Accueil Article 2075-chapitre-12

2075-chapitre-12

Chapitre 12 – L’odeur du sang

 

Traducteur/Checker : Gray

Team : World Novel

 

Pour le moment, cet obstacle regardait vers le bas, évitant le regard de Sunny. Sa main était posée sur la poignée de son épée. Comme toujours, le jeune esclave n’avait aucune idée de ce qui se passait dans la tête parfaitement dessinée de Héros.

L’incertitude le rendait nerveux.

Finalement, après un certain temps, le soldat parla :

“Je n’ai qu’une seule question.”

Sunny et Érudit le fixèrent en retenant leur souffle.

“Oui ?”

“Tu as dit que l’un d’entre nous devait être sacrifié pour sauver les deux autres. Pourquoi lui ? D’après ce que je vois, tu es bien plus proche de la tombe.”

Une excellente question ! J’étais justement sur le point de la poser moi-même.

Sunny se tourna vers l’esclave plus âgé, en essayant très fort de réprimer un rictus moqueur. Mais à son grand désarroi, Érudit avait une réponse toute prête.

“Avant la première attaque, il saignait déjà à cause du fouet de ton supérieur. Pendant l’attaque, il était trempé dans le sang d’un autre esclave. Sa cape aussi en a été imbibée quand le précédent propriétaire est mort. Le garçon empeste déjà le sang. Le garder en vie nous mettrait en danger. C’est pourquoi il est le meilleur choix.”

Son rictus était mort avant d’atteindre le visage de Sunny.

Sois maudit, toi et ta grosse tête !

Le raisonnement de Érudit était effroyablement solide. Héros écoutait, son expression s’assombrissant à chaque mot. Finalement, il regarda Sunny, une étrange lueur dans les yeux.

“C’est vrai.”

Sunny sentait sa bouche devenir sèche. Une sueur froide coulait le long de son dos. Il se crispait, prêt à agir…

Mais à ce moment-là, Héros sourit.

“Ta logique est presque inattaquable,” dit-il en dégainant son épée. “Cependant, tu n’as pas pris en compte une chose.”

Érudit leva un sourcil, essayant de cacher sa propre nervosité.

“Qu’est-ce que ça peut être ?”

Le jeune soldat se retourna pour lui faire face, le sourire ayant disparu de son visage. À présent, il dégageait une intention meurtrière intense, pratiquement palpable.

“Je sais qui vous êtes, Votre Grâce. Je sais aussi ce que vous avez fait, et comment vous avez fini en esclave. Rien qu’un seul des crimes répugnants que vous avez commis suffirait à me donner envie de vous tuer. Alors s’il y a quelqu’un parmi nous qui mérite d’être sacrifié… c’est bien toi. ”

Les yeux de Érudit s’agrandirent.

“Mais… et l’odeur du sang !”

“Ne t’inquiète pas pour ça. Je te ferai saigner suffisamment pour neutraliser l’odeur résiduelle que porte le garçon.”

Tout se passa si vite sans que Sunny ait le temps de réagir. Héros s’élança à une vitesse qui semblait presque inhumaine. Un instant plus tard, Erudit hurlait au sol, sa jambe brisée par un seul coup du côté plat de l’épée du jeune soldat. Ne lui laissant pas l’occasion de se rétablir, Héros lui écrasa l’autre jambe, et on entendit clairement le bruit écœurant des os qui se brisent. Le cri se transforma en un hurlement sanglotant.

En un clin d’œil, Érudit était fini.

La brutalité des actions de Héros contrastait tellement avec son comportement habituellement gracieux que Sunny sentit le sang se transformer en glace dans ses veines. C’était… effrayant.

Le soldat lui jeta un regard apaisé et dit d’un ton placide :

“Attends-moi ici.”

Puis il attrapa l’esclave le plus âgé et le traîna sur le chemin, disparaissant bientôt derrière un affleurement rocheux. Au bout de quelques minutes, on entendit des cris terribles qui résonnaient dans le vent.

Sunny resta seul, tremblant.

Merde ! C’est… c’est trop !

Il n’arrivait toujours pas à croire que la mort de Érudit était si soudaine. Et à quel point elle était impitoyable.

Quelques instants plus tard, Héros était de retour, faisant comme si rien ne s’était passé. Mais c’était exactement cette normalité qui inquiétait le plus Sunny.

Après avoir trié le contenu du paquetage de Érudit et jeté la plupart du bois de chauffage, le jeune soldat le mit sur son épaule et se tourna nonchalamment vers le jeune esclave :

“Allons-y. Nous devons nous hâter.”

