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5939-chapitre-1

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C’était un pays tranquille, entouré de montagnes escarpées et inaccessibles, et caché derrière de hautes murailles. Personne du monde extérieur ne pouvait le visiter.

Au-dessus d’une paroi rocheuse scintillant de chaleur sous la lumière éclatante du soleil, un balai solitaire s’élevait dans l’air chaud. La personne qui le guidait était une magnifique jeune fille. Elle portait une robe noire et un chapeau pointu, et ses cheveux cendrés claquaient au vent. Si quelqu’un l’avait remarquée, il se serait retourné pour la regarder, se demandant avec un soupir qui pouvait bien être cette beauté sur le balai…

Eh oui, cette beauté c’est moi.

Ah, c’était une blague. “…J’y suis presque.”

La haute muraille semblait avoir été taillée dans la montagne elle-même. En jetant un coup d’œil vers le bas, j’aperçus la porte et dirigeai mon balai dans sa direction.

Il avait fallu de sérieux efforts pour arriver dans ce pays, mais je suppose que les gens qui vivaient ici l’avaient prévu ainsi pour empêcher les gens d’y entrer par erreur. Après tout, personne ne viendrait jusqu’ici sans une très bonne raison.

Je descendis de mon balai juste devant la porte. Une sentinelle locale, apparemment chargée de l’inspection des services d’immigration, s’avança à ma rencontre.

Après m’avoir regardé lentement de la tête aux pieds et avoir examiné la broche que j’avais sur la poitrine, il sourit joyeusement.

“Bienvenue au Pays des Mages. Par ici, Madame la Sorcière.”

“Hmm ? Vous n’avez pas besoin de vérifier si je peux faire de la magie ou non ?”

J’avais entendu dire que toute personne visitant ce pays devait prouver ses capacités magiques pour y entrer ; toute personne ne remplissant pas certaines conditions serait refoulée.

“Je vous ai vu arriver en volant. Et puis, la broche que vous portez signifie que vous êtes une sorcière. Alors s’il vous plaît, allez-y.”

Ah oui, c’est vrai. Savoir voler sur un balai est l’une des conditions minimum pour être admis. Bien sûr, ils ont pu voir mon approche depuis la guérite. Comme je suis idiote !

Après m’être légèrement incliné devant le garde, j’ai franchi l’imposante porte. Voici le pays des mages. Les novices en magie, les apprentis et les sorciers accomplies-tout le monde avait le droit d’entrer dans ce curieux pays tant qu’ils étaient capables d’utiliser la magie, tandis que tous les autres étaient refoulés.

Alors que je franchissais l’immense porte, deux étranges panneaux placés côte à côte attirèrent mon attention. Je les regardai avec confusion.

Le premier panneau représentait un mage chevauchant un balai, entouré d’un cercle. Le panneau à côté montrait l’image d’un soldat marchant, entouré d’un triangle.

C’est quoi ces pancartes ?

J’ai connu la réponse dès que j’ai levé les yeux—au-dessus des maisons de briques bondées et sous le soleil étincelant, des mages de toutes sortes sillonnaient le ciel dans toutes les directions.

Je vois. Ce doit être une règle dans les pays où seuls les mages ont le droit d’entrer—La plupart d’entre eux volent sur un balai, donc peu de gens choisissent de marcher.

Satisfaite de mon explication des panneaux, je sortis mon balai et m’assis dessus de côté. D’une poussée sur le sol, je me suis mis à flotter doucement dans les airs, donnant ainsi une démonstration en direct du panneau.

“voler est donc le mode de transport préféré ici, hein ?”

Et ainsi j’ai vu le pays des mages tel qu’il était censé être vu. Au-dessus des toits brun-rouge qui s’étendaient comme autant de terre sèche, des mages flottaient dans les airs. Certains avaient arrêté leur balai pour discuter amicalement, d’autres passaient avec des paquets de bagages attachés à leur balai. Ils y’avaient des vieilles femmes à l’air suspicieux et sorcier, ainsi que des enfants qui coursaient dans le ciel, rivalisant pour savoir qui volerait le plus haut.

Ces gens doivent vivre toute leur vie dans les airs.

C’était une scène vraiment merveilleuse. J’en avais presque le souffle coupé.

J’ai rejoint leurs rangs, planant au-dessus du pays, m’abandonnant sans but au flux du trafic aérien qui m’entourait. Soudain, une enseigne fixée au sommet de l’un des toits a attiré mon attention. Il s’agissait apparemment d’une AUBERGE. Je la dépassai sans m’arrêter et vis ensuite le mot ÉPICERIE. Il y en avait d’autres : BOUCHERIE et même BIJOUTERIE. Comme je le soupçonnais, la vie ici se déroulait au-dessus des toits, et placer ses enseignes au sommet du toit devait être une pratique courante.

En regardant autour de moi, j’ai vu que les toits de la plupart des maisons étaient dotés d’une fenêtre suffisamment grande pour permettre à une personne de passer à travers. Alors que je regardais distraitement, l’une de ces fenêtres s’est ouverte et un homme monté sur un balai en est sorti.

C’est donc à cela qu’elles servent.

Je volais à un rythme tranquille, admirant lentement le paysage, jusqu’à ce que—”Ahhhhhhhhhhhhhhh !”—un cri retentisse derrière moi. En stabilisant mon balai d’une main, j’ai tenu mon chapeau pour qu’il ne s’envole pas et je me suis retournée.

Ah, trop tard.

“Ahhhhhhhhhh !”

Fonçant directement sur moi à une vitesse effarante, telle une météorite hurlante traînant une queue de larmes, la personne en question n’était déjà plus qu’à un toit de moi lorsque je l’ai aperçue.

Esquiver ? Impossible.

Par réflexe, j’ai détourné le haut de mon corps, mais je n’ai pas pu éviter la collision. Avec une série de grognements (“Ugya !” “Geh”), nous nous sommes emmêlés et nous nous sommes écrasés sur le toit en contrebas. Les tuiles bien alignées se sont détachées avec fracas, et nous nous sommes finalement arrêtés juste avant de tomber du bord du toit. J’ai vu une tuile seule rebondir sur le sol en dessous. Dieu merci, il n’y avait pas de piétons.

L’angle était superficiel et j’avais évité une collision directe avec le sol. En plus, l’étrange personne qui était entrée en collision avec moi avait pris le plus gros de l’atterrissage, donc heureusement je n’étais pas blessée.

Je me suis levé en brossant les quelques tessons de toiture brun-rouge qui étaient collés à ma robe noire.

“……” “Urggggh…”

L’adolescente qui gémissait et regardait autour d’elle, hébétée, semblait être à peine plus jeune que moi. Ses cheveux noirs étaient coupés courts et réguliers tout autour, et elle avait un visage androgyne. Elle portait un chemisier blanc et une jupe à carreaux sous un manteau noir, tous deux en grand désordre après qu’elle se soit retrouvée en dessous de moi.

