Chapitre 80 – Sa détermination (2)

*Bwaaaa*

La corne du navire a retenti. C’était l’indicateur que le départ du navire était imminent.

Romantica commençait à s’impatienter.

« Cet idiot ! Mais qu’est-ce que tu fais ? »

Romantica a allumé le bracelet de communication. Le bracelet de communication avait la capacité de rechercher l’emplacement des membres du groupe. Ils l’avaient utilisé pour localiser Desir quand il s’était téléporté avec Masque de Corbeau.

Elle a cherché l’emplacement de Desir et le résultat n’a pas tardé à apparaître. Desir était à bord, dans les cabines quelque part. Romantica courut frénétiquement dans la zone des cabines. Elle descendit les quatre marches d’un seul bond et traversa un groupe de personnes qui traînaient dans le couloir. Elle s’est rapidement excusée aux personnes heurtées sans ralentir et a atteint le point indiqué par le bracelet de communication.

Elle ne pouvait s’empêcher d’avoir du ressentiment pour le succès de l’entreprise Eru à ce moment précis. Le vaisseau était si grand que Romantica devait traverser le couloir qui reliait la longue file de cabines.

La fonction de positionnement du bracelet de communication ne pouvait pas fournir une localisation précise. Cela signifiait qu’elle devait ouvrir chaque porte de cabine à la recherche de Desir.

Romantica n’a pas hésité.

Elle a ouvert la porte de la première cabine. Le couple à l’intérieur était choqué et ne pouvait que la regarder avec des yeux remplis de surprise. Desir n’était pas là.

« Désolé. »

*Slam*

Elle a fermé la porte de la première cabine.

C’était la même chose pour la deuxième cabine. Elle a fermé la porte de la deuxième cabine.

C’est ainsi que Romantica a ouvert les portes des cabines pour tenter de fouiller l’ensemble des pièces d’habitation à la recherche de Desir.

Du coin de l’œil, par une fenêtre proche, Romantica a vu qu’ils quittaient le port. Elle a accéléré le pas.

Et.

C’était enfin la dernière cabine.

Juste avant que la porte ne s’ouvre, Romantica a salé sa respiration. Elle devait être assez calme pour lui donner une bonne réprimande.

« Hé, Desir ! Tu essaies de jouer à cache-cache avec moi… ?! »

La dernière porte s’ouvrit mais il n’y avait personne à l’intérieur. Très lentement, Romantica est entrée dans la cabine. Il n’y avait aucun signe de personne ayant utilisé la pièce. C’était la seule cabine qui était propre.

En regardant à l’intérieur de la cabine vide, Romantica a repéré le bracelet de communication de l’Académie Hebrion posé sur le bureau.

Romantica l’a pris et a sorti son propre bracelet de communication. Elle a fermé les yeux un moment avant de les ouvrir.

Puis elle s’est empressée d’appeler Desir.

S’il vous plaît, ne sonne pas.

*Rrrrring*

Le bracelet de communication dans son autre main s’est mis à sonner.

Romantica a eu du mal à contenir la vague d’émotion qui montait en elle. Elle est sortie de la cabine et est retournée sur le pont du vaisseau. Pendant qu’elle fouillait la cabine, le vaisseau était sorti du port.

Romantica s’est précipitée vers le majordome. Il semblait plutôt consterné par son comportement peu glorieux. Elle avait le visage crispé de rage.

« Oh, ma dame. Qu’est-ce qui ne va pas ? »

Romantica a immédiatement répondue.

« Maintenant, répond à ma question sans détour. Le plus vite possible. »

« Oh, jeune dame. »

« Comment saviez-vous que j’étais en train d’évacuer et que dans quelle partie de la file d’attente je serais ? »

« Je-je suis descendu et j’ai cherché partout pour vous trouver.  »

« Ne mentez pas ! Ça n’a pas de sens de chercher quelqu’un si loin dans la file d’attente ! »

*Swish*

Les cendres sont tombées du ciel pendant tout ce temps. Ajest, Pram et tous les réfugiés, y compris Romantica, qui se trouvaient à l’extérieur pendant la majeure partie de ce temps, en étaient couverts. Le mouvement constant des gens l’a également empêché de se déposer complètement sur le sol, augmentant ainsi la quantité de cendres flottant dans l’air.

