Chapitre 642 – Un Réveil Brutal

Traducteur/Checker : Gray

Team : World Novel

Ensanglanté et fou, Perdu de la Lumière traînait son corps sur un vaste plan de pierre usée, son épée raclant les roches noires. Derrière lui, les restes déchiquetés d’un navire de guerre étaient consumés par le feu, peignant l’obscurité de la nuit d’une lueur orangée et furieuse.

…Devant lui, à une certaine distance, un magnifique destrier noir se tenait sur des jambes tremblantes, de l’écume rouge tombant de sa bouche. Les yeux de la bête ténébreuse brillaient d’une terrible lumière cramoisie, mais derrière la fureur et la haine sans bornes se cachait un profond sentiment d’épuisement, mêlé de confusion, de ressentiment et de douleur.

Perdu de la Lumière grimaça.

“Qu’est-ce que tu attends ? Viens ici ! Viens me prendre, misérable !”

L’étalon respirait bruyamment, des filets de vapeur brûlante s’échappant de ses naseaux. Il renifla de colère, puis s’élança en avant, baissant la tête pour embrocher l’ennemi de ses cornes acérées. Ses sabots d’acier résonnaient, faisant jaillir des nuées d’étincelles rouges sur la pierre ancienne, et sa crinière noire ondulait dans le vent comme un flot de ténèbres pures.

Ils s’affrontèrent dans le ciel vide de la nuit…

C’est alors que Perdu de la Lumière mourut.

…Du moins, c’est ce qu’il pensait.

Au lieu de se dissoudre dans les ténèbres et de renaître dans un nouveau cauchemar, il tomba au sol, faisant trembler le monde entier.

Qu’est-ce que c’est que ça ? Suis-je enfin foutu ?

Il crut voir d’étranges déchirures apparaître dans le tissu même de la réalité…

La réalité s’effrita comme un vaste voile noir. Tout autour de lui — l’île de pierre, les débris brûlants du navire brisé, même le ciel noir et sans lumière — ondulait et se balançait, comme un rideau de soie qu’une main invisible et géante était en train d’effriter. Un instant plus tard, déchiré et brisé, ce rideau s’écroula.

…C’était un spectacle magnifique que de voir un monde entier se désintégrer sous vos yeux.

Quelque temps plus tard, Perdu de la Lumière se retrouva dans une obscurité sans limites, entouré de pur néant. Il n’y avait plus de douleur… en fait, il ne semblait même plus avoir de corps. Au lieu de cela, il s’était transformé en une ombre informe, avec trois orbes de feu noir brûlant furieusement dans ses profondeurs.

Perdu de la Lumière se mit à rire.

“Qu’est-ce qui s’est passé ? Ne me dis pas… ne me dis pas que tu es à court de cauchemars, bête ! Oh, que vas-tu faire maintenant ?!”

Au lieu d’une réponse, quelque chose bougea devant lui… derrière lui… tout autour de lui.

Dans l’obscurité, il y avait une autre ombre. Mais celle-ci… celle-ci était plus profonde, plus vaste et beaucoup plus ancienne.

Elle était pleine de malveillance et de haine.

Alors que sa voix résonnait dans le néant, la vaste ombre s’avança soudain, l’enveloppant.

Et puis…

Perdu de la Lumière… Sunny… se réveilla.

***

Sunny roula hors du lit, s’agrippant à sa poitrine. Son gantelet frotta contre le métal onyx du Manteau du Monde Souterrain, et dans la seconde qui suivit, il tomba sur le sol de pierre froide, regardant autour de lui, les yeux pleins de confusion et de peur.

“Où suis-je ? Un autre cauchemar ?”

Il vit un serpent terrifiant enroulé dans un coin, la lumière pâle de la lune scintillant sur ses écailles stygiennes, et une gracieuse chevalière en armure noire qui montait la garde à la porte. Sunny paniqua un instant, puis se souvint de qui il s’agissait.