Elle ne porte pas de broche ou quoi que ce soit sur sa poitrine, elle doit donc être novice.

“…Hum, tu vas bien ?”

Quand j’ai touché l’épaule de la fille tombée, elle a ouvert les yeux. “……”

“……”

Elle est restée silencieuse.

On aurait dit qu’elle avait encore du mal à comprendre la situation, alors j’ai osé : “Tu as du mal à diriger ton balai ?”

Oui, j’admets que j’étais un peu sarcastique. “…Ah.”

“On dirait que tu as enfin retrouvé tes esprits”, dis-je en souriant. “Ahhhh !” Elle regarda à nouveau autour d’elle. “Qu-Qu-Qu’est-ce que je fais ? Qu’est-ce que je fais ? Je ne pourrai jamais réparer autant de tuiles…”

Hé, dis donc… “Que dirais-tu de t’excuser d’abord ?”

“Ah, dé-désolé ! Je ne l’ai pas fait exprès ! Vraiment !”

Ça, je le savais. “Quoi qu’il en soit, tu vas bien ? Tu as déboulé comme un ouragan.”

“Oh, je vais bien ! Je suis en pleine forme, tu vois ?!” a dit la fille, alors que de petits ruisseaux rouges coulent de sa tête.

Ses yeux étaient clairs et elle ne rencontrait aucune difficulté à parler.

……

“tu saignes. De la tête.”

“C’est juste de la sueur !”

“Est-ce que ta sueur sent toujours le fer ?”

“Hum, eh bien, hum… C’est de la sueur !”

“Ok, j’ai compris, alors calme-toi un peu.”

“Oui, m’dame !”

“……”

Je ne sais pas trop pourquoi, mais je me sens déjà épuisé. Peut-être que c’est à cause de la collision.

J’avais prévu d’obliger la fille à réparer les tuiles cassées après une bonne réprimande, mais c’en était assez. Elle était déjà mal en point ; la forcer à réparer le toit dans cet état serait tout simplement sans cœur. Au lieu de cela, j’ai sorti mon mouchoir de ma poche.

“Tiens, prends ça. Appuie-le sur ta tête.”

“Oh… mais…”

“Je vais aussi remettre les tuiles en place, alors vas te reposer là-bas, s’il te plaît.”

“Non, je vais t’aider aussi !”

“Dans ton état, si tu essayais d’aider, tu ne ferais que gêner. Va te reposer”, je lui ai dit sans détour.

“Mais—”

“Tu. Es. Sur. Mon. Chemin. ”

“…D’accord. ”

Comme un chat errant, la jeune fille déprimée s’assit sur le sommet du toit et pressa le mouchoir contre sa blessure à la tête. Aussi énergique qu’elle ait pu paraître, il était clair qu’elle s’était un peu trop poussée. Dès qu’elle s’est assise, elle s’est affaissée et s’est effondrée.

Je peux attendre un peu avant de m’occuper d’elle. Ce n’est pas comme si elle allait mourir de sa blessure ou quoi que ce soit d’autre. D’abord, faisons quelque chose pour ce désastre…

J’ai rassemblé de l’énergie magique dans mes mains. Instantanément, une longue et fine baguette est apparue dans ma main, accompagnée d’une faible lueur.

C’était le privilège spécial des mages. Nous sommes capables de produire n’importe quoi—par exemple, des baguettes, des balais et d’autres outils magiques—à partir de rien.

J’ai canalisé de l’énergie dans ma baguette et me mis au travail. Il s’agissait d’un sort d’inversion du temps.

Comme son nom l’indique, il s’agit d’un type de magie qui permet de réparer les objets cassés et de guérir les blessures en inversant le cours du temps. Cela demande des capacités magiques un peu plus poussées, mais n’importe quel sorcier vivant dans ce pays devrait être capable de l’exécuter. Je suis sûr que cela aurait été difficile pour la petite novice qui se trouvait derrière moi cependant.

Je m’approchai de la fille, qui se redressa nerveusement en se tenant la tête, et j’appliquai le sort. Sous la douce lumière, ses vêtements en lambeaux se sont raccommodés et ses blessures ont guéri instantanément.

“Whoa… ” Je pouvais l’entendre marmonner.

Ce n’est rien d’impressionnant pourtant. Une fois qu’on est devenu sorcière, ce genre de choses est un jeu d’enfant.

Après m’être assuré qu’elle était en bonne santé, je me suis empressé de ramasser les balais qui étaient tombés sur le toit. J’ai décidé que c’était probablement une bonne idée de sortir de là avant de faire plus de scène.

“Oh, hum !”

La fille avait apparemment d’autres choses à me dire, mais j’ai passé une jambe par-dessus mon balai, l’ignorant à moitié.

“Tu n’as pas besoin de t’excuser. N’oublie pas de regarder où tu vas quand tu voles sur ton balai, d’accord ?”

“S’il te plaît, attends, je dois faire quelque chose pour me rattraper de—”

“Ce n’est pas la peine. Je suis pressé. Au revoir, novice sans nom. ”

Et ainsi, je suis remonté sur mon balai et je me suis envolé.

Tout humain capable d’utiliser la magie commence sa formation en tant que novice. Tout le monde ne peut pas devenir novice, et dans la plupart des cas, la capacité est transmise par le sang. Mes parents étaient eux aussi des novices.

Les apprenties sorcières se situent au-dessus des novices, mais à un niveau inférieur à celui des sorcières à part entière. Comme son nom l’indique, le titre de « sorcière » ne s’applique qu’aux filles et aux femmes. Je ne sais pas pourquoi, mais les femmes ont naturellement de plus grandes capacités magiques que les hommes. C’est pourquoi seules les femmes peuvent atteindre un rang supérieur à celui de novice.

Il n’y a qu’une seule façon de devenir apprenti : passer les examens de magie et recevoir le corsage qui prouve votre statut. Il n’y a pas d’autre méthode. Cependant, les examens sont brutaux et beaucoup abandonnent avant la fin.

Une fois devenue apprentie sorcière, il faut suivre une formation très spécifique pour obtenir le titre de « sorcière ». Cela signifie de longues journées de travail acharné sous l’œil vigilant d’une sorcière authentique, jusqu’à ce que l’apprentie obtienne enfin son approbation. La formation peut durer une journée ou dix ans. Tout dépend des efforts de l’apprentie et de la sorcière qui lui sert de professeur.

Lorsqu’une personne est officiellement reconnue comme sorcière, elle reçoit une broche en forme d’étoile avec son nom gravé au dos, et son professeur lui donne un titre de sorcière. Le mien est « la sorcière cendrée ».

