Chapitre 682 – La Secte Rouge

Traducteur/Checker : Gray

Team : World Novel

Effie le fixa sans le moindre amusement sur son visage enfantin, ce qui ne fit que rendre plus comiques ses tentatives de paraître sérieuse. Puis elle se renfrogna et dit d’un ton ferme :

“Tu veux mourir ?”

Sunny secoua la tête avec un sourire, puis détailla les choses qu’il avait apprises, y compris les diverses informations qu’il avait glanées dans les cauchemars, son expérience avec les Bellicistes, et ses observations sur Solvane et Noctis.

Lorsqu’il eut terminé, le silence régna pendant un moment. Les autres digéraient toutes les informations qu’il avait partagées avec eux, pleins de pensées. Enfin… tout le monde sauf Effie.

Le sombre silence fut bientôt rompu par le bruit d’une forte mastication. La petite fille avala un morceau de tourte à la viande, puis cligna des yeux plusieurs fois, remarquant que tout le monde la fixait. Finalement, elle essuie l’huile sur ses lèvres et dit :

“Quoi ? Je suis une enfant en pleine croissance, vous savez ! J’ai besoin de bien manger pour grandir !”

Elle essuya ensuite ses doigts huileux sur la nappe et haussa les épaules.

“Bon, de toute façon… Je crois que je vais être la suivante.”

La petite fille jeta un coup d’œil à Sunny, fit une grimace et se détourna.

“Il n’y a pas grand-chose à raconter, de toute façon. Mes trois mois au Temple du Calice n’ont pas été aussi passionnants que les folles mésaventures de Sunny. Quoique…”

Son visage s’assombrit soudain.

“…Ils n’ont pas été très agréables non plus.”

Effie soupira, s’attarda quelques instants et reprit d’un ton sombre :

“En fait, j’ai été envoyée dans le corps d’une des plus jeunes disciples de la Secte Rouge. Une orpheline qui avait été confiée aux Demoiselles, pour le meilleur et pour le pire… mais surtout pour le pire. Comme je l’ai déjà dit, leurs enseignements sont devenus cruels et pervers au fil des siècles. Maintenant que je sais comment Hope manipule les désirs de chacun, je comprends enfin pourquoi. Cette Solvane… a elle aussi été élevée dans la Secte Rouge, il y a bien longtemps. La différence, c’est qu’elle a réussi à s’échapper. Mais pas nous.”

La petite fille trembla.

“Je me suis enfuie une fois, au début, et j’ai réussi à atteindre l’Île de la Main de Fer. Mais j’ai été attrapée, et la punition… à l’époque, ils savaient déjà que rien de ce qu’ils me feraient ne me rendrait obéissante. Ils ont donc puni les autres à ma place. Après cela… eh bien, je n’ai plus essayé de m’échapper. Du moins, tant que les autres filles étaient encore en vie.”

Effie resta silencieuse un moment, puis haussa les épaules.

“C’était donc assez ennuyeux. Juste un entraînement sans fin… entraînement au combat, entraînement à l’essence, conditionnement du corps, et tous ces trucs. Comment supporter la douleur, comment supporter la peur, comment forger sa volonté. Comment devenir un instrument de guerre parfait, impitoyable et mortel. Bien sûr, les leçons étaient très inventives… quelle meilleure façon d’apprendre à quelqu’un à supporter la douleur que de le torturer jusqu’à ce qu’il frôle la mort ? Ou plus, si l’élève est faible.”

Le visage de la petite fille devint distant.

“…En fin de compte, tout le monde s’est avéré être faible. Sauf moi.”

Elle prit une bouchée de son morceau de tourte à la viande, la mâcha lentement, puis dit :

“Une fois, elles m’ont mise dans un cercueil et m’ont enterrée vivante, pendant quelques jours. Pour m’apprendre à vaincre la peur de l’obscurité. Ces misérables… qui a dit que j’avais peur de l’obscurité, pour commencer ? C’est tellement… tellement stupide. Mais surtout, c’était un entraînement au combat. Elles nous ont entraînées sans pitié. On peut faire beaucoup de choses avec quelques guérisseurs Éveillés, sans se soucier de savoir si les disciples survivent ou non. Si nous nous cassions un os, les guérisseurs le remettaient en place et nous ordonnaient de continuer. Si nous saignions trop… eh bien, vous voyez l’idée.”

Effie secoua la tête.

“Le problème, c’est que j’étais encore plus malmenée que les autres. La fille dont j’ai pris le corps a eu la malchance de s’Éveiller à un très jeune âge, voyez-vous. Les Demoiselles voyaient en elle l’élue promise… une guerrière prodigieuse destinée à tuer Solvane et à laver l’humiliation qu’elle avait infligée à la secte, à venger son péché et son sacrilège. Alors, elles m’ont fait travailler plus dur que n’importe qui d’autre.”

La petite fille détourna le regard, puis soupira.

“Le plus étrange, c’est que toutes les saloperies qu’elles nous faisaient subir étaient faites sans aucun soupçon de haine, de malveillance ou de mauvaises intentions. Au contraire, les Demoiselles les plus âgées nous traitaient comme leurs petites sœurs — quand elles ne nous torturaient pas et ne nous tuaient pas, bien sûr. Ma professeure… Hilde… Je pense qu’elle me considérait comme sa propre fille. Elle se souciait de moi. Ça a fait beaucoup de bien, en fin de compte…”

Elle hésita un instant, puis grimaça.

“Enfin, bref. Finalement, il ne restait plus que moi. En fait, je pense qu’elles ont été plus dures avec les autres filles à cause de moi. Ma présence… a ravivé leur ferveur, je crois. Une fois que toutes les autres sont mortes et que les Demoiselles n’avaient plus rien à me reprocher, j’ai commencé à planifier mon évasion. Je ne savais pas si j’allais y survivre, mais heureusement, avant que je puisse le découvrir, Sunny et Kai sont arrivés et ont anéanti toute la secte. Santé ! Merci, d’ailleurs.”

Elle les salua d’un signe de tête, puis s’empiffra d’un autre morceau de tarte, ne voulant visiblement rien dire d’autre.

Tout le monde resta silencieux, jusqu’à ce que Cassie se pencha et posa sa main sur l’épaule de la petite fille. Elle la serra doucement et dit :

“Tu as bien fait, Effie. Tu as bien fait de survivre.”

Effie baissa les yeux, soupira, puis dit d’un ton sombre :

“Ah, mais cette fois, je ne voulais pas seulement survivre. Je voulais aussi sauver quelques personnes. Mais j’ai échoué… mais qui s’en soucie ? Je suis vraiment trop vieille pour être aussi sentimentale. Ou peut-être que l’espoir a déjà fait des ravages dans mon cerveau… ce n’est qu’un Cauchemar, après tout.”

Entendre une petite fille proclamer qu’elle était trop vieille pour ressentir du chagrin aurait été drôle, si ce n’était pas si désolant. Personne ne dit rien, jusqu’à ce que Kai se penche en arrière et soupire.

Sa voix grinçante résonna alors dans la pièce, faisant frissonner Sunny :

“Dans ce cas, je suppose que c’est mon tour. Mon histoire n’est pas très longue. Je n’ai pas fait grand-chose.”

Il jeta un coup d’œil à ses mains, dont la peau avait été remplacée par de l’écorce d’arbre polie, resta silencieux un moment, puis ajouta :

“…J’ai seulement combattu un dragon. Et j’ai perdu.”