…Sainte ? Serpent Noir ?

Puis, il se souvint de qui il était.

Ses pupilles s’élargirent.

“Je suis… réveillé.”

Les souvenirs fragmentés des innombrables cauchemars noyaient son esprit, tous plus pénibles les uns que les autres. Certains d’entre eux s’estompaient déjà, comme le font habituellement les rêves… mais d’autres demeuraient, presque aussi vivants et vibrants — et terribles — que lorsqu’il les avait vécus.

Sunny frissonna et poussa un cri étouffé.

Pendant quelques instants, son sentiment d’identité se fragilisa, la folie de son cauchemar se heurtant à son être réel. Mais ensuite, le vrai lui, celui qui était un combattant Éveillé au lieu d’un être sans nom enfermé dans une roue sans fin de cauchemars torturants, l’emporta et absorba l’autre… d’une manière ou d’une autre.

C’était un vrai gâchis.

Mais Sunny n’avait pas le temps de prêter attention au processus chaotique et, sans aucun doute, désastreux de la fusion de ses différents aspects.

Car, dès qu’il tomba sur le sol, il entendit un son douloureusement familier… fort, menaçant… qui se rapprochait de plus en plus.

Le tintement de sabots d’acier sur la pierre froide.

Comment… quoi… ?

Il était trop désorienté et choqué pour rassembler ses pensées et comprendre ce qui se passait.

Il n’était sûr que d’une chose.

…Ce maudit cheval arrivait !

Sainte leva soudain son bouclier et fixa la porte, tandis que le Serpent Noir se fondait silencieusement dans les ombres.

Sunny essayait déjà de se lever, une pensée désespérée essayant de se former dans son esprit :

Mémoire… Je dois invoquer une Mémoire… J’ai besoin d’une arme…

Mais il n’en eut pas l’occasion.

Un instant plus tard, le mur de la chambre explosa soudainement en un déluge d’éclats de pierre, et deux yeux cramoisis furieux apparurent dans l’obscurité derrière lui.

L’étalon noir… la Terreur Éveillée qui avait été la monture et le compagnon du Seigneur de l’Ombre… galopa dans la chambre en traversant le mur de pierre et fonça sur Sunny sans le moindre ralentissement.

Dans l’instant qui précéda, Sunny eut l’occasion de bien l’observer. La créature était exactement comme dans les cauchemars.

L’étalon était grand et gracieux, son pelage était aussi noir que la nuit et ses yeux brûlaient d’une lumière cramoisie menaçante. Des muscles maigres roulaient sous sa peau à chacun de ses mouvements, la faisant scintiller d’un éclat sombre. Ses sabots semblaient forgés dans un sombre métal adamantin, tout comme ses cornes incurvées et ses crocs acérés et terrifiants.

Le cheval ténébreux semblait entouré d’ombres, et sa silhouette était enveloppée de leur sombre manteau. Il était aussi beau que terrifiant…

Plus important encore, la Terreur se dirigeait droit sur Sunny, une haine froide brûlant dans ses yeux terribles.

Une fraction de seconde plus tard, l’étalon le percuta à pleine vitesse.

Argh !

Les cornes noires ne parvinrent pas à percer le métal du Manteau du Monde Souterrain, mais Sunny eut l’impression d’être percuté par un train à grande vitesse. Son corps blindé fut soulevé en l’air et projeté en arrière.

Le destrier l’emporta sur ses cornes acérées et, un instant plus tard, percuta l’autre mur de la pièce, le faisant voler en éclats avec le dos de Sunny.

Sunny sentit un autre impact terrifiant, et sa vision devint momentanément noire.

…Entourés d’un nuage de débris de pierre, tous deux — le démon et la Terreur — tombèrent de la brèche déchiquetée dans le mur extérieur du donjon et dans l’air frais de la nuit, dégringolant de la hauteur de la tour principale du château abandonné.

Maudit cheval… pourquoi ne peux-tu pas mourir ?!