Chapitre 2198 – Diviser pour Mieux Régner

Traducteur/Checker : Gray

Team : World Novel

Quelques minutes auparavant, Sunny se tenait au bord de l’Île d’Ivoire, regardant le mur lointain de la grande forteresse avec une expression sombre sur le visage. Son incarnation dans le camp de l’Armée du Chant avait aperçu Cassie alors qu’elle était escortée par Seishan et leur étrange cortège de cadavres ambulants…

Mais il les avait perdus de vue une fois qu’elles étaient entrées dans les quartiers de la Reine. Sunny n’était pas assez téméraire pour s’approcher aussi près de Ki Song, il fut donc forcé d’attendre dans une expectative tendue, ne sachant pas à quoi s’attendre.

Cassie était certainement trop précieuse pour qu’on s’en débarrasse rapidement. Elle n’était pas non plus quelqu’un qui se mettrait en danger sans avoir d’échappatoire… son inquiétude n’avait donc probablement aucun sens. Pourtant, il ne pouvait s’empêcher de se sentir mal à l’aise.

Bon sang !

Cassie finit par sortir des lourdes portes et resta plantée devant le bâtiment, figée et silencieuse. Elle avait une coupure fraîche sur la joue, mais ne semblait pas avoir été gravement blessée. L’absence d’escorte était également révélatrice, suggérant qu’elle était parvenue à une sorte d’accord avec la Reine.

Ou que la Reine n’avait tout simplement pas jugé nécessaire de la garder, persuadée que Cassie ne pourrait pas s’échapper.

La communication mentale à laquelle Sunny s’était habitué ne semblait pas fonctionner, aussi voulut-il s’approcher furtivement de la voyante aveugle sous la forme d’une ombre pour échanger quelques mots audibles. Cependant, elle secoua légèrement la tête, ce qui devait être un signal d’éloignement.

Tendu et mécontent, Sunny battit en retraite.

Peu de temps après, le camp de l’Armée du Chant s’anima comme une bête massive se réveillant de son sommeil.

L’agitation soudaine était d’une telle ampleur que même Maître Sunless put voir qu’il se passait quelque chose dans la Forteresse du Grand Croisement, depuis l’Île d’Ivoire.

Il fronça les sourcils.

« Se préparent-ils à battre en retraite ? »

Cassie aurait pu informer Ki Song du plan secret visant à attaquer la forteresse du Petit Croisement par l’arrière — en fait, elle avait une bonne raison de le faire. Si c’était le cas, le principal contingent de l’Armée du Chant servant de garnison au Grand Croisement devrait battre en retraite sous peine d’être coupé du camp de base et encerclé par les forces du Domaine de l’Épée.

Ils pourraient même tenter désespérément de renforcer le Petit Croisement et d’empêcher sa chute…

Mais ce n’était pas ce que Ki Song avait décidé de faire.

Lorsque l’incarnation de Sunny apprit ce que la Reine préparait quelques instants plus tard, il ne put s’empêcher de vaciller un instant.

Maître Sunless ouvrit de grands yeux.

« … Dingue ! »

Tout le monde s’attendait à ce que Ki Song batte en retraite.

Mais contre toute attente, elle décida d’attaquer.

Elle se préparait à abandonner la Forteresse du Grand Croisement et à lancer toutes ses forces disponibles dans une offensive totale, menaçant de briser le contingent principal de l’Armée de l’Épée d’un seul coup.

Pourquoi abandonner l’avantage défensif écrasant de l’Armée du Chant et ordonner à ses soldats d’attaquer, même en sachant à quel point sa position était désespérée ? Était-elle folle ou géniale ?

Sunny sentit soudain des sueurs froides rouler dans son dos.

Avec le recul… pourquoi n’aurait-elle pas attaqué ?

Battre en retraite ne ferait que gagner du temps à l’Armée du Chant — certes, le temps était ce qui leur manquait le plus — mais cela ne changerait pas grand-chose à la situation générale de la guerre.

Cependant, maintenant qu’elle savait qu’Anvil avait secrètement quitté le camp de siège et menait des soldats à travers les Creux, elle savait aussi que le camp de siège n’était pas aussi inaccessible que tout le monde semblait le croire. D’après ce qu’elle savait, le Seigneur des Ombres était également loin.

Le plus grand obstacle sur sa route était donc Nephis.

Nephis avait prouvé qu’elle était une existence impossible parmi ceux de Rang Transcendant, et par conséquent, aucun Saint de l’Armée du Chant ne pouvait la vaincre. Si la Reine voulait détruire le camp de siège, elle devrait se rendre elle-même sur le champ de bataille — ce qu’elle ne pouvait pas faire, pas encore.

Ou plutôt, jusqu’à présent, aucun autre moyen n’avait été trouvé pour supprimer Nephis.

Mais il y en avait un maintenant.

Maudissant, Sunny plongea dans les ombres et en sortit au sommet de la Tour d’Ivoire. Nephis se dirigeait déjà vers le balcon, une expression froide sur le visage.

« Cassie ! Elle est… »

Nephis hocha la tête.

« Je sais. »

Elle s’arrêta un instant près de lui, hésita un peu, puis dit nonchalamment :

« Restez ici, s’il vous plaît. Veillez à ce que votre assistante, Aiko, reste également au Brillant Emporium. Je ne sais pas ce qui va se passer ensuite, mais… ça risque d’être compliqué. »

Sunny se mordit la lèvre, mécontent.

Mais il n’était pas encore temps de se débarrasser du personnage de Maître Sunless. De plus, en cas de désaccord avec lui, il ne serait qu’à un pas. Ses sens pouvaient envelopper tout le champ de bataille, après tout, et une autre de ses incarnations se trouvait de l’autre côté du gouffre.

Il soupira.

« Prenez au moins l’une de mes ombres avec vous. »

Au moment où il prononçait ces mots, l’ombre lugubre se détacha de ses pieds et plongea dans l’ombre de Nephis… avec un air satisfait et suffisant.

Nephis s’attarda un instant, avant de sourire faiblement.

« Merci, Maître Sunless. »

Se penchant en avant, elle déposa un doux baiser sur sa joue, puis se retourna.

Une lumière intense entoura sa mince silhouette, formant l’image de deux ailes incandescentes. Un instant plus tard, elle sauta par-dessus le parapet du balcon et plongea vers le camp de siège de l’Armée de l’Épée.

Laissé seul sous le ciel radieux, Sunny se toucha la joue et regarda au loin.

Un soupir silencieux s’échappa de ses lèvres.

« …Soyez prudente, Dame Nephis. »

Les tambours de guerre battaient, et elle devait mener ses soldats au combat.

Cette bataille n’allait pas être facile, semblait-il.

Pire encore, les batailles qui suivraient n’en seraient que plus difficiles…