Chapitre 1992 – Destruction Massive

Traducteur/Checker : Gray

Team : World Novel

Ceci pour une bonne raison, bien sûr.

Une raison honteuse et laide, mais une bonne raison quand même. Peu après le début de la deuxième phase de la guerre, les forces des deux Domaines s’étaient efforcées de prendre le contrôle de vastes territoires de Godgrave. L’Armée de l’Épée avait un grand avantage à cet égard, puisqu’elle tenait déjà la Plaine de la Clavicule Est et une grande partie du Passage du Sternum, tandis que l’Armée du Chant était bloquée sur la Plaine de la Clavicule Ouest.

Des expéditions furent lancées pour conquérir les deux dernières Citadelles de Godgrave. Revel menait une expédition dans les ténèbres de l’Océan de l’Épine Dorsale, et un Saint de la branche familiale de Valor menait une expédition concurrente pour s’assurer que Tueuse de Lumières y trouve la mort.

Dans le même temps, Seigneur Gilead s’aventurait vers le sud avec un petit groupe de guerriers d’élite pour revendiquer la Citadelle sur le fémur de la divinité morte — étant donné que le Temple Sans Nom se trouvait entre eux et l’Armée du Chant, son expédition ne rencontrait guère d’opposition. La Reine des Vers avait apparemment décidé de choisir ses batailles et avait complètement abandonné le sud.

Beaucoup de temps s’était écoulé depuis le départ des trois groupes de conquête, mais aucune des Citadelles n’avait encore été conquise… ce qui était très important.

En effet, la conquête des deux dernières Citadelles serait le point culminant de l’autorité que les deux Domaines possédaient à Godgrave. Et une fois que leur autorité n’aurait plus la possibilité de s’étendre, il ne resterait plus rien pour retenir les Souverains.

Ainsi, le Roi des Épées et la Reine des Vers allaient enfin entrer sur le champ de bataille… pour s’affronter et voir lequel d’entre eux hériterait du trône du Royaume Divin de la Guerre.

Lequel des deux tuerait l’autre et s’emparerait de sa couronne.

…Cela ne signifiait pas pour autant que les deux grandes armées n’avaient rien à faire pendant que les conquérants bravaient les terribles profondeurs de Godgrave pour s’emparer des Citadelles. En fait, les simples soldats devaient jouer le rôle le plus important dans cette Guerre des Royaumes.

L’autorité d’un Domaine ne dépendait pas uniquement des Citadelles — comme Sunny l’avait découvert. D’autres facteurs entraient en jeu, comme la force et l’esprit des personnes qui appartenaient au Domaine… et son territoire.

Ce dernier point était particulièrement important, car si les deux Domaines étaient à peu près égaux en termes de population, il y avait de vastes territoires non conquis à Godgrave. Le camp qui parviendrait à en revendiquer une plus grande partie pourrait très bien faire basculer l’équilibre final des forces en sa faveur.

C’est ainsi que les deux grandes armées commencèrent la conquête.

Le processus initial de revendication d’un territoire pour un Domaine était plutôt simple — Sunny avait aidé l’Armée de l’Épée à le faire lors de sa marche vers le Lac Disparu.

Les forces de l’humanité devaient repousser la jungle écarlate, la brûler, massacrer les Créatures du Cauchemar qui la peuplaient — les maîtres originels de cette terre maudite — et construire des forteresses autour des fissures de l’os ancien, empêchant ainsi l’abominable infestation d’étendre à nouveau ses vrilles depuis les Creux.

Cependant, la suite fut plus compliquée et bien plus infâme.

Car après que les forces de l’humanité eurent arraché le contrôle des terres de Godgrave à l’emprise de la Corruption, les humains pouvaient à leur tour se battre entre eux pour ce contrôle.

Et c’est ce qui se passa au cours de la deuxième phase de la guerre.

Les deux armées continuaient à revendiquer de nouveaux territoires en bannissant la jungle écarlate dans les Creux chaque fois que cela était possible, mais elles s’affrontaient également, se battant pour les terres déjà conquises. Les avant-postes d’extermination étaient devenus la monnaie d’échange que les deux Domaines convoitaient, et c’est ainsi que des humains versaient désormais du sang humain à Godgrave.