Cependant, les vêtements du majordome étaient si soignés. Personne ne pourrait penser que ces vêtements appartiennent à une personne qui a erré à l’extérieur.

En d’autres termes, il était dans le navire marchand pendant tout ce temps.

C’était le majordome de la famille Eru, et il a dû être le premier à évacuer avec la famille.

Le majordome est resté sans voix lorsque Romantica lui a fait remarquer.

« Soyez honnête ! Tout de suite ! Peu importe ce qu’il vous a dit, je vais sauter de ce bateau si vous ne me dites pas la vérité ! »

Face à une Romantica irrationnelle et rageuse, qui risquait de mettre à exécution une telle menace, le majordome n’eut d’autre choix que de rompre sa promesse et de tout lui dire.

« A ce moment-là, votre ami aux cheveux noirs, que vous m’avez précédemment demandé d’escorter, m’a dit où vous seriez. Mais ma dame, je jure… »

Elle n’avait pas besoin d’en entendre plus.

Romantica a immédiatement ignoré le majordome et l’a dépassé pour grimper sur la balustrade du bateau.

« Oh, ma dame ! »

*Cri*

Juste avant que le corps de Romantica ne tombe dans la mer. Ajest a réussi à s’accrocher à elle. Romantica a rapidement essayé de se débarrasser de la ‘Runegear’, mais Ajest l’a tirée en arrière plus vite. L’élan de ce mouvement les a fait tomber toutes les deux en arrière sur le pont du bateau.

« Eloigne-toi de moi. »

« Retrouve la raison, Romantica. »

Romantica a tenté de se débarrasser de l’emprise d’Ajest tandis qu’Ajest tentait de la maîtriser. Les deux ont roulé plusieurs fois pendant cette lutte.

« Je t’ai dit de me lâcher ! »

« Si tu promets de rester calme, je te lâcherai. »

« Tu sais que je ne ferai pas une promesse comme ça ! »

Romantica continuait à se débattre pour se dégager de l’emprise d’Ajest, mais elle ne pouvait pas résister à sa force.

Ajest a finalement eu le dessus dans la bagarre, et a empêché tout mouvement supplémentaire de Romantica.

Romantica ne pouvait que diriger sa colère contre Ajest en l’interrogeant.

« Tu étais au courant ? »

Ajest a répondu.

« Oui. »

« Quand as-tu découvert ça ?! »

« Quand Desir a ralenti l’évacuation en déclenchant une bagarre. »

En déclenchant la bagarre.

Romantica se sentait comme si quelqu’un lui avait frappé sur la tête avec un marteau.

La bagarre pendant l’évacuation était l’œuvre de Desir pour avoir le temps de cacher le bracelet de communication. Et Romantica a dû perdre du temps à le chercher jusqu’à ce que le vaisseau soit déjà parti.

Stupide salope.

Romantica s’est rappelée à elle-même. Elle ne pouvait pas se le pardonner alors qu’elle découvrait ce que Desir avait fait.

Tout en pleurant presque, elle ne pouvait que continuer à crier sur Ajest.

« Tu savais ! Pas comme moi qui suis stupide, tu le savais bien plus tôt ! Pourquoi tu ne l’as pas arrêté ? POURQUOI ! »

En contraste avec le ton frénétique de Romantica, le ton d’Ajest était égal et calme.

« Je ne l’ai pas remarqué. C’est lui qui me l’a demandé. »

« Quoi ? »

Pendant un moment, la lutte de Romantica s’est arrêtée.

Ajest a continué.

« Il m’a demandé d’empêcher Pram et toi de de le suivre. »

***

Desir longeait la côte.

Toute la région de Deltaheim était obscurcie par la cendre dans l’air qui était aussi épaisse que du brouillard.

Il courait en toussant encore et encore et en essayant futilement de se couvrir le nez et la bouche contre les particules d’air empoisonné.

Au passage de Desir, un cadavre est apparu. Le corps était partiellement recouvert par les gravats d’une construction en pierre voisine.

« Espérons qu’il n’ait rien senti et qu’il soit mort sur le coup. »

Face à une scène aussi terrible, les pas de Desir ont ralenti et il a fini par s’arrêter complètement. Il n’avait pas de mots pour décrire correctement ce qui se trouvait devant lui. C’était terrible, mais en même temps, c’était un paysage étranger et pourtant familier pour lui.

