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Chapitre 1512 – Chaos et Pagaille

 

Traducteur/Checker : Gray

Team : World Novel

 

Dans un endroit très éloigné, Mordret se trouvait dans une situation similaire. Bien sûr, il ne possédait pas la force physique, la vitesse et la résistance de l’Étoile Changeante du Clan de la Flamme Immortelle… mais il possédait son propre arsenal de ruses.

Je me demande…

Il s’était échappé dans une partie de la cité où le sol avait été brisé par un coup titanesque. Des eaux peu profondes recouvraient les pavés fissurés, et des bâtiments en ruine en émergeaient comme des îles. Le ciel crépusculaire se reflétait dans l’eau, la transformant en un magnifique tableau aux couleurs douces.

Mordret se servait de ces reflets pour devancer ses poursuivants.

D’innombrables silhouettes humaines l’entouraient, leurs armes avides de son sang.

Si j’essaie de posséder l’un d’entre eux, que se passera-t-il ?

D’habitude, il devait parier sa vie contre l’âme de sa victime, armé uniquement de son pouvoir réfléchi. Mais ces guerriers n’avaient pas d’âme, elles avaient été détruites depuis longtemps par le Voleur d’Âmes… cet imposteur. Mordret devrait-il donc se battre contre l’âme du Saint Souillé ? Ou le reflet de l’âme de la victime morte ? Quel pouvoir pourrait-il refléter ?

Il était à la fois curieux et réticent à l’idée de le découvrir.

Pas tout de suite, en tout cas.

Esquivant un coup d’épée, Mordret transperça la gorge de l’attaquant, esquiva un autre coup et recula d’un bond. Un subtil froncement de sourcils apparut sur son visage.

C’est peu pratique…

Le pire dans le fait de massacrer ces réceptacles creux, c’est qu’ils n’étaient que cela — des réceptacles. Il n’y avait pas d’âme à l’intérieur des corps des guerriers capturés, et il ne devenait donc pas plus fort en les tuant. Sinon, Mordret aurait pu lentement restaurer son Noyau de Monstre… et peut-être même son Noyau de Démon, s’il était diligent et chanceux.

Avec cela, il aurait pu créer un ou deux nouveaux Reflets. Sans eux, les choses s’avéraient difficiles.

Il aurait préféré massacrer de vraies personnes à la place.

Qu’est-ce que Sunless aime dire ?

Il abattit sans émotion une jeune femme portant un vêtement archaïque et soupira.

Damnation ?

L’anneau d’ennemis qui l’entourait se resserrait. Il ne pouvait pas faire grand-chose contre eux d’une seule main… Mordret ne pouvait que fuir. S’avançant dans le ciel reflété, il apparut à quelques centaines de mètres de là, au milieu d’un furieux affrontement entre les réceptacles du Voleur d’Âmes et une nuée de Créatures du Cauchemar qui étaient encore fidèles au Seigneur de l’Effroi.

Alors, l’imposteur a aussi une limite…

Pourquoi le Voleur d’Âmes n’avait-il pas pris possession de ces abominations ?

Mordret souriait en achevant une monstruosité pesante. Enfin, il sentit son âme se renforcer.

Était-ce parce qu’il était plus difficile de détruire les âmes de ceux qui avaient déjà été emportés par la Souillure ? Non, ce n’était pas le cas… Mordret avait déjà tué de nombreuses Créatures du Cauchemar de cette façon. C’était donc parce qu’il était plus facile de détruire les âmes de ceux qui n’avaient pas été Souillés.

Mais pourquoi ?

Il s’attarda soudain.

Ne me dis pas…

Est-ce parce que ceux qui suivaient la Voie de l’Ascension pouvaient être infectés par la Souillure pendant le combat d’âmes, ce qui les condamnait à perdre ?

Soudain, il perdit toute curiosité à l’idée d’affronter le Voleur d’Âmes. Devenir un Souillé ? Mordret ne voulait rien de tout cela. Parce que cela allait à l’encontre de ses objectifs, bien sûr, mais surtout parce que l’imposteur… était plutôt pathétique.

Certes, le Voleur d’Âmes était puissant. Certes, il avait atteint un niveau de puissance que Mordret avait du mal à comprendre. Mais il était aussi un peu dépourvu de cervelle.

Aucun des guerriers que Mordret avait tués ne montrait un dixième de son habileté à l’épée. Il avait perdu sa ruse, sa prévoyance, sa détermination… et ces qualités étaient bien plus précieuses que le contrôle d’un million de marionnettes de chair maladroites.

La Corruption — ou peut-être la division de son âme entre d’innombrables êtres, humains comme abominations — avait pourri l’esprit du Voleur d’Âmes, le transformant en fou. Et même pas un fou brillant, en plus, juste un monstre ennuyeux.

