6519-chapitre-2125
Chapitre 2125 – Ouvrir la Voie à la Grâce
Traducteur/Checker : Gray
Team : World Novel
Sunny ne put s’empêcher de se crisper après avoir entendu un soupçon de froideur dans le ton habituellement insouciant et amical du squelette.
À cet instant, il réalisa la précarité de sa position avec une clarté douloureuse.
Il était là, dans l’obscurité du Royaume de l’Ombre, blessé et à bout de force… en train de parler à l’un des Neufs tout en maintenant l’ombre d’un autre au sol. Certes, l’archère était à peine consciente et ne semblait pas en état de poursuivre le combat, mais d’un autre côté, un bon ennemi, était un ennemi mort.
Il n’avait aucune idée des pouvoirs que possédait Eurys des Neufs, mais ils devaient être assez mystiques pour que le squelette errant puisse traverser le Monde Souterrain et atteindre le Royaume de l’Ombre plus ou moins en un seul morceau.
C’était inquiétant d’apprendre que le mystérieux Neuf avait une sorte de rancune envers la Déesse de la Vie et ses disciples.
Sunny choisit ses prochains mots avec soin.
« Oh, vraiment ? C’est surprenant. Comment se fait-il qu’Auro des Neufs ait été un soldat impérial ? L’Empire n’était-il pas gouverné par le culte de la Guerre ? »
Pour être honnête, il ne savait pas très bien ce qu’était l’Empire et qui le dirigeait. Cependant, dans son Premier Cauchemar, tant les soldats que les citoyens semblaient vénérer le Dieu de la Guerre — au point de brûler les temples de l’Ombre.
Plus tard, il avait également appris des bribes d’histoire ancienne, dont certaines indiquaient que l’Empire militant s’était lancé dans une conquête effrénée au crépuscule de l’Âge d’Or, juste avant la guerre finale.
Ainsi, ce fut un peu surprenant d’apprendre que Héros — Auro des Neufs — avait secrètement nourri une profonde haine à l’égard du Dieu de la Guerre.
En entendant ses mots, Eurys se contenta de ricaner, apparemment plein d’humour.
« Auro, un soldat impérial ? Et alors ? J’étais moi-même un esclave impérial ! Pourquoi, y a-t-il un meilleur moyen de détruire un empire que de l’intérieur ? »
Sunny toussota.
Lui, plus que quiconque, ne pouvait pas s’opposer à cette idée.
Après tout, c’était exactement ce qu’ils faisaient — Sunny, Nephis et Cassie. Ils travaillaient à affaiblir l’empire d’un héritier de la Guerre en se battant sous sa bannière.
« Bon… d’accord. Ça se tient. Je te l’accorde. »
Les Neufs étaient donc déterminés à détruire l’Empire…
Et Auro prétendait seulement être un soldat impérial loyal. Pas étonnant qu’il ait semblé si différent des autres esclavagistes…
C’était une information alléchante.
Mais tout de même. Dans le Premier Cauchemar de Sunny, Auro n’était qu’un épéiste Éveillé, et un épéiste qui ne semblait pas encore avoir dévoilé son Aspect. Les Neufs ne devaient donc pas être si puissants à l’époque. Comment neuf personnes avaient-elles pu espérer détruire un empire qui jouissait des faveurs d’un dieu ?
Il voulait en savoir plus.
« Donc, vous n’étiez que neuf contre la totalité de l’Empire ? »
Eurys se moqua.
« Des questions, encore des questions, toujours des questions… tu en as plein la tête, mon garçon. Pourquoi t’intéresses-tu tant à ce passé antique, d’ailleurs ? »
Sunny sourit sombrement, se rappelant qu’il devait être poli et s’attirer les faveurs du mystérieux squelette.
« Oh. Deux raisons, principalement… »
Sois gentil, sois poli. Tu dois t’attirer ses bonnes grâces !
Sa bouche bougea d’elle-même :
« Parce que nous payons encore pour les péchés commis par vous, vils bâtards, dans ce passé antique ! Si vous n’étiez pas allés briser le monde à l’époque, je n’aurais pas eu autant envie d’apprendre à le réparer, n’est-ce pas ? »
Eurys se contenta de le fixer en silence, les orbites vides.
Il ne semblait pas trop offensé, mais…
Sunny prit une profonde inspiration et la retint, luttant pour réprimer sa fureur cinglante.
La septième incarnation, quant à elle, prit un ton plus neutre :
« Oh, et aussi — tu ne le sais peut-être pas, mais le Sortilège du Cauchemar sévit depuis des milliers d’années. Aujourd’hui, c’est plus ou moins le seul dieu qui existe. Le Royaume des Rêves, quant à lui, regorge de ce que nous appelons les Graines du Cauchemar, et si quelqu’un entre dans l’une d’entre elles, le Sortilège lui offre une épreuve spéciale. Cette épreuve prend la forme d’un événement du passé antique, si bien qu’en savoir plus sur ce dernier permet de mieux y survivre. »
Il marqua une pause, avant d’ajouter :
« De toute évidence, les Cauchemars sont très meurtriers. On n’a donc aucune raison d’y entrer, si ce n’est que si l’on laisse une Graine fleurie intacte, elle continuera d’infecter le monde avec la Corruption. Quelque chose comme ça, à tout le moins. »
Pour la première fois, Eurys parut un peu surpris.
« Le petit sortilège de Weaver ? Il est devenu si puissant que ça ? Huh… c’est surprenant. Pas étonnant que cette abominable fille empeste le daemon, alors. »
Les yeux de Sunny tressaillirent.
…Petit sortilège ?
Il prit une autre grande inspiration et força son corps d’origine à parler :
« Alors, quoi ? Tu vas me persécuter indûment en raison de mes origines ? Laisse-moi te dire quelque chose, Eurys… »
Il regarda le squelette d’un air sombre.
« …la mesquinerie ne sied pas à un gentleman ! La médisance est une chose hideuse, une tache sur le caractère et un obstacle sur le chemin de la vertu. Un homme éclairé doit savoir se défaire de ses rancunes et embrasser le pardon ! La tolérance et la compassion ouvrent la voie à la grâce ! »
Bien sûr, Sunny n’était pas un gentleman, n’avait aucun intérêt à être vertueux, considérait les valeurs éclairées comme synonymes de bêtise, et préférait rester le plus loin possible de la grâce, de peur de l’attraper.
Mais cela, l’ancien squelette n’avait pas besoin de le savoir.
Eurys resta silencieux un moment, avant de pousser un soupir.
« Oh là là… quelle éloquence ! Ne t’inquiète pas, mon garçon. Je n’avais pas l’intention d’agir en fonction de mon dégoût pour les gens de ton espèce — de toute façon, c’est de l’histoire ancienne. Laissons le passé au passé. Je me disais juste qu’il était profondément ironique qu’après des milliers d’années, les seuls qui restent soient les enfants de la Guerre. Tu ne peux même pas imaginer. »
Sunny sourit.
« Eh bien… je serai capable d’imaginer si tu m’expliques bien les choses. »
Le squelette le regarda en silence pendant un moment.
Après quoi, Eurys s’esclaffa.
« Ah, mais tu as dit à quel point ton besoin de savoir était désespéré. Alors pourquoi devrais-je partager le mien gratuitement ? »