votre ami comme exemple”, poursuit Mlle Edna, tirant Elmer de ses pensées contrastées et le ramenant à elle. “Tout ce qu’il demande, c’est un exorcisme pur et simple de la malédiction qui l’accable. Et pour ce faire, il suffit de placer un talisman de purgation à l’endroit exact où le rituel de malédiction a eu lieu.”
Elmer fut quelque peu déconcerté. Cela semblait très facile. Mais si c’était le cas, comment se faisait-il que l’offre d’emploi était toujours disponible après trois jours ?
Les chasseurs de primes devraient certainement se tourner vers des emplois de bas niveau comme celui de Lev, car c’était un moyen très facile de gagner de l’argent. Du moins, c’est ce qu’il ferait continuellement s’il n’était là que pour l’argent.
“Il est à noter que tout ce que j’ai dit à propos de l’offre d’emploi de M. Lev est basé sur les informations que j’ai reçues de lui, c’est-à-dire très peu de choses. Je n’ai recueilli que très peu d’informations, mais suffisamment de détails sur les emplois proposés pour pouvoir les classer en conséquence. Si vous acceptez le poste, vous devrez confirmer les faits relatifs à la situation de votre ami et employeur auprès de lui pour savoir exactement à quoi vous aurez affaire. Mais la classification n’est jamais erronée, rassurez-vous”.
Mlle Edna fit une pause pour s’éclaircir la gorge, mais alors qu’elle s’apprêtait à poursuivre, Elmer s’interposa, déversant les pensées qui le tenaient captif.
“Alors comment se fait-il que le poste de Lev soit toujours vacant après trois jours ?” dit Elmer. “Si les emplois de bas niveau étaient si faciles à prendre, les chasseurs de primes ne les entreprendraient-ils pas rapidement, car c’est un moyen plus facile de gagner de l’argent ?”
“C’est vrai”, a répondu Mlle Edna. “C’est pourquoi seuls les Nouveaux-Nés peuvent accepter les emplois de bas niveau.”
Nouveau-Né… Ce mot constituait la deuxième question qu’Elmer espérait poser à Mlle Edna. Cela l’avait dérangé à plusieurs reprises depuis le moment où elle l’avait appelé ainsi lors de son premier jour ici.
Mais qu’est-ce qu’un Nouveau-Né ? Pourquoi l’avait-elle appelé Nouveau-Né ? Ces questions lui venaient parfois à l’esprit. Et puisqu’elle en parlait maintenant, il valait peut-être mieux qu’il profite de ce moment pour lui faire joindre sa réponse à celle de la classification des primes, comme ça il la retarderait moins.
“Nouveaux-Nés ?” demanda Elmer en fronçant les sourcils.
“Oui.” Mlle Edna acquiesça. “Nouveaux-Nés, comme vous.”
“Je me souviens que vous m’avez aussi appelé ainsi lors de mon premier jour ici. Je suis désolée, mais je ne sais pas ce que cela signifie.”
“Je sais”. Mlle Edna soupire. “Vous n’êtes pas devenue Ascendant en passant directement par l’Église ou son collège, alors il est impossible que vous sachiez ces choses. Tu devras tout apprendre par toi-même. Voyez cela comme une sorte de punition pour avoir fait les choses illégalement.”
Il était donc vraiment possible de devenir un Ascendeur par l’intermédiaire du collège de l’Église… Les lobes d’oreille d’Elmer palpitèrent. Pardonne-moi de douter de toi, Pip…
Mais tout de même…
C’est une chose bien basse de la part de l’Église, ne pas éduquer les Ascendants parce qu’ils ont agi illégalement, c’est comme les envoyer mourir… Cependant, je suis en quelque sorte heureux que ce soit ainsi, sinon, en ce moment, Mlle Edna aurait remarqué que j’ai agi illégalement lors de ma certification en raison de mon manque de connaissances… Elmer soupira.
Mlle Edna reprit, “L’Église savait que beaucoup de gens ignoraient la bonne façon de devenir Ascendants, c’est pourquoi la certification a été mise en place, pour que les ignorants comme vous puissent avoir une chance d’être reconnus par l’Église et ne pas être mis dans le même sac que les corrompus.”
“Les corrompus ?” marmonna Elmer instinctivement. Compte tenu des critères, il en faisait partie en vérité. Il n’était toujours pas passé par l’Église.
“Oui”, dit Mlle Edna. “Les emplois requis pour chasser ce genre de personnes sont généralement classés comme des emplois de haut niveau. ”
Elmer se pinça à nouveau les yeux entre les deux discours. Il était un peu trop étourdi.
Les mots de Mlle Edna reprirent leur envol dans ses oreilles sans tenir compte de la légère fatigue qui l’assaillait. “De la même manière que les emplois de chasseurs de primes sont classés en fonction des grades, les Ascendants sont également classés, mais plutôt en Échelons. Il y a l’échelon des Nouveaux-Nés, celui dont vous faites actuellement partie, puis il y a l’Échelon Inférieur, et l’Échelon Supérieur.”