Chapitre 612 – Le Colisée Rouge

Traducteur/Checker : Gray

Team : World Novel

Épée en bois… se battre pour leur liberté…

Sunny se déplaça légèrement, faisant osciller sa cage, et jeta un coup d’œil à Elyas. Le jeune homme n’était plus d’humeur à parler et restait assis tranquillement, fixant l’obscurité.

Il y avait quelque chose, un soupçon de sens, dans ce qu’il avait dit. Sunny essaya désespérément de saisir ce sens, mais pour une raison ou une autre, ses pensées revenaient sans cesse aux statues du Dieu de la Guerre.

Il avait vu deux représentations de la redoutable divinité dans le Royaume de Hope. L’une représentait un guerrier en armure lourde, brandissant une lance ensanglantée et un bouclier fissuré — tous deux, vraisemblablement, représentant la guerre et la bataille — et l’autre une femme ne portant rien d’autre qu’une peau de bête autour de la taille, tenant une lance dans une main et un cœur humain battant dans l’autre… la lance représentant sa domination sur la guerre, la technologie et l’artisanat, peut-être, le cœur représentant son lien avec la vie et l’humanité.

Pourquoi ces statues étaient-elles si différentes ?

Sunny était encore épuisé par les furieuses batailles de la journée passée, ses pensées étaient lentes et fébriles, comme elles l’étaient souvent ces jours-ci. Frustré, il se frotta le visage, puis le scarifia de ses griffes acérées, déchirant sa peau. La douleur chassa le brouillard qui enveloppait son esprit, lui permettant de penser clairement pendant quelques minutes.

L’Autel de la Guerre… c’est ainsi que Solvane avait appelé l’île où se trouvait la statue primitive de la Déesse de la Vie. Et c’était bien le mot — cette représentation de la divinité semblait bien plus primitive, bestiale… ancienne.

La statue elle-même semblait incroyablement ancienne. Bien plus ancienne que les statues du puissant guerrier… en fait, elle semblait aussi ancienne que le Colisée Rouge lui-même, ou peut-être même plus ancienne. Assez ancienne pour avoir été créée avant que le Royaume de Hope ne soit brisé et transformé en une chaîne d’îles flottantes par le Dieu du Soleil, comme c’était le cas aujourd’hui, et comme ce le serait dans des milliers d’années.

Pourquoi Hope aurait-elle un monument à la gloire d’un de ses dieux dans son domaine ? L’idée en elle-même n’était pas si étrange. Les dieux et les daemons étaient loin d’être toujours en guerre, après tout. En fait, le Prince du Monde Souterrain avait un sanctuaire en l’honneur de la Déesse des Cieux Noir, le Dieu de la Tempête, dans sa tour même — malgré le fait que plus tard, elle deviendrait son ennemie mortelle.

La question n’était pas importante… ce qui était important, c’est que Sunny ne pouvait s’empêcher de penser à la statue, pour une raison ou une autre.

Aussi ancienne que le Colisée Rouge lui-même…

Soudain, Sunny pencha la tête.

Hein ?

L’amphithéâtre blanc et l’arène qu’il entourait étaient des vestiges du véritable Royaume de Hope. Il s’en était rendu compte il y a quelque temps, en partie à cause de leur apparence, et en partie à cause de la profondeur et de l’ancienneté des ombres qui se cachaient dans les coins du donjon.

En fait, Sunny soupçonnait que le théâtre n’avait pas toujours été une arène. Cela lui rappelait la carrière géante aux racines des Montagnes Creuses, où les sept héros du Rivage Oublié avaient excavé la pierre pour construire les puissants murs de leur cité, et la Tour Cramoisie elle-même.

La Cité d’Ivoire avait dû être construite à partir de quelque chose, elle aussi… cet endroit avait donc dû être une carrière similaire, autrefois, et avait servi de source pour les pierres blanches utilisées pour construire les ponts aériens et les aqueducs. Plus tard, il avait été transformé en théâtre, et plus tard encore, les Bellicistes avaient usurpé ce théâtre et l’avaient transformé en arène, imbibant les vieilles pierres de tant de sang qu’elles en étaient devenues rouges.

Ses yeux noirs se rétrécirent.

C’est ça… ça doit être ça…

Pendant tout ce temps, Sunny avait été tourmenté par une question paradoxale. Une question qui était de la plus haute importance pour ses tentatives de libération.

…S’il s’agissait d’une époque où le Sortilège du Cauchemar n’existait pas encore, alors comment Solvane avait-elle pu lui mettre une laisse capable de couper son lien avec le Sortilège ?

Le collier était un simple morceau de métal enchanté, sans serrure ni autre moyen de l’ouvrir. Il était presque impossible de l’endommager ou de le détruire, mais l’enchantement lui-même n’était pas très compliqué… Sunny pouvait sentir que ce n’était pas le cas. Ce qu’il faisait, cependant, c’était de le lier aux vastes et incroyablement puissants enchantements de l’arène elle-même.

Ces enchantements étaient utilisés par les Bellicistes pour entretenir les cages, empêcher les esclaves de s’échapper par n’importe quel moyen, terrestre ou magique, et s’assurer qu’ils se comportaient bien lorsqu’ils étaient transportés vers l’arène et, très rarement, lorsqu’ils en revenaient.

Son incapacité à se connecter au Sortilège semblait presque être un effet secondaire de ces mesures.

Mais qu’est-ce qui pouvait bien interférer avec le Sortilège, et encore moins accidentellement ?

Et maintenant, il avait l’impression d’avoir trouvé la réponse ! Si le Colisée Rouge n’avait pas été construit par les Guerriers, mais seulement usurpé par eux, alors c’était très clair.

…La sorcellerie d’un autre daemon pourrait… si le Démon du Désir était le créateur original du théâtre, alors les enchantements qu’il avait laissés derrière lui auraient probablement réussi à perturber le Sortilège tissé à partir des Fils du Destin par son frère aîné.

Sunny se déplaça, s’agrippant aux barreaux de la cage.

Soudain, une émotion puissante éclata dans sa poitrine, emplissant ses muscles d’une force renouvelée, et son esprit d’une résolution désespérée.

…L’espoir. C’était de l’espoir.

Il ne le considérait plus comme un poison. Non… c’était le contraire. Un antidote des plus puissants.

Si le Sortilège avait été créé par Weaver, et les enchantements qui l’entravaient créés par Hope… si tout cela était le résultat d’un affrontement entre deux types de sorcellerie démoniaque…

Alors pourquoi ne pouvait-il pas, en tant qu’héritier d’un héritage démoniaque, faire quelque chose pour résoudre ce conflit ?

Certes, Sunny ne connaissait rien au tissage de la magie… mais il n’avait jamais rien su non plus du combat, ni de la façon de vivre et de se battre dans le corps d’un véritable démon.

S’il y avait bien une chose pour laquelle il était doué, c’était pour apprendre de nouvelles choses.

Enfin… ça, et le mensonge.

Et rester en vie.

Fixant d’un œil nouveau l’effroyable donjon qui l’entourait, Sunny en étudia les murs de pierres anciennes et fronça les sourcils.

Alors… comment était-on censé apprendre la sorcellerie ?