Chapitre 1279 – Vagues Furieuses

Traducteur/Checker : Gray

Team : World Novel

Sunny mordit la colonne vertébrale du Serpent Azur, consumant le peu de force qu’il lui restait en un violent et furieux brasier. Des ombres et des flammes s’élevèrent de ses écailles d’onyx et l’enveloppèrent comme un linceul funéraire. Ses yeux brillaient d’une malice folle, morbide et meurtrière et d’une intention de tuer glaçante.

Sa mâchoire s’enfonça avec une force suffisante pour briser des montagnes.

…Mais la colonne vertébrale d’une Bête Supérieure était bien plus solide qu’une chaîne de montagnes. Elle résista à ses crocs d’obsidienne, refusant d’être brisée, fissurée ou même égratignée.

Meurs ! Meurs !

Noyé dans la fureur, Sunny mit toute sa détermination, toute sa haine et tout son désir à écraser l’os indestructible. Il secoua violemment sa tête de gauche à droite, rongeant la colonne vertébrale comme un chien enragé. S’il ne parvenait pas à la mordre, il la scierait. S’il ne pouvait pas le faire, il la broierait…

Le Serpent Azur allait mourir, quoi qu’il arrive. Il était déjà à moitié mort, de toute façon…

Mais Sunny l’était aussi.

Il sentit le corps gargantuesque de l’ancien léviathan bougé, et refusa froidement de lui prêter attention. La façon dont la bête folle tenterait de le détruire, ou si elle y parviendrait, n’avait pas d’importance. Sunny avait déjà abandonné son instinct de survie. La bête enragée ne pouvait pas l’atteindre avec sa gueule déchirante, ce qui signifiait qu’elle n’allait pas pouvoir le tuer instantanément.

C’était tout ce qu’il avait besoin de savoir.

Alors que ses crocs grattaient frénétiquement l’épine dorsale du Serpent Azur, le corps mutilé de l’abomination se souleva et emprisonna Sunny comme un étau écrasant. Une fois qu’il aurait été pris au piège, il n’y aurait plus d’échappatoire… il le savait, mais il s’en fichait.

Tout ce qui l’intéressait, c’était la sensation d’une fissure fine et peu profonde apparaissant enfin sous l’un de ses crocs. La colonne vertébrale du léviathan… cédait.

Meurs !

Alors qu’une joie sombre envahissait son cœur, les serpentins se tendirent, écrasant sa carapace ravagée. La force qu’elles renfermaient ne ressemblait à rien de ce que Sunny avait connu auparavant. C’était vraiment, et complètement, angoissant.

Pressant le sol avec une force inouïe, le Serpent Azur réduisit la coquille de marbre du Manteau en poussière. Le corps serpentin qui se trouvait en dessous fut instantanément brisé, les écailles d’onyx éclatant, les arêtes tranchantes des os brisés perçant sa peau et dépassant de ses horribles blessures.

La douleur était foudroyante… mais Sunny s’en moquait.

D’autres fissures apparaissaient sur la colonne vertébrale de l’abomination, se propageant et fusionnant les unes avec les autres, et il pouvait sentir le corps géant de son ennemi tressaillir de douleur. Il pouvait également sentir des fragments d’os s’enfoncer sous ses crocs.

Au lieu de lutter pour se sauver, Sunny mordit férocement la colonne vertébrale endommagée du léviathan et continua à tenter frénétiquement de la briser et de la mutiler.

Voyons lequel de nous deux meurt en premier, vieux serpent… tant que… tant que tu meurs en premier… ça ne me dérange pas de mourir en deuxième…

La nageoire dorsale de la Bête Supérieure s’enfonça sans effort dans sa carapace, l’ouvrant comme une scie. Au lieu de sang, des ténèbres s’écoulèrent du serpent vivifié, avant de se dissoudre et de disparaître dans le doux éclat de l’eau rougeoyante.

Sunny pressa ses mâchoires l’une contre l’autre dans une fureur dévorante… et sentit enfin l’os s’effriter sous sa morsure.

Mon incarnation sera-t-elle détruite ? Ou pas ?