C’était une explication assez longue, mais ce que je veux dire, c’est qu’en tant que sorcière accomplie, j’aurais dû me classer parmi les meilleurs utilisateurs de magie de ce pays. Je m’attendais à ce que les gens me regardent avec envie lorsque je volais dans le ciel, à ce que, lorsque j’allais au restaurant, ils me disent : « Madame la sorcière ! Permettez-moi de vous offrir une réduction sur tout le menu ! Mangez à votre faim ! » et ainsi de suite, mais…

“Hein ? Une remise ? Nous ne faisons rien de tel. Vous voulez dire que vous n’avez pas d’argent, jeune fille ?”

“……”

Alors c’est comme ça, hmm ? Je suppose que si le restaurant accordait un traitement spécial à chaque sorcière, il ferait faillite.

J’ai quitté le restaurant et je suis allée chez le bijoutier. Je voulais vendre un bijou que j’avais ramassé dans l’un des pays que j’avais visités avant celui-ci, et j’en attendais une somme considérable.

“Ah, c’est une totale contrefaçon, v’voyez ? Je ne peux rien vous donner pour ça.”

“Il y a sûrement eu une erreur. Regardez de plus près, s’il vous plaît.”

“Je peux regarder autant qu’vous voulez, mais la réponse sera la même. Vous v’lez en faire quoi ? Si vous n’en avez pas besoin, je peux m’en débarrasser pour vous… ”

“…On sonne comme si vous aviez l’intention de me le voler, n’est-ce pas ?”

“Bien sûr que non, ma jolie ! J’vous ferais jamais ça. Alors qu’est-ce que ce sera ?”

“Rendez-le-moi.”

Quand j’ai quitté la bijouterie, j’étais d’une humeur massacrante.

Je suis sûr que le propriétaire de cette bijouterie est juste un peu malhonnête, c’est tout. Ce n’est pas comme s’il me traitait avec mépris, pas vrai ? …hein ?

Mal à l’aise, je me suis dirigé vers une auberge. La journée touchait à sa fin.

Cependant—

“Hé. Ce n’est pas un endroit pour les enfants comme toi. Allez, filez.”

…Huuuh ? je vous demande pardon ? Est-ce une sorte d’hôtel de luxe réservé aux riches ? Hmm… De toute façon, je ne reste pas ici. Allons ailleurs.

J’ai sauté de mon balai au sommet d’une auberge très bon marché à l’enseigne en lambeaux.

Cet endroit ne va sûrement pas me refuser l’entrée.

J’ouvris la fenêtre sur le toit et descendis l’échelle qui menait à l’intérieur.

Mais à mi-chemin, je n’en pouvais plus, donc j’ai sauté.

Thud. Le son a résonné dans le bâtiment comme un boulet de canon.

Hé, je ne suis pas si lourde. Quelle impolitesse.

J’étais tombé dans la zone de réception.

La fille assise derrière le comptoir m’a regardé. “Bienve—” Elle s’est raidie.

Moi aussi.

Elle avait de courts cheveux noirs. Des traits androgynes et garçonnets.

Assise devant moi, il y avait la fille qui m’avait (littéralement) percuté quelques heures plus tôt.

“……”

“……”

Elle fut la première à s’extirper de ce moment figé dans le temps.

“E-eeeeeek ! Je suis dé-dé-désolé ! Je suis désolée ! Tu es là pour te venger ? C’est une vengeance, n’est-ce pas ? ! Je suis désolé ! Épargne ma vie ! Epargne moiiii !”

“Non, euh…”

“Waaaaaah ! J’veux pas mouriiiiiirr !”

“Um…” Pas besoin d’être hystérique, sérieux.

Elle écrasait sa tête contre le comptoir et sanglotait. “Epargne juste ma viiiiie…”

Je lui ai légèrement touché l’épaule.

“Eek ! Tu vas me déchirer membre par membre ? Tu t’en prends d’abord à mon épaule ? Noooooon !”

Pourrais-tu, s’il te plaît, te taire une seconde ? —Attends, non, ne dis pas ça à haute voix.

“Euh, c’est bon ? Je suis juste venu pour rester dans cette auberge ce soir.”

“Nooooo—Oh, c’est tout ? Dans ce cas, remplis ce formulaire s’il te plait”

“……”

J’aurais aimé dire plusieurs choses, mais je me suis abstenu.

La relancer serait trop difficile à supporter actuellement.

Je lui ai pris le formulaire et j’ai pris une plume d’oie sur le comptoir. C’était un document basique, qui demandait simplement le nombre de personnes et le nombre de nuits, ainsi que le nom d’un représentant. En tant que voyageur expérimenté, je m’étais rapidement habitué à ce genre de formulaires.

Alors que je faisais glisser la plume sur le papier, la jeune fille a pris la parole d’une voix très claire. “Je suis vraiment désolée pour ce qui s’est passé cet après-midi. Chaque fois que mon esprit s’égare pendant l’entraînement, il semble que je perde la capacité de diriger le balai…”

“Je vois.” En d’autres termes, tu es une mauvaise pilote.

“Je voulais vraiment te remercier, mais tu es parti trop vite— Ah, tu t’appelles Elaina. Moi, c’est Saya.” Elle me sourit joyeusement en me regardant écrire.

“Tu n’as pas vraiment besoin de me remercier”, répondis-je en continuant à remplir le formulaire.

“D’ailleurs, beaucoup de gens s’emmêlent les pinceaux avec d’autres personnes lorsqu’ils pratiquent la magie.”

En y repensant, j’ai un jour mis le feu à ma maison en essayant d’allumer une bougie. Mes parents m’ont vraiment sermonné pour ça. Oh, la jeunesse une fois encore…

“Mais tu ne me laisses pas faire quelque chose pour toi ? Je t’ai causé tous ces ennuis et tu as même soigné mes blessures. Je détesterais laisser les choses telles qu’elles sont.”

“Vraiment, Ça va vraiment, mais…”

“Tout est possible ! S’il te plaît ! Mademoiselle Elaina !”

J’ai secoué la tête pendant que la fille me suppliait de la laisser me rembourser. Je suis sûre que cela aurait été étrange à regarder.

Eh bien, ce n’est pas comme si elle me demandait de faire des pieds et des mains pour elle, alors ce n’est pas la peine de m’acharner. J’y ai un peu réfléchi en écrivant.

“Hmm…alors, dans ce cas—” Et si je te demandais de me faire une réduction sur la chambre ? J’étais sur le point de demander, mais je me suis arrêtée.

Un élément du formulaire avait attiré mon attention. « RÉDUCTION SPÉCIALE POUR LES SORCIÈRES (DEMI-TARIF POUR UNE NUIT) » on pouvait lire.

Oh-ho ! Qu’avons-nous là ?

“Ah, cette réduction ne s’applique pas aux personnes qui ne sont pas des sorcières. Les mages ordinaires doivent encercler l’option du prix normal”, dit-elle en fronçant les sourcils. “Je vois.” J’ai entouré « RÉDUCTION SPÉCIALE POUR LES SORCIÈRES (DEMI-TARIF POUR UNE NUIT) »

“Eh ? Non, um… Huh ?”

C’est quoi cette réaction bizarre ? Sheesh, si grossière.

