Chapitre 915 – Pure Folie

Traducteur/Checker : Gray

Team : World Novel

Dans l’obscurité froide, un petit cortège de véhicules gravit une vieille route montagneuse abîmée. Accrochée de façon précaire à la pente de pierre, la route était si étroite que les roues des transports tiennent à peine sur sa surface fissurée.

En regardant par les fenêtres à leur droite, les réfugiés n’apercevaient qu’une pente abrupte. C’est comme s’ils roulaient sur le vide, à quelques centimètres de la mort. De temps à autre, un rocher égaré était poussé hors de la route par les roues des véhicules qui avançaient lentement, puis tombait, ricochant sur les falaises avec un fracas saisissant.

Le son se propageait loin dans la gorge profonde, se reflétant sur les murs de pierre à mesure qu’il devenait de plus en plus fort. Pour les réfugiés effrayés, il semblait aussi assourdissant que le tonnerre.

L’obscurité ne faisait qu’aggraver leur peur. Les phares des transports la traversaient largement, mais au-delà, la nuit était impénétrable et oppressante. Les conducteurs s’efforçaient déjà de maintenir les véhicules sur la route étroite, et comme la plus grande partie de celle-ci était masquée par l’obscurité glaciale, leur tâche semblait presque impossible.

Voyager dans les montagnes la nuit était une affaire malavisée et périlleuse. C’était une aventure insensée.

…Qui est le fou, à présent ?

En étudiant les données des capteurs dans la suite de commandement du Rhino, Sunny calculait mentalement la vitesse de leur progression. Peu importe comment il y réfléchissait, la vitesse du convoi était effroyablement lente.

Malheureusement, il n’y avait rien à faire.

Le puissant APC se déplaçait en tête de cortège, ouvrant la voie aux autres véhicules. Son bélier était abaissé et servait à présent à se frayer un chemin dans la neige. De temps à autre, le Rhino devait aussi enlever d’autres obstacles de la route — des débris de pierre, de gros rochers et d’énormes morceaux de glace qui s’étaient détachés du glacier au sommet de la montagne.

La plupart du temps, il s’en sortait bien. Il était très rare qu’ils tombent sur quelque chose que le Rhino ne pouvait pas traverser ou repousser. Dans ces cas-là, tout le convoi devait s’arrêter et attendre que Sunny enlève l’obstacle que l’APC ne pouvait pas manipuler en toute sécurité avec ses deux mains.

Le Rhino était une machine puissante, mais il ne pouvait se comparer à la puissance d’un Maître. Il y avait très peu de choses que Sunny ne pouvait pas écarter de la route, et même si c’était le cas, il les découperait simplement avec le Péché de Réconfort. La lame de jade du magnifique jian était suffisamment aiguisée pour couper le granit comme s’il s’agissait d’eau.

Non pas qu’il appréciait d’écouter ses chuchotements envahissants.

Quoi qu’il en soit, chaque arrêt de ce genre rendait leur progression déjà lente encore plus lente. L’obscurité, le froid, la précarité des anciennes routes montagneuses, l’état difficile de la région après le récent tremblement de terre… rien de tout cela ne rendait la vie de Sunny facile.

Et ce n’était que le côté naturel des choses. Bien sûr, il y avait aussi d’autres menaces autour d’eux…

Toute la région regorgeait de Créatures du Cauchemar.

Pour l’instant, Sunny avait réussi à mener le convoi au-delà des grands essaims d’abominations, mais ce n’était qu’une question de temps avant qu’ils n’aient à se battre. Avec tout le bruit qu’ils faisaient et toute la lumière qu’ils produisaient, il était inévitable que quelque chose d’affamé les remarque.

Certains l’avaient déjà fait, bien sûr. Cependant, Sainte avait pu tuer les quelques Créatures du Cauchemar solitaires sans trop attirer l’attention. Sunny se servait d’elle comme d’un pis-aller, de sorte qu’elle voyageait à l’écart du convoi pour intercepter toute menace émergente avant qu’elle ne puisse endommager les transports.

Il ne savait pas combien de temps sa protection allait durer. Sunny avait l’impression que le périmètre de sécurité autour du convoi se réduisait de plus en plus.

…Au moins, lui et ses soldats pouvaient voir à travers l’obscurité. S’ils étaient aussi aveugles que les soldats ordinaires qui protégeaient le convoi, Sunny serait probablement devenu fou à l’heure qu’il est. Mais il restait étonnamment calme et analytique.

Pour lui, la situation était à la fois simple et déraisonnablement difficile.

Il y avait deux types de choses à sa disposition. D’une part, les actifs — Sainte et Cauchemar, lui-même, les Irréguliers et les soldats ordinaires. L’autre était les personnes à charge — les réfugiés, ainsi que le Professeur Obel et Beth.

Il y avait également quatre types de dangers auxquels il devait faire face. L’un était les Créatures du Cauchemar, qu’il devait traquer à travers ses ombres et qu’il devait soit éviter, soit tuer. L’autre était la menace intérieure — les personnes succombant au Sortilège ou devenant folles, qu’il pouvait atténuer par diverses mesures. La troisième était l’environnement proprement dit. Le monde pouvait facilement les tuer sans même avoir besoin de l’aide des abominations, mais il était possible de s’en occuper également.

Enfin, il y avait le quatrième type de danger, le plus grave — les menaces imprévues. Il n’était pas possible de les anticiper, de les traiter ou de les atténuer.

La tâche de Sunny consistait simplement à utiliser ses actifs de manière appropriée, afin de protéger les personnes à sa charge contre le danger. Cependant, même s’il prenait toutes les bonnes décisions, rien n’empêchait une nouvelle Porte de s’ouvrir en plein milieu du convoi, alors… il fallait aussi y penser.

Super. Et pour couronner le tout, nous sommes trop lents.

Non seulement le convoi était trop lent pour échapper à une attaque en cas de besoin, mais il était aussi désespérément en retard sur le calendrier. À ce rythme, les réfugiés devraient passer une nuit ou deux à l’intérieur des transports au lieu d’un campement relativement sûr.

« Eh bien… je ne peux rien y faire. »

S’il avait de meilleurs véhicules… s’il avait plus d’Éveillés… s’il avait plus d’outils à sa disposition…

Sunny soupira. Il ne servait à rien de penser à de telles choses.

À ce moment-là, son expression changea légèrement.

Sunny regarda sur le côté, comme s’il transperçait la coque du Rhino de son regard.

Là, plusieurs kilomètres plus loin… les pentes de la gorge se rejoignaient, formant une petite vallée dont la majeure partie de la surface était occupée par un lac gelé. Un essaim de Créatures du Cauchemar venait d’apparaître derrière une haute protubérance rocheuse et descendait vers le lac.

De l’autre côté de la vallée, toujours caché par la pente de la montagne, il y avait un autre essaim, plus petit, mais composé d’abominations bien plus puissantes. Ils se dirigeaient dans la même direction.

Ce que Sunny craignait se réalisa. Le convoi ne pouvait pas faire demi-tour, et ne pourrait pas éviter d’entrer en collision avec les deux essaims. Le combat était inévitable.

Le coin de sa bouche tressaillit.

Se levant de son siège, Sunny étira ses membres, puis jeta un regard impassible aux Irréguliers. Son groupe se tendit instantanément.

« Préparez vous. Il est temps de prendre l’air… »