Chapitre 1870 – Développement de Carrière

Traducteur/Checker : Gray

Team : World Novel

Finalement, ce fut au tour de Sunny d’entrer dans la bataille.

Le corps d’expédition avait déjà repoussé la jungle à plusieurs kilomètres des pentes de la Plaine de la Clavicule. Un camp temporaire avait été établi près du système d’ascenseurs massifs que l’armée avait utilisé pour descendre vers les basses terres, où les soldats du premier contingent militaire dormaient profondément malgré la chaleur suffocante, leurs corps fatigués étant couverts de sueur.

Des flocons de cendres tourbillonnaient dans l’air.

Sunny avait alors remplacé le Masque de Weaver par [Définitivement Pas Moi], façonnant la Mémoire inférieure pour qu’elle ressemble à la Mémoire Divine. Après quelques hésitations, il lui ordonna également de changer la couleur de ses cheveux en blanc.

C’était un peu nostalgique. La raison de cette soudaine mascarade était pourtant tout à fait pragmatique.

Après avoir observé Nephis et Gilead mener leurs groupes au combat, il s’était rendu compte qu’il était important non seulement de tuer les Créatures du Cauchemar, mais aussi d’être vu en train de les tuer par les soldats — la simple vue de leur commandant en train de se battre pouvait insuffler de la force aux guerriers, à condition que le commandant soit une présence menaçante sur le champ de bataille.

Nephis et Chevalier de l’Été étaient tous deux très visibles partout où ils allaient. Nephis avait son armure blanche, ses cheveux argentés et son rayonnement aveuglant. Le Seigneur Gilead était tout simplement fait de lumière lorsqu’il prenait sa forme Transcendante. Sunny, en revanche, était comme une masse de ténèbres lorsqu’il se battait. Compte tenu de sa grande mobilité, les soldats ne pouvaient guère savoir où il se trouvait.

C’est pourquoi il utilisa l’enchantement que [Définitivement Pas Moi] avait hérité de la Feuille d’Automne pour changer la couleur de ses cheveux. Avec un peu de chance, cela allait atténuer le problème.

Sunny avait également discuté de la bataille à venir avec les Saints assignés à son contingent militaire. Ils étaient huit, tous issus des clans vassaux de Valor. Il ne connaissait pratiquement personne, à l’exception de Saint Rivalen d’Aegis Rose — qui était sans doute le père du jeune Maître Tristan, que Sunny avait autrefois battu en duel.

Saint Rivalen, également connu sous le nom de Grande Muraille, possédait un Aspect qui excellait dans la défense et le contrôle du terrain. Ces deux qualités étaient utiles dans une bataille comme celle-ci, et Sunny avait donc de grands espoirs en lui.

Il s’attendait presque à ce que les fiers Saints Héritier soient réticents à obéir à un étranger sans antécédents comme lui, mais ils acceptèrent son autorité en silence. Les mots prononcés par Nephis semblaient avoir eu l’effet escompté — tous les Transcendants étaient des guerriers aguerris par d’innombrables luttes pour la vie ou la mort, et ceux qui avaient rencontré la mort respectaient la force par-dessus tout.

Ils étaient en outre des professionnels et connaissaient l’importance de la discipline pour une force militaire. Au combat, nul ne pouvait remettre en question les ordres ou son supérieur — pour survivre, il fallait faire confiance à ses commandants et espérer que ceux qui étaient à leur tête savaient ce qu’ils faisaient.

Heureusement, Sunny connaissait bien tout ce qui avait trait au massacre.

Le contingent militaire se mit en route bien avant l’heure convenue, marcha sur la surface brûlante de l’os et adopta une formation de combat derrière la ligne de front.

Sunny donnait ses dernières instructions à ses Saints :

« …Je vous le rappelle une dernière fois. N’oubliez pas — il s’agit d’un marathon, pas d’un sprint. Il y aura une autre bataille demain, et après-demain, et encore après-demain, jusqu’à ce que nous atteignions la Deuxième Côte ou que nous mourions tous misérablement. En fait, les combats deviendront bien plus féroces une fois que nous aurons gravi le Passage, car le grand Creux qui s’y trouve est bien plus grand et peuplé de choses bien plus effroyables. »

Il les fixa derrière son masque sombre.