“Je suis une sorcière, alors…”

“Allez, tu ne peux pas plaisanter avec ça… Oh, bon, mais je t’ai causé un tas d’ennuis… D’accord ! Je vais appliquer la réduction !” Elle a tapé une fois dans ses mains.

J’avais l’impression que nous étions en plein décalage, ce qui me rendait nerveuse. J’ai secoué la tête. “Non, non, non, ce n’est pas ça. Tu vois, je suis une sorcière. Tu ne vois pas comment je suis habillée ?”

“Hein ?” dit-elle en montrant ma poitrine. “Mais tu n’as pas de broche de sorcière.”

“Je te demande pardon ?”

Suivant son doigt, j’ai baissé les yeux sur ma propre poitrine. La broche qui y était accrochée avait disparu.

Dans un sens, la broche d’une sorcière est son identification. Sans elle, je n’étais qu’une voyageuse capable d’utiliser la magie.

C’est sans doute pour cela que la dernière auberge m’a traitée comme une petite enfant. Je vois, je vois. Mais comment ai-je pu me rendre compte seulement maintenant qu’elle avait disparu ? Les sorcières ne sont pas si rares, et si j’avais été un peu plus sceptique, j’aurais pu faire quelque chose plus tôt. Suis-je vraiment une idiote ? Ugh, va te faire foutre, Elaina !

Tout en me maudissant et en me jurant dessus, je cherchais frénétiquement la broche. “…Elle a disparu.”

Elle était introuvable.

J’ai dû la faire tomber lors de la collision entre Saya et moi, mais il faisait déjà complètement noir dehors. La broche était assez petite pour tenir dans la paume de ma main… pas vraiment le genre de chose que je pourrais trouver just en tâtonnant dans le noir.

“…Ugh.”

Après avoir parcouru le toit en zigzag et examiné toutes les fissures entre les tuiles, je suis descendu au niveau du sol et j’ai cherché tout autour de la maison. Mais bien sûr, pas de chance.

Je vais pleurer.

“Je n’ai rien trouvé !! Mlle Elaina, ce n’est pas non plus par ici !!” Une voix odieusement forte est venue du toit, se répercutant dans la ruelle. Quand j’ai levé les yeux, j’ai vu Saya illuminée par la lumière de la lune.

Juste après que nous ayons découvert la disparition de la broche, elle avait dit “C’est aussi ma faute, alors je viens avec toi !” et avait insisté pour se joindre à moi dans ma recherche. Elle avait laissé un autre responsable à l’auberge ou quelque chose comme ça, je suppose. Pendant que je me promenais en bas, je l’avais laissée prendre le toit, au cas où j’aurais manqué quelque chose. Mais apparemment, elle n’avait pas fait mieux.

J’ai flotté à côté d’elle sur mon balai.

“Nous avons fait des recherches approfondies et la broche n’est pas là. Nous devons envisager la possibilité que quelqu’un l’ait ramassée…” j’ai poussé un profond soupir.

“Je pense aussi que ça va être difficile de la trouver parce qu’il fait sombre dehors”, a dit Saya. “Il serait preferable de chercher à nouveau ici demain matin.”

Sa voix était encourageante, même si mes épaules étaient affaissées par la déception. J’étais un peu reconnaissante de son optimisme.

“C’est ce que je vais faire…” J’acquiesçai docilement à sa suggestion et me tournai vers l’auberge.

Volant de façon instable sur mon balai, je devais avoir l’air d’une simple apprentie sorcière qui apprenait encore à se diriger.

Ah, si quelqu’un s’approchait de moi, je risquerais d’entrer en collision avec lui.

J’avais traversé beaucoup d’épreuves pour obtenir cette broche, et elle contenait beaucoup de souvenirs du temps passé avec mon professeur. La perdre était une pilule amère à avaler.

Si je l’avais perdue lorsque je suis devenue sorcière, je suis sûre que je l’aurais remarqué tout de suite. Mais après l’avoir porté tous les jours pendant deux ans, j’étais probablement devenue trop habituée à l’avoir toujours sur moi.

“…Soupir.”

C’était déprimant.

Après la recherche, je suis retourné à l’auberge et j’ai dîné, puis je suis entré dans ma chambre en utilisant la clé que j’avais reçue de Saya, je me suis souvenu que je n’avais pas encore pris de bain et je me suis dirigé directement vers la grande salle de bain à la place.

J’ai trempé dans l’eau chaude pendant une heure entière, tandis que mes pensées vagabondaient.

Ah, j’ai dû la faire tomber quand je suis entré en collision avec Saya… mais elle n’était pas là… Comme c’est mystérieux…

Je me suis étiré presque complètement et j’ai rempli la grande baignoire (j’étais seule). Puis, juste avant de fondre dans l’eau chaude, j’ai redressé mon corps lourd.

Et puis je suis retourné dans ma chambre… “Ah, bonjour—”

…et j’ai trouvé Saya à l’intérieur.

J’ai fermé la porte. J’ai fait un pas en arrière et j’ai vérifié le numéro de la chambre. Ouaip, ça correspond au numéro écrit sur la clé. C’est étrange. Peut-être que je voyais des choses ?

J’ai ouvert la porte à nouveau. “Ah, bonjour—”

Si seulement c’était un mauvais rêve… Mais hélas, il n’y avait pas d’erreur possible : Saya était dans ma chambre, me faisant un signe insouciant du haut du lit dur.

……

“…Que fais-tu dans ma chambre ?” Je fermai la porte avec une main dans le dos.

“Je voulais te parler, Elaina, alors je t’ai attendue ici.” “Je croyais avoir fermé la porte à clé.”

“C’est le cas, bien sûr ! Mais je travaille ici !” Elle a fièrement sorti un trousseau avec un grand nombre de clés.

Je me suis approché d’elle sans un mot et je lui ai attrapé les deux joues. “Ow, za fait moille ! Za fait moille!”

“C’est quelle genre d’idée de génie d’entrer dans la chambre d’une personne sans sa permission ? Hein ?”

J’ai tiré fort sur ses joues.

“Eilles zont ze déhihé ! sé en tain dze dérirer moué joues !” Elles vont se déchirer, tu es en train de déchirer mes joues, c’est ce qu’elle semblait vouloir dire.

“Hmm ? comment ça ? Je ne t’entends pas.”

“Waaaaaah…”

J’ai tiré et tordu ses tendres joues jusqu’à ce que je sois satisfaite puis l’ai relâchée.

Massant ses joues légèrement rouges avec ses deux mains, Saya marmonna : “C’était méchant…” Mais vraiment, laquelle de nous deux avait tort ?

“Bon, qu’est-ce que tu voulais ? Tu as pris la peine d’attendre dans ma chambre, alors tu dois bien avoir une raison, non ?”

Toujours en train de se masser le visage, Saya dit : “Mlle Elaina, vous êtes vraiment une sorcière, n’est-ce pas ? ”

“ouais,” j’ai confirmé “bon, je n’ai pas ma broche pour le moment, mais oui, j’en suis une.”

