3660-chapitre-5
Chapitre 5 : Lâche Aselle (3)
Traductrice : Moonkissed
Auteur : Seogwando
***
L’académie ? De quoi parles-tu ?
Aselle avait presque répondu d’une telle manière.
« Hum… Ronan, je suis vraiment déconcerté par tout ça. Qu’est-ce qui se passe en ce moment ?
– Je suis en train d’écrire la première page de la « Biographie de Ronan », le plus grand livre d’histoire de l’Empire.
– Qu’est-ce que c’est…
– Le mois prochain, nous allons à Barun.
– Barun ? Tu parles du Jido Barun ?
– Oui. Tu sais que l’académie Royal de Philleon s’y trouve, n’est-ce pas ? C’est peut-être un peu tôt vu la date de l’examen d’entrée, mais c’est mieux d’y aller à cette époque pour la période d’adaptation. »
La voix de Ronan était sérieuse. Aselle comprit qu’il ne plaisantait pas et se figea sur place. Bien qu’il soit un enfant de la campagne, Aselle connaissait le statut de l’académie Philleon.
Philleon ? Cette académie de Philleon ?
La ville des Cent Tours, où se réunissent les plus grands talents du continent. Tu veux dire que des gens comme nous, des roturiers, pourraient y entrer ?
Cependant, Ronan était déjà en train d’élaborer des plans en coulisses.
« Ne t’inquiète pas pour ça. J’ai déjà parlé à tes parents.
– T-Tu as rencontré mes parents ? Quand ?! »
Aselle se leva d’un bond de son siège. Ronan s’allongea et fit un geste de la main pour le retenir.
« Assieds-toi. Nous sommes en train de couler.
– Un instant… hoo… attends… »
Aselle respira profondément et se rassit. Ronan poursuivit.
« Hier après-midi. Ils t’aiment bien, tu sais ? Qu’est-ce qui pourrait être une meilleure source de fierté que de voir leur seul enfant entrer à Philleon ?
– Attends, attends ! D’accord ! Ronan, en supposant que tout ce que tu dis est vrai et sincère !
– C’est vrai.
– Oui ! Tu es incroyablement doué en arts martiaux, alors peut-être que tu pourrais être accepté. Mais pourquoi moi ? Mes capacités sont au mieux médiocres. Tu le sais aussi !
– Aselle, est-ce que tu aimes ta vie actuelle ? »
Soudain, Ronan, qui était allongé, se redressa pour faire face à Aselle. Ses sourcils et ses pupilles intensément concentrées étaient aussi aiguisés que ceux d’un faucon.
Aselle baissa profondément la tête. Il ne pouvait même pas répondre par des mots creux. Les jours où il avait été malmené tout en se faisant passer pour un dur lui revinrent à l’esprit.
« …Non.
– Tu ne veux pas changer de vie ? Tout le monde ne naît pas avec le potentiel d’un mage.
– Mais je ne suis pas aussi… fort que toi. Je suis lâche et… timide.
– C’est vrai, tu es un perdant. Tu avais tellement peur des brimades que tu as tourmenté un enfant, un minable. Pourquoi crois-tu que tu étais le seul à ne pas être frappé à l’époque ? Tu étais vraiment pitoyable. Tu ne valais même pas la peine d’être frappé.
– C’est, c’est…
– Mais ce genre de choses sont des choses insignifiantes. Ce sont des aspects qui peuvent être réglés facilement. »
Comme déclenché par un souvenir, Ronan alluma une cigarette.
Le garçon en face de lui lui ressemblait. La version naïve et stupide de lui-même qui gaspillait son brillant talent en utilisant la paresse comme excuse. Même si le cas d’Aselle ne relevait pas de la paresse mais plutôt de la faiblesse, le schéma était similaire.