« Ne jouez pas les héros. Préservez vos corps. Conservez votre essence. Surtout, protégez votre vie… vous pouvez penser que c’est une noble action, de vous sacrifier pour sauver un millier de soldats, mais sans votre force, dix mille mourront le lendemain. Un lâche vivant m’est plus utile qu’un cadavre courageux. »

Saint Rivalen lui jeta un regard mesuré, puis soupira et secoua la tête.

« Cela ne sert à rien, Seigneur Shadow. Nous sommes du Domaine de l’Épée, ce qui signifie que la plupart d’entre nous ont des frères et sœurs, des conjoints, des enfants et des amis parmi les soldats. Sacrifier quelques personnes pour en sauver un grand nombre est une chose raisonnable… mais s’il y a quelqu’un que l’on chérit parmi ces quelques personnes, toute raison s’envole. Ce n’est pas une question de courage ou de lâcheté, c’est juste une question d’intérêt égoïste. »

Sunny le dévisagea froidement.

« Gardez vos intérêts égoïstes pour vous, alors. En tant que Saint du Domaine de l’Épée, j’attends de vous que vous fassiez passer les besoins de l’armée avant les vôtres. Si vous manquez à votre devoir et mettez la mission en péril à cause d’un sentimentalisme mal placé, je me chargerai de vous tuer — ainsi que vos frères et sœurs, vos conjoints, vos enfants et vos amis — moi-même. »

Saint Rivalen semblait un peu indigné. Ce dernier grinça des dents en silence, et lui adressa un signe de tête raide.

« Aucun d’entre nous ne mettra en péril la mission, Seigneur Shadow. »

Sunny détourna le regard.

« Bien. Maintenant, préparez-vous… »

Il devait aussi suivre ses propres conseils. Pas celui de rester en vie et de garder la tête froide, mais celui de rationner son essence et de considérer la bataille comme un marathon.

Heureusement, Serpent était avec lui, et serait en mesure de reconstituer une grande partie de son essence au fur et à mesure de leur progression. Cependant, Sunny devait encore être prudent dans ce qu’il faisait et dans l’intensité de son combat.

Concrètement, cela signifiait qu’il n’invoquerait pas la Carapace de l’Ombre à moins d’en avoir absolument besoin, et qu’il ne pourrait pas trop compter sur la Manifestation de l’Ombre. Ce qui n’était pas grave… cette dernière était surtout utile pour faire face à un grand nombre d’ennemis plus faibles, et il avait tout un contingent militaire pour le faire.

Sunny prit une grande inspiration et regarda la bataille furieuse qui se déroulait devant lui.

« Allez-y ! »

Les Saints se précipitèrent aussitôt vers l’avant.

La retraite était toujours la manœuvre la plus délicate à réaliser sans que cela ne tourne au massacre, mais l’Armée de l’Épée était suffisamment bien entraînée pour l’exécuter sans faille. Au moment où Sunny et ses Saints entrèrent dans la mêlée, un cor de guerre retentit dans la jungle, et les soldats épuisés du second contingent militaire se désengagèrent lentement, reculant et passant à travers les rangs du troisième groupe comme de l’eau à travers un tamis.

Mais Sunny ne vit rien de tout cela.

Prenant une vitesse phénoménale, il envoya une impulsion d’essence dans ses muscles et se décolla du sol, s’élançant dans un bond stupéfiant.

Il survola la formation de combat du second contingent militaire, la ligne d’Échos qui se déplaçait devant elle, et une large étendue de la jungle écarlate au-delà, atterrissant dans un boom tonitruant sur le tapis rampant de mousse rouge.

Immédiatement, il y eut du mouvement tout autour de lui, la jungle s’animant pour dévorer et digérer l’envahisseur.

Sunny plongea la main dans les ombres et en sortit un odachi noir qu’il leva en position haute.

Soudain, il se rendit compte que l’humble « contingent militaire » était en fait plus important que toute la Première Armée d’Évacuation, du moins en ce qui concernait le nombre de guerriers Éveillés… et bien plus puissant.

Et c’est lui qui dirigeait le tout.

…Si ce n’est pas un développement de carrière, alors je ne sais pas ce que c’est.

Sunny étendit son sens de l’ombre au loin, puis fit un pas en avant.

Faisons du bon travail.