“Alors ça veut dire que tu as réussi l’examen de magie, n’est-ce pas ?” “En effet.”

Même maintenant, je me souviens à quel point j’ai été déçue par l’absence de défi. Saya m’a fixé pendant un moment, puis elle est descendue du lit et s’est agenouillée. Elle a ensuite posé ses deux mains sur le sol et a appuyé son front contre le sol.

“S’il vous plaît, aidez-moi ! Apprenez-moi les secrets pour réussir l’examen, s’il vous plaît !”

“…Hum, qu’est-ce que tu fais sur le sol comme ça ?”

“C’est la façon traditionnelle de se prosterner dans ma ville natale ! C’est une technique infaillible utilisée lorsque vous avez fait quelque chose d’impardonnable à l’autre partie.”

Quelle étrange tradition… Les habitants de sa ville natale doivent-ils s’excuser aussi souvent ? N’empeche, on peut vraiment sentir la sincérité.

Mais cela m’a donné ce… quel est le mot ? Un sentiment étrange ? Effrayant, même ?

J’ai réprimé l’envie de dire : « Huuuh ? Tu crois que c’est tout ce qu’il faut pour demander une telle faveur ? » Je me suis agenouillé à côté d’elle.

“Hum, enlève juste ta tête du sol pour l’instant.”

“Vous allez le faire ? !” Elle m’a regardé fixement.

“Du calme”, je lui ai dit. “D’abord, parlez-moi de votre situation.”

Elle m’a raconté.

Je l’ai laissée s’asseoir sur le lit, j’ai sorti la chaise bon marché du bureau et je me suis assise en face d’elle. Saya secoua légèrement ses cheveux noirs et pencha la tête, puis ouvrit la bouche avec hésitation.

“Hum… donc j’ai une petite sœur. Elle est très mignonne.”

“D’accord…” C’est une façon plutôt bizarre de commencer, mais je me suis déjà engagée.

“Nous venons d’un pays très à l’est. Ma sœur et moi avons fait tout ce chemin pour devenir apprenties sorcières-il n’y a pas d’organisations qui proposent des examens dans notre ville natale. Nous avons donc travaillé toutes les deux dans cette auberge et économisé de l’argent tout en étudiant pour les examens. Nous avons vécu ainsi pendant plusieurs années, mais…”

“Mais vous n’êtes encore que des novices ?”

Elle baissa les yeux et secoua lentement la tête. “Seule ma sœur a passé les derniers examens. Et elle est rentrée chez nous. Sans moi.”

“…Hmm.” Je vois, je vois. Je pense que je sais où cela va nous mener. En d’autres termes…

“Ta mignonne petite sœur t’a surpassé, et tu es devenu si impatiente que tu as décidé de faire appel à une sorcière que tu viens tout juste de rencontrer—dans un accident, pourrais-je ajouter—pour t’aider à passer tes examens ? C’est ça ?”

Se grattant la joue en signe d’embarras, Saya marmonna, “Eh bien, hum…c’est…oui, plus ou moins.”

“Alors, c’est quand le prochain examen ?”

“Dans une semaine… Je n’ai pas beaucoup de temps…”

Tu as déjà passé plusieurs fois les examens d’avancement, donc je ne pense pas qu’il y ait lieu de paniquer. Mais ça t’inquiète probablement beaucoup, parce que tu veux revoir ta sœur.

“……”

Rompant le silence, j’ai pris la parole. “Je t’aiderai le temps qu’il me faudra pour retrouver ma broche.”

De toute façon, je ne pouvais pas quitter le pays tant que je n’avais pas trouvé ma broche, et je n’aurais rien à faire quand je ne chercherais pas. Elle me laisserait même probablement loger gratuitement à l’auberge, alors j’ai pensé que c’était une bonne idée.

Afin d’être promu au niveau d’apprenti sorcier, il faut passer un examen écrit, puis un examen pratique sur les compétences magiques.

L’examen écrit est simple et, pour peu que l’on ait appris la théorie de la magie, l’histoire et d’autres matières, il n’y a rien de plus facile, vraiment. Mais il y a ensuite l’examen pratique. Impossible d’y échapper : sans réelles aptitudes, il faudra le repasser encore et encore.

Quant au contenu de l’examen pratique, il porte principalement sur deux compétences : votre capacité à maîtriser un balai et votre façon de gérer la magie offensive. Chaque fois que l’examen a lieu, une seule personne peut le réussir. L’examen qui aura lieu dans une semaine ne sera pas différent. Sillonnant le ciel sur son balai, chaque aspirante sorcière attaquera les autres, essayant de vaincre ses adversaires tout en se protégeant. La dernière en liste réussira l’examen et sera déclarée publiquement apprentie sorcière.

Les batailles étaient toujours violentes et difficiles à regarder. Les aspects les plus méchants de la nature humaine semblaient toujours être mis en évidence. Je ne voudrais jamais passer l’examen une seconde fois.

“Je dois te le dire honnêtement, Saya. Avec les capacités que tu possèdes en ce moment, peu importe l’ardeur que tu mets à te battre, les chances que tu puisses gagner contre les autres candidats sont proches de zéro”, dis-je du haut de mon balai.

Il était tôt le matin, le lendemain du jour où j’avais promis de l’aider.

“Cependant, proche de zéro ne veut pas dire zéro absolu. Rassure-toi.”

“Qu-qu’est-ce que je dois faire ?!” Elle était énergique, même au petit matin, et ses yeux brillaient d’excitation. Elle était aussi radieuse que le soleil du matin.

J’ai dirigé mon balai vers l’endroit où elle était assise sur le toit de tuiles, les genoux repliés sous elle. “D’abord, je vais t’apprendre à contrôler ton balai au moins aussi bien que moi, si ce n’est mieux.

“Aw… Ça me semble un peu dur…” Elle fronça le nez.

Dur ? J’y vais doucement avec toi.

“Il n’y a pas d’autre moyen de se maintenir à niveau pendant l’examen de compétences pratiques. Si tu te présentes à l’examen avec ton niveau de compétences actuel, tu tomberas probablement au moment où l’examen commencera et tu gaspilleras une autre chance. Tu dois au moins éviter cela.”

“Rgh…”

Alors voilà où on en est.

Tout d’abord, je l’ai mise au travail pour qu’elle améliore ses compétences magiques les plus élémentaires. Comme je l’avais imaginé, Saya pouvait à peine voler. (C’était si mauvais que j’étais prête à me demander si je devais même l’appeler une mage). Je devais vraiment la mettre à l’épreuve.

Ah, voilà donc ce que ressentent les mères qui apprennent à leurs enfants à voler sur un balai…

Nous nous sommes entraînés du matin au soir, aussi longtemps que la journée le permettait. Nous avons persévéré dans notre cours intensif même lorsque les enfants du voisinage qui volaient librement autour de nous ont commencé à ricaner et à pointer du doigt.