Cela n’avait pas beaucoup d’importance…

Tuer l’ennemi était la seule chose qui comptait. Il n’y avait rien d’autre !

Un son étrange, moitié rugissement dérangé, moitié gémissement d’agonie, s’échappa de sa gueule. Ses mâchoires commencèrent à se rapprocher lentement l’une de l’autre.

Au même moment, les dégâts subis par son corps approchaient du niveau catastrophique. Sa carapace aurait déjà dû se défaire, mais Sunny s’était immergé si profondément dans la sensation d’être un serpent que sa croyance absolue lui permettait encore de tenir bon.

Il sentit les ombres se séparer devant la lame tranchante de la nageoire du léviathan, ouvrant une voie directe vers la minuscule incarnation qui s’y cachait. La mort approchait à grands pas…

Mais, au même moment, il sentit la colonne vertébrale du Serpent Azur se briser tandis que ses crocs s’enfonçaient dans la douce moelle.

La bête folle se convulsa et poussa un rugissement d’agonie aveugle. Cependant, tout comme Sunny, elle ne savait pas se rendre. Elle n’avait que le meurtre en tête, et l’étau de ses serpentins ne fit que se renforcer, écrasant et tranchant le ver haineux avec une colère inextinguible.

Ce n’était plus qu’une question de temps avant que la forme d’ombre sans défense de Sunny ne soit détruite.

Meurs !

Il ne savait pas s’il avait invoqué la mort de son ennemi ou accueilli la sienne.

Pendant une fraction de seconde, la flamme de l’ombre qui sortait de son corps mutilé s’enflamma avec une intensité surprenante. Dans l’esprit de Sunny, tout disparut. La seule chose qui restait était la volonté impérative de tuer l’ennemi.

Sa mâchoire se referma dans un claquement assourdissant.

…L’instant d’après, il n’y eut plus que de la douleur.

Sunny perdit la vue, l’ouïe, l’odorat, le toucher… même le sens de l’ombre disparut, le laissant dans un abîme vide où la seule chose qui existait était l’agonie.

Toutes ses pensées furent incinérées, et toute sa conscience fut bannie par le tourment.

Ah… ah…

Il ne pouvait même pas crier, car il avait oublié comment faire.

Mais, malgré tout…

Il était satisfait. Il était ravi.

Il était heureux.

J… J… Je… l’ai tué. Pas vrai ?

Il n’y avait aucun moyen de le savoir.

Et puis…

Comme pour répondre à son faible appel, une voix familière susurra :

[Vous avez tué une Bête Supérieure, Daeron de la Mer du Crépuscule.]

[Vous avez reçu une Mémoire.]

Les murmures s’infiltrèrent dans son âme tandis que les ténèbres envahissaient son esprit.

[… Votre ombre devient plus forte.]

***

Alors que l’île sombre se balançait sous l’assaut de vagues furieuses, deux silhouettes brisées pouvaient être aperçues dans l’eau déchaînée, dérivant lentement l’une vers l’autre.

L’une d’entre elles, beaucoup plus grande, portait une blessure atroce au cou. Sa colonne vertébrale était entièrement brisée et il était partiellement décapité. Un feu de folie indescriptible s’échappait lentement de l’œil endommagé du léviathan, qui restait fixé sur la silhouette immobile de l’ennemi, même dans la mort.

Le corps du Serpent Azur disparaissait lentement dans le magnifique éclat des eaux rougeoyantes alors qu’il tombait dans les profondeurs.

L’autre silhouette, plus petite, était lacérée et ravagée au point d’être méconnaissable. Le corps serpentin de la bête d’onyx était coupé et brisé, avec des blessures déchirantes sur toute sa longueur. Elle semblait sur le point de se dissoudre en un essaim d’ombres intangibles…

Mais avant cela, une silhouette gracieuse vêtue d’une tunique blanche flottante plongea du haut de la pente de l’île et s’engouffra dans les flots déchaînés.

Luttant contre le courant furieux, Nephis supporta la douleur de son Défaut et nagea vers le serpent d’onyx.