L’Armée du Chant s’était finalement frayé un chemin jusqu’au Passage du Sternum en menant une offensive sur deux fronts à partir de la Plaine de la Clavicule et de la Première Côte Ouest. La ligne de front était devenue tortueuse et compliquée, certaines forteresses changeant de mains plusieurs fois par semaine.

…Et tout cela était fait par les soldats Éveillés et les officiers Ascendants.

Les champions les plus puissants des deux grandes armées, les Saints, restaient pour la plupart à l’écart.

C’était parce que les Saints étaient trop puissants et trop rares. La perte d’un seul d’entre eux représentait une grande perte pour les Domaines, surtout si le Saint décédé contrôlait une Citadelle, car il n’y avait généralement plus personne pour le remplacer à la tête de celle-ci.

En outre, un seul Transcendant pouvait anéantir un nombre incalculable de soldats. S’ils étaient lâchés sur le champ de bataille, les pertes parmi les guerriers Éveillés seraient trop monstrueuses.

…Ce qui n’empêcherait pas les deux armées d’utiliser leurs Saints comme armes de destruction massive, bien sûr. En fait, c’est ce qu’elles feraient volontiers — plus les combattants ennemis périssaient, mieux c’était.

Cependant, ils en furent dissuadés… par les Saints ennemis.

Les champions Transcendants de l’Armée du Chant surveillaient attentivement les champions Transcendants de l’Armée de l’Épée, et vice-versa.

Nul n’était autorisé à entrer dans la mêlée, à moins qu’un Saint ennemi ne lance une attaque sur les simples soldats, aussi chacun restait-il passif, ne faisant rien.

Les valeureux Saints menaient leurs guerriers au combat, mais restaient en retrait et regardaient les soldats se battre seuls contre l’ennemi, tandis que les Saints ennemis se tenaient de l’autre côté du champ de bataille, agissant de la même manière.

Bien sûr, il y avait des exceptions à la règle, notamment parce que l’Armée du Chant possédait beaucoup plus de champions Transcendants, et que l’Armée de l’Épée avait eu du mal à les contenir. De son côté, l’Armée de l’Épée possédait Étoile Changeante et le Seigneur des Ombres, qui ne pouvaient pas être arrêtés par un ou deux Saints. Ces exceptions étaient rares.

Ainsi, les faibles se battaient et mouraient tandis que les puissants se tenaient à l’écart et regardaient.

C’était une affaire honteuse…

Bien qu’elle ne soit pas du tout différente de la plupart des autres guerres, peut-être.

C’était aussi parfois assez étrange. À un moment donné, par exemple, les Saints du Chant avaient décidé d’organiser une attaque secrète dans la partie du Passage du Sternum que Sunny avait été chargé de surveiller. Il avait dû faire un Pas de l’Ombre au milieu du champ de bataille, invoquer la Chaise de l’Ombre et s’asseoir… puis regarder Traqueuse Silencieuse et d’autres Transcendants se déplacer maladroitement d’un pied à l’autre et grincer des dents, ne voulant pas le provoquer et incapables de faire quoi que ce soit.

Sunny était resté assis jusqu’à la fin de la bataille, sans bouger d’un poil.

Il avait le sentiment que les choses pourraient changer aujourd’hui.

Car si la guerre avait déjà donné lieu à d’innombrables batailles et escarmouches mineures, la bataille d’aujourd’hui était différente.

C’était le premier affrontement à grande échelle entre les deux grandes armées, la plupart de leurs soldats étant présents sur le champ de bataille et participant à l’effusion de sang.

L’ampleur de la bataille était à la fois terrible et intimidante… jamais l’histoire de l’humanité n’avait connu de plus grande bataille.

Sunny était en train de regarder le plus grand crime de l’histoire se commettre sous ses yeux.

…Enfin, peut-être pas. Les humains du monde réel, les enfants de la Guerre, avaient commis bien des atrocités pendant les Temps Sombres, après tout, et bien d’autres avant cela.

Rien n’avait vraiment changé depuis, si ce n’est que les soldats humains disposaient désormais de pouvoirs bien plus importants.

Dans le chaos indescriptible de leur affrontement cataclysmique, tout pouvait arriver.

Il doutait que les Saints soient contraints de rester inactifs jusqu’à la fin.