Naturellement, je n’avais pas oublié de chercher ma broche. Saya s’était progressivement améliorée, mais je n’avais fait aucun progrès.

Sérieusement, où est donc passée ma broche ?

“L’étape suivante consiste à pivoter. Déplace doucement le poids de ton corps et tourne rapidement, s’il te plaît.”

“D’accord !”

“Ensuite, il y a le freinage d’urgence et la montée en vitesse. Utilise tout le poids de ton corps et tire fort sur le balai pour l’arrêter, puis fonce vers l’avant comme si tu donnais un coup de pied dans le ciel.”

“D’accord !”

“Ensuite, il y a la descente en pleine l’air. Après avoir lâché le balai en plein vol, utilise la magie pour le rappeler. Je t’aiderai si tu as des problèmes, alors ne t’inquiète pas et contente-toi de voler.”

“D’accord !”

“La suite, c’est…” ok, tu as compris l’idée.

En fin de compte, Saya a rapidement appris à contrôler son balai presque aussi bien que moi. Combien de jours lui a-t-il fallu pour atteindre ce niveau ? Seulement deux ! J’ai réussi à obtenir d’elle des progrès étonnants. C’est à se demander ce qu’elle faisait avant… ou peut-être est-ce mon enseignement qui est si bon ?

Lorsque je lui ai posé la question, Saya m’a répondu timidement : “Jusqu’à présent, je n’ai fait qu’étudier seule.”

He bien, voilà ton problème.

C’était le quatrième jour de mon séjour dans ce pays—et le troisième jour de notre entraînement intensif. Contrairement à la recherche de ma broche, qui n’avait pas avancé (bien que je me sois simplement renseigné aux alentours), l’éducation de Saya progressait rapidement et ne semblait pas prête de s’arrêter.

“Ensuite, étudions quelques sorts offensifs, comment est ta magie du vent ?”

“magie du vent ?” Saya s’est assise sur le toit brûlé, la tête penchée.

J’ai hoché la tête une fois et j’ai répondu : “Oui, le vent. En contrôlant le flux d’air, tu peux bloquer les autres participants.”

C’était la méthode légèrement non conventionnelle que j’avais utilisée lors de mon propre examen pratique. Changer le flux de l’air avait été étonnamment efficace, et même maintenant je me souvenais de la façon dont les autres concurrents avaient perdu l’équilibre et étaient tombés de leurs balais ou avaient fait une embardée dans les bâtiments.

Le contrôle du vent était à la fois facile à apprendre et une arme puissante. Si nous avions assez de temps, je voulais absolument lui apprendre.

“Alors, frappe cette boîte là-bas avec un souffle de vent, je te prie.”

J’ai pointé du doigt les boîtes de conserve que nous avions installées sur le sommet du toit en face de nous. Il y avait environ une maison de distance entre nous et les boîtes de conserve, donc ce n’était pas du tout une tâche difficile.

“Le mieux est de se représenter une boule d’air et de frapper les boîtes de conserve avec—comme ceci.”

J’ai agité ma baguette, et instantanément, un vent violent a effleuré l’une des boîtes de conserve. Elle s’est mise à osciller d’avant en arrière avec un bruit fracassant.

Je me suis tourné vers Saya, qui me regardait d’un air dubitatif. « Ça n’est pas tombé, hein ? Tu as raté ton coup ? » elle semblait demander.

Mais je l’ai fait exprès. Vraiment !

“Très bien, essaie.”

“…Co-comme ça ?”

Saya agita sa baguette dans un souffle. La magie de l’air est l’un des premiers types de magie qu’une sorcière novice apprend, elle fut donc capable de produire une rafale de vent, mais celle-ci passa tout juste au-dessus des boîtes de conserve. Trop dommage.

“Tu tiens mal la baguette. Tu la pointes mal aussi. La magie du vent est subtile, alors essayer de la forcer ne servira à rien.”

“Hum, d’accord, et comme ça ?”

Whoosh. Le vent passa juste à côté de la boîte, exactement comme avant. “raté. Regarde.”

J’ai agité ma baguette, et les boîtes se sont à nouveau entrechoquées. Saya laissa échapper un petit bruit de surprise. “Whoa…” Elle avait enfin compris que j’essayais de ne pas faire tomber les boîtes.

Puis elle agita à nouveau sa baguette, plus doucement cette fois, avec un petit “Ey!” Elle avait manifestement appris en m’observant, mais la force de sa magie était trop faible. Elle n’a produit qu’une légère brise.

…Ça va mal. “Pas tout à fait. Comme ça.” “Comme ça ?”

Un coup et un raté.

“Totalement raté. Comme ça.” “Co-comment est-ce ?!”

Le vent n’a même pas effleuré les canettes. “Tout simplement horrible. Comme ça, regarde.”

“Quelque chose comme ça, alors !”

……

C’était une cause perdue. Sincèrement. Mes instructions ne faisaient aucune différence. Il temps de passer à la vitesse supérieure. Je passai derrière elle et lui saisis les deux poignets. Les épaules de Saya se contractèrent de surprise, et je lui ai parlé à l’oreille.

“Tu es prête ? Je vais canaliser de la magie du vent dans ta baguette.

Souviens-toi de la sensation.”

“A-avec mon corps ?”

“Oui, avec ton corps.” J’ai acquiescé, et pour une raison que j’ignore, ses oreilles étaient rouge vif. “Ok, on y va—”

Voilà, comme ça.

Nous nous sommes entraînés jusqu’au coucher du soleil le troisième jour, et Saya a complètement échoué à maîtriser la magie du vent.

D’une façon ou d’une autre elle a même empiré après que j’ai canalisé ma magie à travers elle…

Comment est-ce possible ? Je ne comprends pas.

De toute évidence, je ne m’occupais pas constamment de Saya. Vers midi, je suis parti seule et j’ai parcouru la ville à la recherche de ma broche, en parlant à autant de personnes que possible.

La tâche consistait à demander et continuer à demander.

Bien sûr, je ne m’attendais pas à trouver des informations aussi facilement et, en fin de compte, toutes les personnes à qui j’ai posé la question ont secoué la tête et donné la même réponse : « Je ne sais pas. »

“J’ai vu une broche”, a dit une femme plus âgée qui avait l’air d’être très expérimentée en matière de magie. En regardant de plus près, j’ai vu qu’elle portait une broche en forme d’étoile sur sa poitrine. Cependant, elle semblait presque aussi vieille qu’elle, et elle était d’ailleurs assez usée et abîmée.

Oh, Il semblerait que je puisse attendre quelque chose d’elle. Je ne suis pas sûr de ce qu’est ce « quelque chose », cependant…

“Où-où l’avez-vous vu ?!” J’ai immédiatement saisi cette nouvelle.

La femme a laissé échapper un rire digne d’une sorcière. “Hee-hee-hee… Hmm, je me demande…”

“S’il vous plaît, dites-le-moi, merveilleuse femme !”