Ne sachant pas quoi dire, Sunny lui fit un signe de tête et avança.

Maintenant, ils n’étaient plus que deux.

C’était un peu stupide, mais Sunny se sentit soudainement seul.

Marcher sur le sentier était beaucoup plus facile que d’escalader le mur de la montagne. Il avait même du temps pour des pensées inutiles. Un étrange sentiment de mélancolie s’empara de Sunny… d’une certaine manière, il commençait à penser que la fin de ce cauchemar, quel qu’il soit, n’était plus très loin.

Ils marchèrent en silence pendant un certain temps avant que Héros ne parle.

“Ne te sens pas coupable de ce qui s’est passé. Ce n’est pas de ta faute. C’est moi qui ai pris la décision, et moi seul.”

Le jeune soldat était situé à quelques pas devant, si bien que Sunny ne pouvait pas voir son visage.

“De plus, si tu connaissais les péchés de cet homme… en fait, il vaut mieux que tu ne le saches pas. Fais-moi confiance quand je dis que le tuer était un acte de justice.”

Je me demande lequel de nous deux culpabilise.

Ces gens… toujours en train d’essayer de rationaliser leurs actions, toujours désespérés de maintenir une illusion de droiture même en faisant les choses les plus immondes. Sunny détestait l’hypocrisie.

N’obtenant pas de réponse, Héros gloussa.

“Tu n’aimes pas parler, n’est-ce pas ? Eh bien, d’accord. Le silence est d’or.”

Ils ne parlèrent plus après cela, chacun préoccupé par ses propres pensées.

Le soleil se couchait, peignant le monde en un million de nuances cramoisies. À cette hauteur, l’air était pur et vivifiant, percé de courants de lumière écarlate. En dessous d’eux, une mer de nuages bordeaux passait lentement au-dessus de la montagne. Les étoiles et la lune avaient commencé à se révéler dans le ciel vermillon.

C’était très beau.

Cependant, Sunny ne pouvait que penser au froid qu’il allait faire une fois le soleil complètement disparu.

Avant que cela n’arrive, Héro leur avait trouvé un abri. Non loin du chemin, cachée derrière quelques grands rochers, se trouvait une étroite crevasse qui s’étendait dans la pente de la montagne. Heureux d’être à l’abri du vent perçant, ils explorèrent la crevasse et aboutirent dans une petite grotte bien cachée.

Sunny fit un mouvement pour déballer du bois de chauffage, mais Héros l’arrêta d’un geste de la tête.

“Aujourd’hui, nous allons camper sans faire de feu. La bête est trop proche.”

Camper sans les flammes chaudes pour leur tenir compagnie n’allait pas être agréable, mais au moins ils n’allaient pas mourir de froid à l’intérieur de la grotte. De toute façon, l’alternative était trop effrayante.

Sunny s’assit, mettant son dos contre la paroi de la grotte. Héros s’installa en face de lui, l’air abattu et pensif.

Il était manifestement d’une humeur étrange. Le fait qu’aujourd’hui, pour la première fois, le jeune soldat n’avait pas pris soin de son épée après avoir établi le camp en était la preuve.

Bientôt, le soleil avait disparu, et leur petite grotte était devenue complètement sombre. Sunny, bien sûr, voyait très bien, mais Héros, lui, était complètement aveugle.

Dans l’obscurité, son beau visage semblait noble et, pour une raison quelconque, triste. Sunny l’étudia, sans vouloir s’endormir.

Après un moment, Héros parla soudainement d’une voix calme :

“Tu sais, c’est étrange. Habituellement, je peux sentir la présence de quelqu’un même dans l’obscurité absolue. Mais avec toi, il n’y a rien. C’est comme si tu n’étais qu’une ombre comme une autre.”

N’ayant que le silence pour lui répondre, il sourit.

“Tu dors ?”

La question résonna dans l’obscurité. Sunny, qui n’avait jamais parlé avec Héros à moins d’un besoin urgent, et même alors en utilisant seulement quelques mots au mieux, sentait qu’il y avait une étrange intimité entre eux maintenant. C’est pourquoi il décida de parler. Peut-être que l’obscurité lui donna du courage.

D’ailleurs, il y eut une occasion.

“Pourquoi ? Tu attends que je m’endorme pour me tuer ? Ou tu le feras demain matin ?”

error: Contenue protégé - World-Novel