« Abuser de ses talents avec diverses excuses conduira sans aucun doute à des regrets plus tard. Je te le garantis. »
Ronan n’avait pas emmené Aselle uniquement parce qu’il avait besoin d’un mage télékinésiste. Il ne voulait pas qu’Aselle connaisse le même genre de regret que lui. La fumée qui s’était dégagée se dissipa dans le vent violent.
« Bon, si tu ne veux vraiment pas, tu n’as qu’à le dire. Je te déposerai dans un endroit approprié.
– …Non. »
Aselle leva la tête. Ses yeux ambrés captèrent la lumière de la lune et scintillèrent. Voyant l’expression déterminée, Ronan gloussa doucement.
« Je veux y aller aussi. À Philleon.
– Tu as pris une bonne décision.
– Oui, dis-moi ce que je dois faire.
– Ce que tu dois faire… eh bien… »
Aselle le regarda avec une expression qui semblait dire « dis-moi n’importe quoi ». Ronan se gratta le menton et se rappela le plan qu’il avait formulé. Puis, il dit nonchalamment :
« Voler ? »
——
Ce n’est qu’à l’aube que le radeau atteignit sa destination. La zone était remplie de divers rochers, offrant une bonne couverture. Après avoir attaché le radeau derrière un gros rocher, les deux garçons débarquèrent.
« Maintenant, ne parle pas trop fort. Suis-moi.
– D’accord. »
Ils quittèrent le bord de la rivière et entrèrent dans la forêt. Le vent qui soufflait à travers les arbres donnait une impression de fraîcheur. Il ne leur fallut pas longtemps pour apercevoir une lointaine lueur rougeâtre.
« C’est… ce que tu as mentionné, n’est-ce pas ?
– Oui. As-tu bien préparé le sac à dos ? »
Aselle acquiesça. Ils s’approchèrent prudemment de la source de lumière et, à mesure qu’ils se rapprochaient, ils réalisèrent qu’il s’agissait d’un gigantesque feu de camp.
En peu de temps, ils furent confrontés à une scène irréelle, et Aselle se mordit la lèvre pour étouffer un cri.
-Keough ! Pukkakk !
-Pyuu… !
Des dizaines de gobelins aux oreilles et au nez pointus s’étalaient autour du bûcher. Ils n’étaient ni morts ni blessés, mais semblaient plongés dans un profond sommeil. Ronan prit une expression de dégoût.
« Ugh, mes décharges matinales sont plus attrayantes que ça.
– Qu’est-ce… que c’est ? »
À première vue, ils ressemblaient à un monstre appelé ‘gobelin’. Cependant, ils étaient différents des gobelins typiques.
Ils étaient nettement plus grands et avaient une apparence beaucoup plus robuste. Contrairement à leurs congénères qui ne couvraient que les parties essentielles, ils étaient bien équipés en armures.
La différence décisive était la couleur de leur peau. Ce n’était pas le vert habituel des gobelins, mais une riche teinte dorée.
« Ce sont des gobelins lunaires. Ce sont des monstres qui rassemblent des richesses. »
Ronan expliqua. Le gobelin lunaire était une sous-espèce rare de gobelin qu’il avait rencontrée au cours de ses voyages. Ils avaient l’habitude de collectionner les objets brillants comme les corbeaux et organisaient des festivités à chaque pleine lune.
« Comment les as-tu découverts ?
– De plusieurs façons. »
Ronan se souvint d’une conversation qu’il avait eue avec un colporteur il y a trois jours.
‘Bon sang. Ils ont encore été attaqués. Que font mes hommes ?
– Encore ? Est-ce que quelque chose comme ça s’est déjà produit ?
– Oui. C’est déjà la troisième fois.
– C’est l’œuvre de bandits ?
– Comme si un petit voyou comme toi pouvait comprendre ce qui se passe ?
– Monsieur, répondez quand on vous le demande. Si je n’étais pas pressé, j’aurais brûlé vos marchandises. Vous avez demandé 10 pièces pour ce genre de cigarettes ?