“Hee-hee-hee.” Soudainement, elle m’a montré la paume de sa main. “…Qu’est-ce que ça veut dire ?”

“Combien cette information vaut-elle pour vous ? Hmm ?”

Elle est restée là, la main tendue vers moi. Je pouvais lire le message maintenant : « Si vous voulez en savoir plus, payez. »

…Elle joue des coups bas. Je n’en attendais pas moins d’une sorcière… “……” Je sortis silencieusement une pièce de mon sac et la déposai dans la main de la femme. Elle s’est alors remise à bouger, comme une poupée gonflable qui prendrait vie.

“Ce que j’ai vu, c’est—”

La longue histoire de la femme n’a fait que confirmer mes soupçons.

C’était ma cinquième nuit dans ce pays.

Alors que je contemplais la lune suspendue dans le ciel à l’extérieur de la fenêtre, la porte s’est soudainement ouverte. J’ai levé les yeux et j’ai vu Saya qui me regardait timidement.

“Euh, Mlle Elaina ?” “Qu’est-ce qu’il y a ?”

“J-je peux dormir ici avec vous ?” J’ai regardé le lit.

……

“C’est un peu petit, tu ne trouves pas ?”

“Nous tenons une auberge bon marché, désolé.”

Ah, non, ce n’est pas ce que je voulais dire. C’est une chambre pour une personne. Et le lit est aussi fait pour qu’une personne y dorme. Seul. “Eh bien, si ça ne vous dérange pas d’être à l’étroit, je pense que ça me va.”

“Youpi !”

Saya claqua la porte et entra dans la pièce, puis se glissa dans le lit. Elle sentait bon, comme si elle venait de sortir du bain. Comme c’était une auberge, nous devions utiliser le même shampoing, mais l’odeur était complètement différente de la mienne. J’ai attrapé une mèche de cheveux et l’ai approchée de mon nez, mais ce parfum tendre et féminin ne venait pas de moi.

Comment se fait-il qu’elle soit la seule à sentir aussi bon ? …Oh, bon. Il est l’heure de dormir.

Je me suis allongé, regardant toujours la lune, et j’ai remonté les couvertures. Je sentis bientôt la présence de quelqu’un derrière moi.

“La lune n’est-elle pas trop brillante pour être regardée pendant que tu t’endors ?”

“Un peu.” Je me suis retournée. Mon regard a alors croisé le sien. “…Hum, qu’est-ce que tu viens de dire à propos de la lune ?”

“Ça ne me dérange pas, elle n’est pas trop lumineuse pour moi.” Elle sourit légèrement. Au clair de lune, son sourire semblait éphémère, comme s’il allait se dissoudre si je le touchais.

“Bon travail aujourd’hui. Tu as fait de gros progrès par rapport à tes débuts. Bientôt, tu n’auras plus besoin de mon aide.”

“Quoi ? Ce n’est pas vrai. Il y a encore tant de choses que je veux que tu m’apprennes, Elaina.”

“…Je suis une voyageuse. Dans peu de temps, je vais quitter ce pays.” “Mais nous serons ensemble jusque-là.”

J’ai remarqué qu’elle se trémoussait et tortillait sous la couverture et que quelque chose de frais se trouvait sur ma main.

Elle m’a regardé dans les yeux et a serré ma main. “S’il te plaît, je veux que tu m’apprennes tellement plus.”

“……”

Ses yeux reflétaient la lumière de la lune.

Cette petite fille naïve doit vraiment idolâtrer les gens comme moi. Je sais que je suis sur le point de faire quelque chose de cruel—mais voilà, je dois faire ce qui est le mieux pour moi.

Je ne savais pas si la sensation piquante dans ma poitrine était de la culpabilité ou de la déception, mais je voulais croire que c’était la première.

“Il est inutile de poursuivre cette conversation, Saya”, dis-je en secouant sa main. “Alors pourquoi ne me rendrais-tu pas ma broche ?”

La vérité derrière la mystérieuse disparition de la broche s’est avérée être très simple.

« Une jeune fille vous a rentré dedans, n’est-ce pas ? Après votre départ précipité, elle a ramassé la broche. »

Les yeux encore brillants de l’argent que je lui avais donné, la vieille femme m’a dit qu’elle avait tout vu. Et son histoire était la vérité ; une partie de moi avait soupçonné la même chose. Ne pas la trouver après l’avoir cherché si minutieusement… quelqu’un a dû la ramasser.

Je me doutais que quelque chose se tramait depuis le début.

……

Saya.

Ton contrôle du balai était presque trop mauvais—assez pour me faire penser que tu faisais exprès de mal diriger ton balai. Après tout, si tu ne savais pas piloter ton balai suffisamment bien, tu n’aurais même pas le droit d’entrer dans ce pays.

Au début, j’ai supposé que Saya était une locale, mais quand je l’ai interrogée, elle m’a dit qu’elle était une mage d’un pays de l’Est qui était venue ici dans des circonstances particulières. Si c’était vrai, il était encore plus étrange qu’elle ne puisse pas faire voler son balai. Et donc…

…Voici la vérité. J’ai douté de toi dès le début. J’ai attendu et attendu que tu me rendes ma broche.

“Mais tu l’as cachée et tu ne me l’as jamais rendue. Au lieu de cela, tu as dit que tu voulais que je reste avec toi pour toujours. J’en ai assez de toi”, lui ai-je dit.

Saya s’est assise sur le lit et a baissé la tête. Je me demandais quelle émotion s’affichait sur son visage, mais je ne fis aucun geste pour la réconforter en lui touchant l’épaule comme je l’avais fait lors de notre première rencontre. Malheureusement, je ne suis pas de ce genre.

Elle a gardé son regard vers le sol, comme pour éviter la lumière de la lune, et j’ai simplement attendu sa réponse.

Je me demande combien de temps s’est écoulé. Une minute ? Dix minutes ? Peut-être seulement dix secondes.

“…m’interroger ?”

J’ai à peine entendu une toute petite voix. “Qu’est-ce que t’as dit ?” J’ai demandé.

“…Pourquoi ne m’as-tu pas interrogé ?” Cette fois, je l’ai entendue clairement.

“Parce que je n’avais aucune preuve. C’est la première raison. Même si je t’avais accusé et traité de voleuse, si tu l’avais nié, je n’aurais eu aucune preuve. J’aurais eu les mains liées.”

“……”

“De plus, je pensais que tu finirais par la rendre. Je ne pense pas vraiment que tu sois une mauvaise personne, Saya.”

Cette fille innocente et pleine d’entrain me faisait penser à une enfant gâtée par sa mère.

“Alors j’ai attendu”, lui ai-je dit.

Saya a finalement levé la tête. Son joli visage était en désordre, plissé par les pleurs. Elle a essuyé ses larmes et essayé de réprimer ses sanglots en disant : “Je me sentais seule.”