Il avait auparavant vécu une vie de mort. Et il avait été le témoin direct de tant de ces morts.

Des amis avec qui il avait partagé des journées d’école et des souvenirs d’enfance. Des juniors qui le suivaient exceptionnellement bien.

Et Romantica.

Parmi les nombreux décès, Desir ne pouvait surtout pas oublier la mort de Romantica.

Peut-être était-ce parce que sa situation était similaire à la sienne.

L’histoire se terminait par une triste fin. Romantica Eru avait du talent et un avenir plus brillant que n’importe qui d’autre.

Elle était aussi la dame d’une famille de barons, elle a donc pu intégrer sans problème la Classe Alpha de l’Académie Hebrion et entrer plus tard dans le groupe de la Lune Bleue qui était considérée comme le meilleur de l’école.

Après un long moment, cependant, on a découvert que Romantica était la fille d’un baron qui avait acheté le titre avec de l’argent. Les nobles de la Classe Alpha ne l’ont plus reconnue après ça.

Incapable de supporter la brutalité de la Classe Alpha, Romantica est finalement descendue dans la Classe Bêta, mais personne ne l’a acceptée là non plus. Il n’y avait aucun autre endroit où elle pouvait être.

Dans la classe Bêta, le talent de Romantica n’a pas été cultivé et son avenir a progressivement stagné. Au moment où elle a obtenu son diplôme, elle n’était qu’au 3ème cercle.

Et puis le Labyrinthe des Ombres est apparu. Romantica entra dans le Labyrinthe des Ombres en tant que membre de l’Union des Royaumes de l’Ouest, où elle rencontra à nouveau Desir, qui était de la même Classe Bêta.

Desir, étant dans une situation similaire à la sienne était malheureusement une fatalité.

Dans un champ de bataille aussi terrible, ils sont devenus le soutien émotionnel l’un de l’autre. Ils ont survécu l’un pour l’autre.

Et huit ans après l’arrivée de l’Ombre du Labyrinthe… Finalement, Desir n’a pas pu protéger Romantica.

« Je ne permettrai pas que cela se reproduise. »

Desir, qui était retourné dans le passé, avait fait ce voeu.

Ce n’était pas seulement pour elle.

Ajest et Pram.

Zod et Priscilla.

Des résidents de Deltaheim et des visiteurs du monde entier.

Les chefs de l’Union des Royaume de l’Ouest réunis pour les besoins du conseil.

Tous ne pouvaient éviter la mort à moins d’arrêter Dadeneph.

La situation se dirigeait actuellement vers la pire issue.

Je dois arrêter ça.

Pour tuer le démon, son noyau interne doit être détruit.

Dans le Labyrinthe des Ombres, face à Dadeneph, des groupes de mages de la taille d’une légion libéraient une magie de gel pour affaiblir la puissance de Dadeneph tandis que des chevaliers équipés de rapières Blankšum détruisaient le corps de Dadeneph pour en trouver le noyau.

Heureusement, cette fois-ci, Desir connaissait l’emplacement approximatif du noyau. Cependant, le problème était qu’il n’avait pas assez de puissance pour pénétrer le corps de Dadeneph lui-même.

Desir a regardé la paume de sa main.

Je dois l’arrêter.

Je vais l’arrêter.

Desir a serré le poing. Il a décidé de mettre en œuvre son atout, la mesure de dernier recours qu’il avait gardée en réserve jusqu’à présent.

[Proverbe]

La magie qui a été arrangée d’une manière qui est entièrement en dehors du système magique existant utilisé par l’humanité.

Elle possède un pouvoir différent de la magie standard.

À la fin du Labyrinthe des Ombres, Desir a découvert le sort en inversant le [Proverbe] du Dragon de la Destruction de rang Météore, Boromir Napolitan.

C’était une magie énorme et puissante en effet. Mais il y avait tellement de risques. Il se demandait si son corps serait capable de résister à la magie du [Proverbe] qui s’écartait des lois existantes, mais ce n’était pas le moment de s’en inquiéter.

Je dois absolument le tuer.

*Booom*

Plus Dadeneph s’approchait, plus la chaleur augmentait et plus les cendres en suspension dans l’air devenaient violentes.

Desir serra les dents.