– Ahem… ! Ahem ! Quel homme colérique…’
Le colporteur raconta tout ce qu’il savait. Les raids n’avaient lieu que la nuit, et il n’y avait aucun survivant. À l’exception des métaux précieux et des armes, ils n’avaient touché à aucun autre objet, même aux épices de valeur.
‘Et ce sont des informations vraiment précieuses… Voyons voir. Les empreintes de pas trouvées dans les environs n’étaient pas d’origine humaine !’
En se basant sur ces informations, Ronan en déduisit que c’était l’œuvre des Gobelins Lunaires. En raison de leur agilité et de leur ruse, seuls les individus possédant des connaissances spécialisées pouvaient les traquer, ce qui les rendait presque impossibles à poursuivre. C’était la raison pour laquelle ils n’avaient pas été en mesure d’identifier les coupables malgré la mort de neuf personnes. Et Ronan possédait les connaissances spécialisées pour les traquer.
« Si nous faisons une erreur, nous sommes morts, Aselle. Tu vois ça ? »
Ronan pointa l’index vers le bûcher. Toutes sortes d’ossements d’animaux jonchaient la zone. Parmi eux, il y avait un bon nombre d’ossements humains.
Tout près se trouvait un grand autel fait de branches et d’ossements. Sur l’autel se trouvaient les divers objets que les gobelins avaient collectés au fil du temps. Des armes aux ornements en or, tous ces objets étaient empilés.
Le grand plan était qu’Aselle utilise sa télékinésie pour voler les objets de valeur pendant que les gobelins lunaires étaient endormis. Aselle tremblait et demanda d’une voix tremblante.
« Ro-Ronan… devons-nous vraiment aller aussi loin ? N’y a-t-il pas d’autres moyens de gagner de l’argent… ?
– Il y en a quelques-uns.
– Eh bien, ne pourrions-nous pas essayer l’un d’entre eux ? Ce n’est pas bien.
– Bien sûr. Choisis-en une. La première option consiste à devenir nous-mêmes des gobelins lunaires. Nous attaquons les marchands la nuit et prenons leurs trésors. S’ils résistent, nous leur ferons quelques trous supplémentaires dans la tête. Qu’en penses-tu ?
– …Et la deuxième option ?
– Te vendre à un bordel. Il y a des pervers partout qui aiment les beaux garçons comme toi. Les nuits courtes coûtent 10 pièces d’argent, les nuits longues 30 pièces d’argent. Si tu fais une pipe, c’est 7 pièces d’argent. Quels sont les frais de scolarité ? Si tu te balades pendant un mois, tu seras tranquille jusqu’à la remise des diplômes, n’est-ce pas ? »
Aselle resta figé, incapable de répondre. Ronan se pencha vers lui, s’asseyant côte à côte avec lui.
« Alors, écoute bien, petit. On ne va pas se donner tout ce mal pour rien. Sais-tu ce qu’est Philleon ?
– Euh, c’est quoi cet endroit ? Une académie ?
– Exactement. Une académie. Pas n’importe quelle académie, mais un endroit où la crème de la crème du continent se réunit. Tu crois que ces morveux seront amis avec des paysans comme nous qui puent la bouse de vache ?
– …Non.
– Le seul moyen d’être reconnu, c’est d’être habile. Malheureusement, Philleon est un endroit où seuls les meilleurs des meilleurs parmi les enfants nobles se rassemblent. Ils cultivent probablement leurs talents depuis qu’ils portent des couches, n’est-ce pas ? Il n’y a qu’une seule façon de surpasser ce genre de personnes. L’expérience pratique.
– L’expérience pratique… ! »
Ronan leva légèrement la tête et jeta un coup d’œil à l’autel. Plus de vingt gobelins lunaires s’ébattaient autour de l’autel.
« Oui, l’expérience pratique. Quand les enfants nobles tombent, les jolies servantes accourent avec des potions et des bandages, mais quand nous avons des ennuis, les horribles gobelins nous chargent avec des gourdins. Je peux te garantir qu’une seule expérience dans le monde réel est plus significative qu’une décennie pour ces gamins. À moins que nous ne fassions une grosse connerie. »
Se levant lentement, Ronan tapota le dos d’Aselle.