Mordret aurait aimé continuer à réfléchir à l’indéniable infériorité de son monstrueux jumeau, mais à cet instant, son épée ne parvint pas à pénétrer la carapace d’une autre Créature du Cauchemar. Il en avait déjà tué quelques-unes, utilisant le reste pour retarder les réceptacles du Voleur d’Âme, mais celle-ci s’était avérée plus puissante qu’il ne le pensait.

Ah…

Alors qu’une griffe acérée lui déchira la poitrine, Mordret grimaça et plongea sa main dans l’eau. Il en sortit un corps humain, celui d’un guerrier Éveillé portant les couleurs du Clan Valor.

L’instant d’après, les yeux de Mordret se vidèrent, tandis que ceux du guerrier s’illuminèrent d’une sinistre intelligence. Un instant plus tard, le corps de Mordret plongea dans l’eau peu profonde, disparaissant ainsi de la vue de tous.

Revêtant le corps familier de l’Écuyer Warren et brandissant son Aspect, il plongea sous le corps de l’abomination et lui ouvrit le ventre sans défense.

Encore un peu… encore quelques dizaines… et je redeviendrai un Monstre.

Mordret s’élança, s’échappant avant que la Créature du Cauchemar agonisante ne l’écrase de son poids. Ce n’était pas grave si le corps de Warren était détruit — il en avait beaucoup d’autres à sa disposition, dont certains qu’il avait cachés à l’Étoile Changeante et à sa cohorte. Il pouvait aussi s’emparer des corps de ces abominations…

Mais à quoi bon ?

Tandis que Mordret continuait à tuer froidement les Souillés, son expression s’assombrit.

Et s’il les tuait ? Et s’il récupérait quelques noyaux d’âme ?

La situation était toujours… inéluctable. Pour une fois, il ne voyait aucun moyen de survivre, et encore moins de gagner. Même son échappatoire habituelle était coupée, puisque le Voleur d’Âmes était parfaitement habilité à hanter les reflets, lui aussi.

Nous allons tous mourir ici, dans cette cité paumée ?

N’était-ce pas un peu trop ironique ? Poétique, même. Mourir de sa propre main…

Il y avait pourtant une chose qui permettait à Mordret de garder le moral. C’était cette fille, Cassia… Chant des Déchus.

Elle avait peut-être dupé les autres, mais il savait que la sorcière aveugle n’était pas aussi simpliste qu’elle en avait l’air. Quelqu’un comme elle devait avoir quelque chose de prévu, sans aucun doute… elle n’aurait pas mené ses compagnons ici autrement.

Mais le Voleur d’Âmes avait subi le même rituel que Mordret. Ni l’un ni l’autre n’étaient faciles à percevoir par la divination… sinon, comment ce monstre aurait-il pu échapper au regard de la Tourmenteuse et se rebeller contre le Seigneur de l’Effroi ?

Ah… Je ne sais pas.

Mordret poussa un vieil homme en armure de cuir usée par le temps dans la gueule d’une hideuse Créature du Cauchemar, puis transperça l’œil de la créature pendant qu’elle était occupée à dévorer le pauvre fou.

Son expression était sombre.

À ce stade, nous aurons besoin d’un miracle pour nous en sortir.

Mais depuis quand le monde était-il généreux en miracles ? Si quelque chose de vraiment étonnant se produisait… c’était toujours une malédiction, à la place.

***

Un peu plus loin, Cassie s’était enfuie vers les murs de Crépuscule. Ici, il y avait plus de Créatures du Cauchemar qui se battaient contre les réceptacles du Voleur d’Âmes, et donc, plus de pagaille et de chaos.

Dans ce chaos, Cassie luttait toujours pour se maintenir en vie. Du sang coulait d’une profonde blessure au cou. Pressant sa main contre elle, elle se déplaçait dans le terrible enchevêtrement de corps humains et monstrueux, évitant tant bien que mal les épées, les griffes et les crocs.

Parfois, elle n’était qu’à une fraction de seconde de la mort, mais à chaque fois, cette fraction de seconde suffisait à la sauver.

Son visage était pâle et sombre.

Un médaillon en fer reposait sur sa poitrine, maculé de sang.

Combien de temps me reste-t-il ?

Elle ne le savait pas exactement.

Au loin, le palais du Roi-Serpent tremblait, se défaisant.

Là, dans les ruines de la salle du trône…

Sunny enroulait son gigantesque corps serpentin autour du Seigneur de l’Effroi, tentant de lui broyer les os. Ses crocs griffaient les écailles de minuit impénétrables, y laissant de profonds sillons.

Meurs ! Meurs, vermine !

Perdant toute raison, il ne pensait plus qu’à déchiqueter l’odieux dragon.

…Cependant, tuer un Saint Souillé n’était pas chose aisée.

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