“Je ne suis pas ta petite soeur.”

“Je le sais. Je le sais, mais… je… je voulais être avec toi.” Sa voix était devenue si faible.

Je ne savais pas si elle parlait à sa sœur ou à moi.

Si je devais écrire ce que j’ai appris sur Saya depuis notre rencontre, ce serait une liste terriblement courte, mais d’une manière ou d’une autre, je crois que j’ai compris quel genre de personne elle était. Elle était une grande sœur inutile qui laissait toujours sa petite sœur adorable lui faire plaisir. Je suis sûre qu’elle avait toujours été comme ça, c’est pourquoi elle ne supporte pas que sa petite sœur la laisse derrière elle.

“Je détestais être seule. Je détestais ça, et j’avais peur, alors je—”

“Hé.” Je lui ai donné une pichenette sur le front, et ça a fait un claque ferme.

“Ce n’est pas une excuse.”

Si tu détestes être seul, trouve quelqu’un sur qui compter. Si tu détestes qu’on se moque de toi parce que tu es seul, sors et trouve quelqu’un avec qui tu t’entends bien. Si la solitude te fait peur, fais tout ce que tu peux pour y échapper.

“Est-ce que cela a vraiment de l’importance si tu es seule maintenant ? Si tu te sens seule ? Peux-tu devenir apprentie sorcière alors que tu t’accroches encore à ces peurs ? Chaque fois que les humains essaient vraiment, sérieusement, d’accomplir quelque chose, ils sont toujours seuls. On ne peut rien faire si on n’est pas seul. C’est fini s’il y’a quelqu’un à nos côtés.”

C’est probablement ce que ta petite sœur essayait de t’apprendre en te quittant. Je ne peux pas le dire avec certitude, cependant.

“…Mais.”

“Ah-ah-ah. Pas de mais. Je ne veux pas entendre la moindre excuse.” Je me suis bouché les oreilles des deux mains et j’ai secoué la tête. Il n’en est pas question. Mes cheveux ont volé dans tous les sens et l’ont frappée au visage.

Oups, je parie qu’elle n’a pas aimé ça.

“Bien sûr, c’est difficile de se démener toute seule. C’est effrayant. Je comprends cela. Et c’est pourquoi…”

Pendant que je parlais, j’ai utilisé la magie pour faire apparaître un chapeau pointu, exactement le même que le mien, et je l’ai posé sur sa tête.

“…je te donne ça. Laisse-moi laisser une petite partie de moi à tes côtés. Alors tu seras bien, même quand tu seras seule.”

S’agrippant fermement au bord du chapeau, Saya dit, “Mais si je prends ceci, tu n’auras plus…”

“Ah, c’est bon. C’est une pièce de rechange.”

J’ai sorti un autre chapeau et je le lui ai montré avant de l’enfiler moi-même.

“Maintenant, on est assortis. À présent, tu seras seule, mais jamais vraiment seule. Ta sœur et moi veillerons toujours sur toi.” Rends-moi donc ma broche, la pressai-je silencieusement.

Elle a tiré le chapeau très, très bas sur sa tête et l’a serré très, très fort, avec des épaules tremblantes, elle a fait un signe de tête silencieux. Elle avait l’air si faible et si impuissante.

J’ai serré ses maigres épaules et l’ai rapprochée de moi.

Le jour était arrivé.

Nous avions passé ensemble ma dernière nuit dans le pays. J’avais réconforté Saya en pleurs, je lui avais donné des conseils pour réussir l’examen pratique de magie, j’avais entendu parler du pays d’où elle et sa sœur étaient originaires, j’avais discuté de mes futurs voyages, et ainsi de suite.

Oh, et il s’avère que Saya est en fait une mage très puissante. Enfin, je le savais depuis le début, mais je n’ai jamais su pourquoi elle était si mauvaise en magie du vent. Sur ce point, j’ai eu beau me renseigner, Saya a rougi et refusé de répondre. Qu’est-ce qui lui prend ?

À la fin, nous nous sommes endormis ensemble au moment où le soleil se levait. La nuit avait été longue, très longue.

Mais un souvenir précieux.

J’y ai repensé plusieurs mois après avoir quitté le Pays des Mages.

Six mois, pour être exact.

Environ six mois se sont écoulés depuis que j’ai rencontré cette fille, que j’ai perdu ma broche et que je l’ai récupérée—wow, pas de doute, Le temps passe vite. Vraiment.

J’avais voyagé dans un autre pays, si loin que les gens demanderaient : « Hein ? Le Pays des Mages ? C’est où ? »

Si je me remémorais ces souvenirs, c’est parce que j’avais aperçu son nom alors que j’explorais une librairie.

LISTE DE RÉUSSITE À L’EXAMEN D’AVANCEMENT D’APPRENTI SORCIER

Imprimé sur une liasse de papier paille très bon marché, était le journal édité chaque mois par la mystérieuse organisation connue sous le nom d’Association Magique Unie, chargée de faire passer les examens d’avancement des apprentis-sorciers, entre autres. Les résultats des examens passés dans le monde entier, ainsi que quelques mots des candidats reçus, étaient affichés en première page.

Son nom y figurait.

“Hé, interdiction de lire dans le magasin.” Le propriétaire du magasin est apparu par derrière et a arraché les journaux.

“…Ah—” Mais je voulais continuer à lire.

“Tu veux lire ? Il faut payer.”

“Combien ?” “Une pièce de cuivre.”

J’ai payé, j’ai mis le journal sous mon bras et je suis retourné à mon auberge en fredonnant tout le long du chemin. J’ai tiré ma chaise jusqu’à la fenêtre et j’ai continué à lire. Dans l’article, la fille parlait de ses jours les plus difficiles et de ses espoirs pour l’avenir.

D’après l’article, elle avait déménagé au Pays des Mages avec sa petite sœur il y a plusieurs années. Sa sœur—et seulement sa sœur—est rapidement devenue apprentie sorcière et est retournée dans leur ville natale sans elle. Elle rencontra alors une certaine voyageuse qui lui donna le courage de se battre seule, ainsi qu’un chapeau incroyablement élégant.

Après le départ de la voyageuse, elle se présenta plusieurs fois à l’examen, mais celui-ci s’avéra trop difficile. Cependant, elle continua d’essayer et n’abandonna jamais, et finalement, elle obtint le rang d’apprentie sorcière. Elle allait maintenant rentrer chez elle, avec l’intention de s’entraîner dur et de devenir une sorcière.

Je n’ai pas pu m’empêcher de sourire.

Sa très longue histoire se conclut par une phrase :

« Une fois que je serai rentrée chez moi et que je serai devenue une sorcière à part entière, j’aimerais rendre visite à ma voyageuse préférée. »

J’ai posé le journal sur le bureau et j’ai regardé le ciel. Quelque part dans l’étendue infinie de ce ciel clair et bleu pâle, elle était là.

“Je t’attendrai—Saya.”

 

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