« Sois un homme, Aselle.
– Ugh… »
Aselle souhaitait pouvoir remonter le temps. Même s’il devait nager à travers la rivière de bouse, il aurait dû sauter du radeau. Mais il était impossible de recueillir l’eau renversée.
Prenant une profonde inspiration, Aselle s’arma de courage. Puis, les mains tremblantes, il visa l’autel. Un chant étouffé s’échappe de ses lèvres.
« Main invisible. »
L’une des dagues posées sur l’autel s’éleva doucement.
****
« C’est ça, Aselle ! Tu peux le faire ! »
Un collier volant dans les airs se glissa dans le sac. Ronan applaudit en serrant les deux poings. Le saphir de taille conséquente qui y était incrusté semblait valoir au moins trente pièces.
« Whew… hoo… !
– Remplis ce sac et partons d’ici. Tu te débrouilles bien. »
Une heure s’était écoulée depuis le début du vol. La nuit se transformait en aube, le ciel se teintait d’un bleu profond. Aselle avait réussi à remplir sept sacs et demi.
« Main… Invisible. »
Il maintint un niveau de concentration inhabituel. Même s’il ne voulait pas l’admettre, le point de vue de Ronan sur l’expérience pratique était exact.
Dans la situation tendue où le simple fait de laisser tomber un objet les exposerait aux gobelins, la télékinésie d’Aselle connaissait une croissance remarquable.
Comme pour contrer son scepticisme, deux lourdes masses s’élevèrent de l’autel. Leurs motifs ornés et élaborés, notamment au niveau de la tête, les destinaient à l’usage des paladins.
« Oh, elles devraient aussi se vendre à un bon prix, non ? »
Ronan éprouvait une joie qu’il n’avait jamais ressentie auparavant. C’était satisfaisant de devenir plus fort lui-même, mais c’était tout aussi agréable de voir son camarade devenir plus fort.
Aselle possédait une singularité et un potentiel que les laquais de l’unité disciplinaire ne pourraient jamais atteindre.
Tout se passait bien. En fait, il avait initialement prévu que les gobelins interviennent à un moment ou à un autre, mais grâce à l’étonnante vitesse de croissance d’Aselle, il semblait peu probable qu’ils aient besoin de dégainer leurs épées.
‘Inutile de gaspiller nos forces avec des laquais gobelins. Ils ne feront que nous fatiguer.’
Ils allaient devoir faire face à de nombreux défis, alors prendre la voie de la facilité n’était pas une mauvaise idée.
Les masses approchaient à grands pas. Bien qu’elles vacillent légèrement en raison de leur poids, leur taille était suffisante, ce qui ne posait pas de problème.
Et c’est alors que cela se produisit.
« Merde ! Sale tête de poule !
– Bon sang ! Attrapez-le avant qu’il n’atteigne la rivière ! »
De nulle part, un cri vigoureux résonna dans la forêt. Ce n’était pas leur voix à tous les deux, mais celle d’autres personnes. Les oiseaux s’envolèrent et les gobelins lunaires, tirés de leur sommeil, crièrent et se levèrent.
-Squawk ! !!
-Croa ! Croa !
« Qu’est-ce que c’est ? Qu… ! »
Surpris, Aselle se recroquevilla sur lui-même. La magie qui retenait les masses disparut.
Thud !
La masse qui était tombée directement au sol brisa la colonne vertébrale d’un gobelin qui tentait de se relever. Les éclaboussures de sang et de matière cérébrale frappèrent les visages des gobelins qui se trouvaient à proximité.
-Ki, Keiaaak ? !
« Non ! »
Aselle se tourna vers Ronan en se serrant la tête. Ronan poussa un profond soupir et saisit la poignée de son épée.
« Ouais, je me disais aussi que les choses se passaient trop biens. »